Recette de cuisine et droit d’auteur: évolution de la jurisprudence et de la doctrine en matière de protection des recettes de cuisines par droit d’auteur

Thèmes abordés

évolution, jurisprudence, recettes, cuisine, droit d'auteur

Résumé du document

En fait, la notion de genre présente surtout un intérêt particulier lorsque l'on s'intéresse aux créations s'adressant à l'odorat et au goût. L'article L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle dresse une liste de créations susceptibles d'être protégées par le droit d'auteur. Même si on y trouve exclusivement des oeuvres perceptibles par la vue et par l'ouie, rien n'interdit de voir dans une recette de cuisine ou une formule de parfum une oeuvre de l'esprit. La liste dressée par cet article n'est pas exhaustive et, comme on l'a vu, un genre de création ne peut être exclu par principe de la protection. D'ailleurs, ce principe a été rappelé expressément par la cour d'appel de Paris (CA Paris, 3 juill. 1975 : D. 1976, somm. p. 19). Une recette de cuisine devrait donc pouvoir être protégée, sous réserve qu'elle soit originale.

Extraits

[...] Il faut reconnaître que la seconde argumentation est beaucoup plus pertinente que la première, laquelle met l'accent sur un processus de création qui est normalement indifférent, seule l'originalité du résultat obtenu devant être recherchée (en ce sens, P. Sirinelli, obs. préc.). Mais si la preuve de l'originalité est souvent difficile à apporter, l'obstacle n'est pas pour autant toujours insurmontable. Ainsi, des juges ont affirmé que “la création de nouveaux parfums est le résultat d'une véritable recherche artistique” et ont admis qu'une fragrance originale est susceptible de protection (T. com. Paris, 15e ch sept : Juris-Data n° 1999-133029 ; RJDA juill p ; Comm. com. électr comm note C. Caron ; LPA 2000, n° 45, p. [...]

[...] Plus récemment, la cour d'appel de Paris (CA Paris, 4e ch. B sept : Propr. intell. janv n° 14, p obs. P. Sirinelli) a elle aussi admis la protection d'un parfum : « Une flagrance qui est le résultat d'une recherche intellectuelle d'un compositeur faisant appel à son imagination et à ses connaissances accumulées pour aboutir à la création d'un bouquet original de matériaux odorants choisis dans un but esthétique constitue une oeuvre de l'esprit perceptible et individualisée bénéficiant de la protection du droit d'auteur ; ( . [...]

[...] Tout est donc question de degré et il faut alors admettre que très souvent, le parfum ou la recette est le fruit d'un savoir-faire plus que d'une activité créatrice. Il en va de même pour la création de nuances de couleur (TGI Créteil, préc.). On a contesté cette idée en prônant une distinction entre "oeuvre gastronomique", protégeable, et la recette, simple "algorithme culinaire" (TGI Créteil, préc., note V. Piredda. – O. Laligant, Des oeuvres aux marches du droit d'auteur : les oeuvres de l'esprit perceptibles par l'odorat, le goût et le toucher : RRJ 1992, p. [...]

[...] A sept : JurisData n° 1999-024690) sauf qu'il peut tout aussi bien s'agir du droit sur la mise en forme littéraire des recettes, évoquée par le jugement précédent. Enfin, la Cour de cassation a censuré une décision qui conférait la qualité d'auteur de l'enregistrement audiovisuel le filmant dans l'exercice de son art (Cass. 1re civ févr : D n° 28, p note B. Edelman ; JurisData n° 2002-013157) ; il était, en effet, difficile d'en faire l'auteur de l'enregistrement Il était en revanche l'auteur de la recette qu'il exécutait, autrement dit de l'oeuvre qu'il réalisait devant la caméra. [...]

[...] En fait, un savoir-faire ne doit pas être protégé, comme tel, par le droit d'auteur mais il ne peut non plus interdire toute protection dès lors que sa mise en oeuvre “se concrétise par une forme originale” (L. Panhaleux, Droit d'auteur et données numérisées : Expertises janv p. 19). Toute la difficulté consiste alors à s'assurer que l'extension du champ d'application du droit d'auteur ne conduit pas à protéger un savoir-faire (V. ainsi, admettant la protection de données numérisées qui traduisent un "savoir-faire original", CA Paris, 4e ch janv : PIBD 1997, III, p confirmé Cass. [...]