À Vienne, quatrième métropole européenne de par sa taille qui connait alors une expansion remarquable, c'est le volontarisme politique de François-Joseph qui permet à la ville de trouver l'espace urbain prestigieux qui lui manquait et de devenir une capitale moderne en ayant l'ambition de créer un boulevard annulaire, le Ring, à la place de fortifications devenues anachroniques. Cette modernisation prend la forme d'une haussmannisation s'inspirant du modèle parisien, tout en conservant certaines spécificités permettant de faire de cette innovation majeure qu'est le Ring de Vienne un lieu symbolique de la puissance viennoise.
En quoi le processus d'aménagement et de modernisation en cours à Vienne s'ancre-t-il dans une dynamique de transformation du cadre de vie qui s'opère dans tout l'espace européen ?
[...] Ce sont ces raisons à la fois techniques et sociales qui parasitent la vie quotidienne viennoise et laissent présager son déclin ; c'est pourquoi une nouvelle impulsion s'impose. B . mais qui marque surtout le sacre ostentatoire des nouvelles classes sociales Néanmoins -on le verra-, le Ring est bien moins un dispositif urbanistique pour fluidifier la concentration ouvrière que pour mettre en avant l'insolente opulence des nouvelles classes aisées de la ville. Ainsi, si Vienne prend les nécessaires mesures de régulation de la ville, -par un accent mis sur la santé publique (le premier hôpital municipal date de 1873), les espaces verts, la canalisation du Danube pour éviter les inondations, et les techniques d'adduction d'eau pour alimenter toute la ville-, l'« ère de la Ringstrasse n'est pas celle de la prise en compte des impératifs sociaux de l'expansion urbaine. [...]
[...] Ces aspects, souvent méprisés par les constructeurs du Ring comme les communications, avec la construction du réseau ferré de Vienne entre 1894 et 1901- devront donc encore attendre. Le Ring de Vienne est l'œuvre de la société libérale, qui accède au pouvoir à la faveur de la monarchie constitutionnelle, et aussi à celle des défaites (1859, 1866) qui finissent de reléguer l'armée au second plan des piliers de l'État. Les libéraux font de Vienne le lieu du rayonnement de leur vie intellectuelle, ne parle-t-on d'ailleurs pas dans le tract annonçant le début des travaux d'« embellissement de la ville par les arts (Geschmeckt durch Kunst) (v. [...]
[...] Pourtant, la Ringstrasse de Vienne a aussi pour spécificité qu'elle se concentre moins -à l'inverse notamment de sa contemporaine parisienne- sur la prise en compte directe des effets de l'explosion démographique de la période, que sur le côté visible, bruyant et superficiel de l'embellissement de la ville, destiné à valoriser ses classes les plus aisées, et graver dans le marbre le nouvel essor de la grande société bourgeoise au détriment de l'aristocratie impériale. Il faut attendre les années 1890 et surtout la fin de la Première Guerre mondiale pour que Vienne devienne -et elle le deviendra ! - un modèle dans la régulation et la fluidification urbaine. [...]
[...] En effet, celui-ci, large de 82 pieds, se voulait être une large artère devant faciliter les mouvements de troupes et le transit de matériel d'un point à l'autre de la capitale. Parmi les premières constructions du Ring furent d'ailleurs implantées deux casernes, à proximité des gares, et un nouvel arsenal. Le souvenir de 1848, la peur d'une insurrection viennoise et l'objectif de faciliter la mobilité des troupes interviennent donc dans la réalisation du Ring. Ce sont néanmoins les nécessités économiques et sociales qui poussèrent François Joseph à instaurer la commission d'expansion urbaine en 1857. [...]
[...] Mais par la suite, le Ring témoigne de l'évolution du régime vers la monarchie constitutionnelle. Carl Schorske montre par ailleurs que c'est non plus la haute aristocratie, mais ce que l'on peut appeler la seconde société qui devient à ce moment-là le centre d'impulsion du mécénat et de la vie culturelle. C'est donc cette seconde société composée de grands bourgeois, de l'élite juive, de rentiers, et grossie par la légion d'anoblis de fraiche date (2200 fonctionnaires et 3400 officiers sur tout le XIXe siècle), qui est au cœur des réalisations du Ring. [...]
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