CEDH, 3 octobre 2006, Ben Naceur c/ France
L'arrêt rendu par la CourEDH le 3 octobre 2006 est relatif au principe de l'égalité des armes.
En l'espèce, le procureur général, qui dispose d'un délai plus long pour interjeter appel, a usé de cette faculté pour interjeter appel du jugement correctionnel ayant condamné le prévenu. Lorsqu'il a usé de cette faculté, il n'est pas possible pour le prévenu de faire un appel incident.
Le requérant présente une requête devant la CourEDH en invoquant une violation de l'article 6 paragraphe 1 de la CEDH. Il considère qu'il y a eu une atteinte au principe de l'égalité des armes en raison du délai plus long dont dispose le procureur général pour interjeter appel du jugement correctionnel et de l'impossibilité de faire un appel incident lorsque ce magistrat a usé de cette faculté, comme ce fut le cas en l'espèce.
Le requérant estime d'une part que la solution adoptée par la CourEDH dans la décision Guigue et SGEN-CFDT c/ France qui concluait à l'irrecevabilité d'un grief similaire ne saurait être transposée à la présente espèce dans la mesure où la requête avait été introduite non par un prévenu mais par une partie civile. Or dans cette affaire, la Cour s'était également fondée pour rejeter la requête sur le fait que l'action civile est indépendante de l'action publique. Ainsi, en l'absence d'appel portant sur les dispositions civiles du jugement de première instance, l'appel du procureur général n'avait aucune incidence sur le caractère définitif de ces dispositions, quelle que soit l'issue de cet appel pour le prévenu ; alors qu'au contraire, en l'espèce, l'appel du procureur général a conduit à rejuger l'action publique aux dépens du prévenu.
Le requérant estime ensuite que c'est le principe même ainsi que les modalités de l'appel ouvert au procureur général qui sont critiquables. Un délai d'appel supplémentaire de deux mois porte atteinte à la sécurité juridique et il est disproportionné par rapport au délai de dix jours dont disposent les autres parties. Ceci a un caractère inadmissible au regard du principe de l'égalité des armes.
Enfin, le requérant considère que l'impossibilité de faire un appel incident à la suite de l'appel du procureur général l'a mis dans une position d'infériorité contraire au principe de l'égalité des armes. Il fait valoir que la possibilité d'obtenir en appel une infirmation à la baisse de la condamnation de première instance est théorique et illusoire puisque le prévenu n'ayant pas estimé devoir faire appel, la cour d'appel est induite à considérer que la décision le condamnant en première instance lui convient.
En ce qui concerne les arguments du gouvernement, celui-ci rappelle que selon la jurisprudence de la CourEDH, le principe de l'égalité des armes ne revêt pas un caractère absolu et n'exige pas des Etats l'établissement d'une stricte égalité entre les parties. Il estime que la situation du requérant en l'espèce doit être différenciée de celle où le procureur général avait seul la faculté d'interjeter appel de certaines contraventions puisque dans la présente affaire, le requérant disposait du droit de faire appel du jugement correctionnel : il n'a donc pas été privé d'un recours mais seulement été soumis à des conditions de forme et de délai distinctes de celles du procureur général. De plus, le gouvernement considère que la cour d'appel aurait pu infirmer le jugement dans un sens favorable au requérant. Et, selon le gouvernement, la solution retenue dans l'affaire Guigue et SGEN-CFDT c/ France doit être étendue à l'espèce.
[...] Les règles de nature procédurale telles que les délais régissant l'introduction de recours sont partie intégrante de la notion de procédure équitable. Elle rappelle ensuite la décision Guigue et SGEN-CFDT France qui avait jugé que le fait que le délai d'appel de dix jours soit notablement plus court pour les parties privées que pour le procureur général, qui est d'ailleurs dans une situation différente, ne saurait placer ces parties en position de net désavantage par rapport au procureur. Mais en l'espèce, la situation est différente car dans l'affaire Guigue et SGEN-CFDT France, les requérants étaient les parties civiles dont les intérêts ne pouvaient être affectés par l'appel interjeté par le procureur général contre le volet pénal du jugement de première instance. [...]
[...] CEDH octobre 2006, Ben Naceur France L'arrêt rendu par la CourEDH le 3 octobre 2006 est relatif au principe de l'égalité des armes. En l'espèce, le procureur général, qui dispose d'un délai plus long pour interjeter appel, a usé de cette faculté pour interjeter appel du jugement correctionnel ayant condamné le prévenu. Lorsqu'il a usé de cette faculté, il n'est pas possible pour le prévenu de faire un appel incident. Le requérant présente une requête devant la CourEDH en invoquant une violation de l'article 6 paragraphe 1 de la CEDH. [...]
[...] Ainsi, en l'absence d'appel portant sur les dispositions civiles du jugement de première instance, l'appel du procureur général n'avait aucune incidence sur le caractère définitif de ces dispositions, quelle que soit l'issue de cet appel pour le prévenu ; alors qu'au contraire, en l'espèce, l'appel du procureur général a conduit à rejuger l'action publique aux dépens du prévenu. Le requérant estime ensuite que c'est le principe même ainsi que les modalités de l'appel ouvert au procureur général qui sont critiquables. Un délai d'appel supplémentaire de deux mois porte atteinte à la sécurité juridique et il est disproportionné par rapport au délai de dix jours dont disposent les autres parties. [...]
[...] De plus, le gouvernement considère que la cour d'appel aurait pu infirmer le jugement dans un sens favorable au requérant. Et, selon le gouvernement, la solution retenue dans l'affaire Guigue et SGEN-CFDT France doit être étendue à l'espèce. La question qui se pose alors à la CourEDH est la suivante : le délai plus long dont dispose le procureur général pour interjeter appel l'impossibilité de faire un appel incident lorsqu'il a usé de cette faculté sont-ils contraire au principe de l'égalité des armes ? [...]
[...] En particulier, le fait même que le requérant n'ait pas relevé appel dans le délai légal apparaissait comme la démonstration qu'il estimait avoir peu de chances de pouvoir faire réformer en appel, dans un sens qui lui aurait été favorable, la décision rendue en première instance. Il s'ensuit que «le fait que le parquet bénéficie d'une prolongation du délai d'appel, conjugué à l'impossibilité pour le requérant d'interjeter un appel incident, a mis ce dernier dans une position de net désavantage par rapport au ministère public, contrairement au principe de l'égalité des armes. Statuant in concreto, la Cour constate que celui-ci a été méconnu». [...]
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