La Côte d'Ivoire

Résumé du document

Le déclenchement d'une véritable guerre civile en 2002 a définitivement mis un terme au mythe de la stabilité sans faille de la Côte d'Ivoire. Comment le sentiment d'ivoirité si cher au cœur de Félix Houphouët-Boigny, premier président, a-t-il pu être à ce point détourné que les tensions communautaires atteignent leur paroxysme? Quels sont les dessous de la fracture ivoirienne? La quête d'une identité ivoirienne que l'on pensait achevée a-t-elle un espoir de réussir un jour?

Extraits

[...] Dès 1981 la Côte d'ivoire se déclare insolvable. Des enjeux régionaux L'ensemble des pays frontaliers sentent leur destin intimement lié à la stabilité de la Côte d'Ivoire. Le décollage économique des années 70 a créé un appel d'air très puissant pour les pays voisins. La main d'œuvre a alors afflué des pays frontaliers. Aujourd'hui encore 30% de la population est issue de l'immigration. Or, la difficile construction d'une identité nationale ivoirienne a favorisé la xénophobie (cf. III). Les populations allogènes sont alors perçues avec hostilité. [...]

[...] Quant à une identité nationale basée sur l'ethnie, ou encore la culture, mieux vaut ne pas y songer, si l'on ne veut se heurter à la multiplicité des tribus qui peuplent la région. Pourtant, cette identité existe; c'est du moins le sentiment de Théo Doh-Djanhoundy. Selon ce juriste ivoirien, l'envie de vivre ensemble subsiste bien, mais il faut la cultiver à l'aide de politiques de national- civisme, celles-là même qui il y a cent ans forgeaient l'identité nationale française. Les pouvoirs publics se doivent de rassembler la population autour de symboles de l'unité nationale, le salut au drapeau et l'apprentissage de l'Abidjanaise à l'école ne peuvent être facultatifs. [...]

[...] Quels sont les dessous de la fracture ivoirienne? La quête d'une identité ivoirienne que l'on pensait achevée a-t-elle un espoir de réussir un jour? Conditions naturelles et structure économique: le terreau de l'instabilité Une dynamique de territoire propice à l'instabilité: la fracture nord/sud Tandis que le Sud se partage entre zones forestières et territoires aménagés pour la culture, la moitié nord est majoritairement occupée par une savane septentrionale, transition avec les pays du Sahel. Ainsi, la moitié Sud de la Côte d'ivoire concentre la quasi-intégralité des produits d'exportations : le caco, le café et le coton cultivés dans les zones forestières aménagées, le bois mais aussi de petites quantités de pétrole exploitées grâce aux plateformes off-shore du Golfe de Guinée. [...]

[...] Les ferments de cette réussite? Une ivoirisation progressive des élites pour remplacer les cadres français en place, une politique menée d'une main de fer "grâce" au maintien du système de parti unique jusque 1990 et la faiblesse de l'armée. En jouant avec des préjugés ethniques et religieux Houphouët avait fermement maintenu l'unité entre les grandes régions et ethnies. Toutefois, les outils de cette réussite sont aussi les racines des conflits à venir. La faiblesse de l'armée a certes longtemps permis d'éviter au Président de subir un sort très répandu chez ses voisins africains, l'éviction par un putsch. [...]

[...] Le pays ayant reçu plus de crédits que son développement n'en exigeait, le surplus d'emprunts à rembourser a alors brusquement ralenti la croissance. La population se retrouve otage de politiques structurelles lourdes qui lui minent le moral. Par ailleurs, l'économie ivoirienne repose essentiellement sur l'agriculture. Or, les marchés dont dépendent les produits exportés sont caractérisés par une grande instabilité. En 1979, les cours de cacao et café, victimes de la crise économique mondiale chutent, la balance commerciale ivoirienne devient déficitaire. [...]