Laïcité- Conseil constitutionnel- Conseil d'Etat- commission Stasi- Commission Machelon- loi du 9 décembre 1905- liberté de conscience- laïcité positive- Turquie- Islam
Objet d'un certain nombre de débats politiques et médiatiques depuis quelques années, la laïcité est
néanmoins une notion assez délicate à appréhender car elle est régulièrement confondue avec la conception
que l'on peut avoir de la liberté religieuse des individus.
En effet, bien que ces deux principes soient souvent abordés de concert, une confusion totale entre les deux
serait une approche partielle voire erronée de la question.
D'un point de vue étymologique, le terme de laïcité découle de la racine laos signifiant peuple et se démarque
de clericus qui lui désigne le clergé. Bien que cette première approche permette de distinguer la laïcité
comme ce qui n'est pas religieux, une définition plus poussée apparait nécessaire afin de saisir au mieux cette
notion.
Selon le lexique des termes juridiques Dalloz, la laïcité correspond à un principe d'organisation et de
fonctionnement des services de l'Etat et de toutes les autres personnes publiques selon lequel ceux ci sont
non confessionnels. Il s'agit donc d'une approche organique et fonctionnelle de l'Etat selon laquelle celui ci
doit être impartial en matière religieuse.
L'apparition de la notion de laïcité est assez récente au regard de l'évolution historique et juridique puisque
consacrée pour la première fois avec la loi Ferry du 28 mars 1882 disposant que l' enseignement public
primaire est laïc et l'éducation obligatoire. Cette loi adoptée dans un contexte de fort anticléricalisme en
France qu'on a pu appeler laïcité de combat fait sortir le religieux de l'enseignement à une époque où ce
dernier est considéré comme fondamental dans la formation de la conscience collective. La loi Goblet du 30
octobre 1886 viendra compléter à son tour ces nouvelles règles en précisant que l'enseignement public à
l'école primaire ne peut être assuré que par des personnels laïcs. Enfin, la loi du 9 décembre 1905 viendra
poser quelques années plus tard, les principes généraux du régime laïc français tel que nous le connaissons
aujourd'hui en proclamant la séparation de l'Eglise et de l'Etat avant que la laïcité ne soit consacrée au niveau
constitutionnel au sortir de la Seconde guerre mondiale.
Si le résultat de ce processus juridique vient mettre fin aux ingérences réciproques de l'Etat et de l'Eglise
dans leurs domaines respectifs, la laïcité ne s'aurait cependant s'entendre comme une négation de la liberté
religieuse des individus puisque celle ci est garantie au niveau constitutionnel à l'article 10 de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen et à l'article 1er de la Constitution de 1958, au niveau conventionnel avec
l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme et au niveau législatif avec l'article 1er de la loi
de 1905.
Au vu de ces différentes données, on peut donc en déduire que la laïcité distinguant le civil du religieux
permet, non seulement de se départir de l'influence de l'Eglise dans les affaires de l'Etat,mais également
d'assurer une effectivité de la liberté religieuse. Telle est du moins la conception française.
Cependant, si la laïcité est un moyen permettant une telle liberté, d'autres Etats à travers le monde assurent
tout autant celle ci sans qu'ils ne soient laïcs pour autant comme par exemple le Royaume-Uni. Enfin,
d'autres Etats se réclamant de la laïcité peuvent avoir, pour des raisons qui leurs sont propres, une approche
différente de la liberté religieuse par rapport à celle qu'on peut connaitre en France.
En considération de ces différents éléments, il convient donc de se demander si la notion de laïcité consacrée
par de nombreux Etats peut s'apprécier de façon homogène ou s'il en ressort des disparités propres à chacun
de ceux ci.
Afin de répondre au mieux à cette interrogation, il semble nécessaire d'aborder dans un premier temps la
conception française de la laïcité (I) avant de porter un regard général sur la laïcité à travers le monde (II).
[...] Pour la commission, la laicité doit reposer sur deux piliers majeurs: la neutralité de l'Etat et la liberté de conscience. La commission va faire un état des lieux de la laicité en France et va relever de nombreuses tensions entre ces deux éléments dans le cadre de différents services publics comme l'école, la prison, l'hôpital, voire même dans l'espace public. Elle appelle à des acommodements raisonnables entre ces deux notions afin de régir des situations sortant du champ de la loi de 1905: constructions de nouveaux lieux de culte interdiction des signes ostensibles d'appartenance religieuse dans le domaine scolaire plus grande prise en compte des différences religieuses dans la composition des menus scolaires cadre permettant au patient d'exercer sa foi durant un séjour à l'hôpital prendre en compte les exigences religieuses en matière funéraire création de nouveaux jours fériés en considération des nouvelles religions Cette commission a été critiquée par certains auteurs, qui reconnaissant néanmoins des avancées considérables, y ont vu un risque d'élargissement de la notion de laïcité au risque de lui enlever toute raison d'être. [...]
[...] L'émergence de l'islam en France a révélé certaines limites tendant à la conciliation entre la laïcité et la liberté religieuse. En effet, aucun lieu de culte propre à cette religion n'existait avant la loi de 1905 alors qu'il s'agit d'une condition qu'on peut considérer comme déterminante pour exercer cette liberté. Devant l'interdiction de financement par des personnes publiques de la construction des lieux de culte en application de la loi de 1905, la liberté de conscience peut se voir amoindrie alors même l'exercice des cultes est garantie par cette loi. [...]
[...] Ni la Charte des droits et libertés ni la Charte québécoise des droits et libertés de la personne n'en font mention. En revanche, la liberté de religion est clairement énoncée comme étant une priorité dans la sauvegarde des libertés individuelles, et ce d'autant plus si elle rentre en contradiction avec la laïcité. Les rapports entre l'Etat et la religion sont subordonnés à un cadre juridique ou les libertés fondamentales de conscience et de religion occupent une place prééminente précise Micheline Milot. [...]
[...] Il appartient donc à ceux ci de se décider en faveur ou non de ce principe qui est fondamental en France Les pays se réclamant de la laïcité Parmi les 27 Etats membres, on ne trouve que deux pays ayant reconnu la laïcité dans leur constitution: La France bien évidemment mais aussi le Portugal. Pour ce dernier cependant, il reste à préciser que si il admet dans l'article 41 de sa constitution que l'Etat est laïc, le concordat passé en 1940 avec le Saint Siège reconnaissant la religion catholique comme religion d'Etat est toujours en vigueur. Nous sommes donc en présence d'une laïcité théorique. [...]
[...] Sans sombrer dans un relativisme stérile qui ferait obstacle à toute étude en raison de leur égalité et légitimités propres , il convient, sans forcement renier un universalisme nécessaire, de repenser la laïcité et non de la sacraliser au risque de la pervertir, d'en faire un instrument de pacification et de tolérance et non une arme au service de funestes desseins. Là sera sans doute l'enjeu de ce XXI ème siècle qui, comme le disait André Malraux " sera religieux ou ne sera pas". [...]
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