Libertés fondamentales, naissance, enfant handicapé, préjudice, réparation, faute médical, lien de causalité, jurisprudence.
« Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ». Cette disposition de l'article L.114-5 du Code de l'action sociale et des familles issu de la loi du 4 mars 2002 est perçu comme l'issue de la polémique sur la responsabilité des médecins du fait du non-décèlement du handicap d'un enfant à naître, empêchant ainsi la mère d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse.
Les arrêt Centre hospitalier régional de Nice contre Quarez du Conseil d'État, en date du 14 février 1997, et Perruche de la Cour de cassation, en date du 17 novembre 2000, sont justement venus ouvrir le débat sur cette responsabilité médicale.
Dans les espèces, deux femmes enceintes ont effectué des examens médicaux afin de savoir si leurs enfants à naître seraient atteint d'un handicap, auquel cas elles procéderaient à une interruption volontaire de grossesse. Les médecins n'ayant rien détecté, Mme A va donner naissance à un enfant atteint de graves séquelles et Mme Q à un enfant atteint de trisomie 21.
Les parents des enfants nés handicapés vont alors faire un recours contre les agents médicaux afin d'obtenir des dommages et intérêts en leur nom et pour leurs enfants. La cour administrative d'appel de Lyon, le 21 novembre 1991, ayant accepter d'indemniser et les parents et leur enfant, le centre hospitalier de Nice demande au Conseil d'État d'annuler l'arrêt contesté. La cour d'appel de C ayant refuser l'indemnisation de l'enfant, ses parents se sont pourvus en cassation.
Les juridictions ont eu à se poser la question suivante: l'enfant qui naît atteint d'un grave handicap dû à une maladie contractée par sa mère durant la grossesse est-il en droit d'obtenir réparation des médecins qui, à la suite d'une erreur de diagnostic, n'avaient pu informer les parents de son état, afin de permettre à la mère d'interrompre sa grossesse quand il en était encore temps ?
Si le Conseil d'État a estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire peser sur le corps médical les conséquences d'un handicap que ses fautes n'ont pas causé, la Cour de cassation l'a au contraire admis.
Alors que le juge administratif a considéré que l'infirmité dont souffre l'enfant est inhérente à son patrimoine génétique, le juge judiciaire a déclaré que dès lors que les fautes commises par le médecin ont empêché la mère d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse afin d'éviter la naissance d'un enfant atteint d'un handicap, ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par les fautes retenues.
Les arrêts du Conseil d'État et de la Cour de cassation présentent l'intérêt d'être venus ouvrir le débat concernant la responsabilité des médecins du fait de non-décèlement du handicap d'un enfant à naître empêchant ainsi la mère de recourir à l'interruption volontaire de grossesse.
Si les arrêts Quarez et Perruche sont en désaccord quand à la possibilité pour l'enfant né handicapé de se faire indemniser du fait de son handicap (I), l'intervention du législateur ne fera que confirmer les divergences de positions des juridictions concernant le droit de naître en bonne santé (II).
[...] En définitive, l'opposition persistante de la Cour de cassation et du Conseil d'État sur la question de l'indemnisation du préjudice subi par un enfant handicapé, du seul fait de sa naissance, prouve que le débat sur le sujet est loin d'être clos. [...]
[...] La Cour de cassation rattache donc le préjudice de l'enfant à la volonté de sa mère de ne pas le faire naître. C'est parce que le droit de la mère à avoir recours à l'IVG n'a pas été respecté que découle corollairement un droit pour l'enfant de ne pas naître. Des dérives pouvant facilement découler de la jurisprudence Perruche, le législateur est intervenu. La question se pose donc de savoir qu'elles ont été les suites des jurisprudence Perruche et Quarez concernant le droit de naître en bonne santé. [...]
[...] Ainsi, la Cour de cassation continue à faire application de sa jurisprudence dite «Perruche». Depuis un arrêt du 8 juillet 2008 plus aucun doute ne subsiste: l'enfant né handicapé tout comme ses parents ses parents ont le droit de demander à leur médecin l'indemnisation intégrale de leurs préjudices, si le risque de handicap de l'enfant n'a pas été révélé avant sa naissance, et ce dès lors que l'enfant est né avant le 7 mars 2002. Après ces arrêts rendus par la Cour de cassation, nous étions en droit de nous demander si le Conseil d'État se rallierait également à la position de la Cour européenne des Droits de l'Homme et quelle serait l'étendue de cette nouvelle jurisprudence. [...]
[...] Du droit de naître en bonne santé: une divergence originairement consacrée Si le Conseil d'État et la Cour de cassation partagent la même position concernant l'existence d'une faute du médecin et d'un préjudice subit par les parents et les enfants les deux juridictions ont adopté une solution différente concernant le lien de causalité entre faute et préjudice La question de l'existence d‘une faute médicale: Les deux juridictions ont nécessairement admis l'existence d'une faute du médecin mais également la présence d'un préjudice Une faute médicale indubitablement commise: Dans les deux arrêtes commentés, Cour de cassation et Conseil d'État vont reconnaître que le médecin a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En effet, le médecin peut engager sa responsabilité sur le fondement de la violation de son obligation de conseil, corollaire de son obligation de procéder à des soin. [...]
[...] En l'espèce, l'action en réparation de ce préjudice a ainsi été admise tant par la première Chambre civile de la Cour de cassation que par le Conseil d'État. Mais, d'un autre côté, ce préjudice est aussi celui de l'enfant, également amené à supporter les conséquences de son handicap. En définitive, il n'a pas été contesté par les deux juridictions qu'une faute a été commise par le médecin, non seulement à l'égard de la mère, mais aussi à l'égard de l'enfant. [...]
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