Pour Jean Clavel, « le vin n'est pas seulement une boisson alcoolisée, énergétique, euphorisante, il est un élément culturel important de notre civilisation, il est un moyen de convivialité, un support de conversation, un lien avec un terroir, un paysage, un vigneron, il est le fruit de l'histoire, le complément indispensable de notre gastronomie occidentale , qui, du fait de la mondialisation, s'étend au monde entier, comme s'étendent la découverte de goûts que nous considérons comme exotiques ». Il estime aussi que l'Homme a façonné la vigne depuis près de 5000 ans.
Un vignoble est par définition l'ensemble des vignes d'une région. Celui du Languedoc Roussillon (avec celui de Provence) est le plus ancien de France (malgré de multiples mutations), car il est, à la fois, le successeur du vignoble d'Agde, planté il y a 2.500 ans par les vignerons massaliotes (de Massalia, ancien nom de Marseille), et du vignoble narbonnais planté par les vétérans des légions romaines pendant le Ier siècle avant notre ère. Il est également, et de loin, le plus vaste (plus de 300.000 hectares en 1997) puisqu'il représente, à lui seul, 33% du vignoble français. Son ancienneté lui a permis de connaître successivement plusieurs bouleversements, dont certains qui seront exposés plus loin, qui expliquent aussi bien l'orientation de sa production que ses caractéristiques géographiques.
Notre étude s'attachera plus précisément au vignoble gardois situé sur la rive droite du Rhône (cf.carte1), regroupant les cantons de Lussan, Pont-Saint-Esprit, Bagnols-sur-Cèze, et Barjac.
Ce vignoble attire l'attention par les enjeux géographiques et économiques qu'il connaît, dans la mesure où il est plongé dans une crise qui semble durer depuis plus d'une trentaine d'années. Plus généralement, l'agriculture française est touchée par ce phénomène qui conduit à une forte baisse du secteur primaire dans le pays, et ce, même pour la viticulture, un des symboles forts des terroirs français. On pourrait imaginer alors que seuls les vignobles réputés de haute qualité (les vins de Bourgogne et du Bordelais notamment) auraient pu subsister à une crise aussi longue. Et pourtant, le vignoble du Languedoc reste toujours un grand producteur de vin, bien qu'il prétende privilégier désormais la qualité à la quantité. Il est vrai que durant ces dernières années, plus de 140.000 hectares de vignes de qualité médiocre ont été arrachés.
Mais encore loin de la qualité des grands vignobles français, comment peut-on expliquer que le vignoble languedocien, et en particulier dans ce secteur précis du Gard, se maintient, alors que la filière est en crise ?
En s'appuyant notamment sur des enquêtes réalisées sur le terrain auprès de responsables de coopératives viticoles et auprès de vignerons situés dans les quatre cantons du Gard cités précédemment, nous analyserons dans un premier temps le vignoble gardois dans son ensemble avec les diverses mutations qu'il a connu, avant d'étudier les crises qu'il a rencontré sans toutefois faire disparaître le vignoble. Nous verrons ensuite quelles sont les perspectives de survie du vignoble, les solutions mises en œuvre pour subsister en dépit de la crise.
[...] Néanmoins, dans la vallée de la Cèze, cette crise ne provoque pas de bouleversement des paysages, provoquant des phénomènes d'inertie territoriale. A Une crise à son paroxysme : un cumul de catastrophes naturelles et un contexte économique déprimé - un contexte naturel difficile La crise qui touche le vignoble depuis plusieurs années n'est pas un simple problème économique de correspondance entre l'offre des producteurs et la demande des consommateurs. En effet, plusieurs faits se conjuguent et notamment des problèmes liés au contexte naturel. [...]
[...] En comparaison par rapport au vignoble de masse (Béziers - Narbonne), la crise ne remet pas ici en question le système tout entier. L'homogénéité du vignoble fait que l'échec d'un vin n'entraîne pas un échec de l'ensemble du vignoble. Malgré l'importance du tissu coopératif, ce vignoble là est dirigé par des acteurs qui par de nombreux aspects sont plutôt individualistes. Ils ont peut-être compris ici depuis plus longtemps qu'ailleurs que la production de vin français (à fortiori le leur) est concurrencée désormais au niveau mondial. [...]
[...] Par ailleurs, le vignoble est recomposé dans sa structure même. En effet, les viticulteurs et vignerons renouvellent les ceps de vigne pour deux raisons principales. La première raison est le remplacement de ceps vieux qui ont souffert des inondations ou de la sécheresse. Le deuxième motif de changement est d'ordre gustatif. Il y a un renouvellement des cépages en fonction des demandes de la clientèle. Cette adaptation est progressive. Ces changements de cépages peuvent être faits dans le cadre d'une aide de l'Etat. [...]
[...] Le terme lui-même se décline entre culture raisonnée ou bien lutte raisonnée selon l'expression du gérant de la coopérative de St Gély. Ce dernier d'ailleurs n'utilise probablement pas ce terme par hasard, puisqu'il doit convaincre les vignerons de s'orienter vers cette méthode, à laquelle ils sont souvent réticents. Concrètement, la culture raisonnée est un traitement du sol et de la vigne plutôt préventif que curatif. Le travail du sol est traité à des cadences régulières, avec des produits phytosanitaires naturels plutôt que chimiques. Le travail du vigneron est fait en parallèle avec un ingénieur agronome. [...]
[...] Par conséquent, le vignoble gardois a un passé houleux qui l'a mené dans une crise économique dont il semble avoir du mal à se sortir. L'option de privilégier la qualité par rapport à la quantité semble tout à fait réalisable, mais encore faut-il s'en donner les moyens. C'est pourquoi, après cette observation globale du vignoble, notre analyse va changer de perspective en s'attachant plus particulièrement au phénomène actuel de crise au cœur de l'actualité, dans le but de trouver des éléments de réponse au problème soulevé entre vignoble qui subsiste et anomalie économique. [...]
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