Sur le plateau calcaire du mont Sion, à une cinquantaine de kilomètres de la Méditerranée et à une vingtaine de kilomètres de la Mer Morte, se trouve une ville. Yerushalayim. Al-Quds. Salem. Jérusalem. Une ville-symbole, une ville-conflit, point central de la géopolitique moyen-orientale.
Située à 745 m d'altitude, Jérusalem s'étend sur une superficie d'environ 200 km carrés. Voisine des Territoires palestiniens occupés, à l'est, proche de Bethléem, au sud, de Ramallah, au nord, mais résolument tournée vers Tel-Aviv, à l'ouest, la ville de Jérusalem, qui concentre 11% de la population juive et 17% arabe du pays, soit 780 000 habitants (479 000 à Jérusalem-est et 301 000 à Jérusalem-ouest), est un point central des enjeux israélo-palestiniens, plus par sa dimension symbolique très forte que par sa situation géographique en elle-même.
Son importance en fait un lieu de crispation identitaire, de cristallisation des tensions, de prisme du conflit israélo-palestinien. En effet, Jérusalem est l'un des – nombreux – points de blocage des tentatives de processus de paix israélo-palestinien. Les enjeux soulevés par cette ville en font une véritable « bombe urbaine », dans laquelle le moindre élément, qui partout ailleurs semblerait anodin – prend des dimensions disproportionnées et devient un enjeu de géopolitique nationale – voire internationale.
[...] Cette colonisation de la ville s'inscrit dans la continuité des politiques territoriales israéliennes visant à établir une continuité territoriale juive brisant la continuité territoriale palestinienne. C'est ainsi que depuis 1967, Jérusalem-Est a vu l'implantation d'importantes communautés juives dans des points stratégiques. Ainsi, les colonies de Ramot Allon, Pisgat Zeev, Neve Yaakov, East Talpiot et Gilo sont autant d'enclaves israéliennes répondant aux objectifs politiques de l'Etat. Le développement de ces quartiers juifs a permis la justification de l'appropriation d'un tiers de Jérusalem-Est par Israël, soit 24 kilomètres carrés sur les 70 annexés en 1967. [...]
[...] Cette particularité confère à la ville un enjeu supplémentaire, une dimension idéologique très forte dans le cadre du conflit israélo-palestinien. Dès lors, Jérusalem n'est plus simplement une ville comme une autre, sujette à des politiques urbaines, mais elle est capable de par ses qualités intrinsèques et les représentations dont elle est porteuse, d'avoir une influence non négligeable sur les tensions politiques entre Israéliens et Palestiniens. En effet, on considère ici que cities are viewed here not as simple reflectors of larger societal tensions dynamics, but rather as capable through their physical and political qualities to exert independent effects on ethnic tension, conflict, and violence Scott Bollens considère ainsi qu'une ville peut par elle-même jouer un rôle important, que les politiques urbaines peuvent être déviées par les caractéristiques propres de la ville: much as a prism deviates light from a straight line projection, the physical and political structure of a city may be capable of modifying the relationship between the broader causes of ethnic strife political disempowerment and cultural deprivation and the forms and level of ethnic strife Dans le cas présent du conflit israélo-palestinien, il semble que Jérusalem s'inscrive profondément dans cette conception de la ville-prisme: on sort ici de la vision de la ville comme un territoire donné à administrer, il s'agit plutôt de la ville comme entité particulière qui n'est absolument pas neutre, et dont les caractéristiques propres jouent un rôle primordial dans la formulation et la mise en oeuvre des politiques urbaines. [...]
[...] Strategies are applied to land-use planning and regulation in order to entrench and expand territorial claims or enforce exclusionary control of access. ( . ) In allocation decisions, a citizen is treated primarily as a member of an ethnic group, not as an individual À Jérusalem, l'idéologie dominante supportée par les politiques urbaines vise à assurer la sécurité et la domination des Israéliens, mais aussi et surtout à empêcher par-dessus tout une éventuelle redivision de la ville. Ces constatations sont ainsi exprimées par Scott Bollens: Israeli urban policy-makers and planners have pursued the goals of Israeli control ad security through policies that entrench a Jewish majority within the Israeli-defined city. [...]
[...] Ces politiques de l'entre-soi ne sont pas l'apanage de Jérusalem, et elles sont caractéristiques des villes fortement inégalitaires: ainsi on peut évoquer les gated communities des États-Unis, mais également le cas des grandes métropoles latino-américaines (Mexico, Bogota, Rio de Janeiro, etc), arabes, asiatiques, etc. Il s'agit dans tous les cas de lieux où la polarisation sociale est rapide et marquée. Cet auto-enfermement résidentiel se manifeste à Jérusalem dans les colonies juives, exemple type de communautés repliées sur l'entre-soi, et réduisant autant que possible les contacts avec l'autre, ce dont les voies interurbaines reliant les quartiers juifs entre eux sont une illustration. La géographie de la peur est un élément central de l'urbanisme israélien à Jérusalem. [...]
[...] KAMINKER Sarah, For Arabs only: building restrictions in Easy Jerusalem Journal of Palestine Studies, vol (Summer 1997), pp. 5-16, University of California Press. REKACEWICZ Philippe, VIDAL Dominique, Comment Israël confisque Jerusalem-Est Le Monde Diplomatique, Fev YIFTACHEL Oren, Democracy or Ethnocracy?: Territory and Settler Politics in Israel/Palestine Middle East Report, n°207, Who Paid the Price? 50 Years of Israel, (Summer, 1998), pp. 8-13, Middle East Research and Information Project. [...]
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