Après la publication d'un cliché en couverture de l'hebdomadaire « La vie des vieux », M.Walterproof, détenu de 90 ans malade photographié dans sa cellule à semi-nu, décide d'intenter une action en réparation devant le tribunal de grande instance. Tout l'enjeu de ce litige se situe alors dans la caractérisation ou non des différentes atteintes prétendues par le requérant. Il s'agit en effet de celle du droit au respect à l'intimité de la vie privée et du droit à l'image dans leur rapport avec le principe de dignité de la personne humaine.
L'article 9 du Code civil relatif au droit au respect de la vie privée est un droit négatif qui consiste en une obligation de ne pas s'immiscer dans la vie d'autrui. Sur ce fondement, la 1re chambre civile du 6 mars 1996 a affirmé qu'est « illicite toute immixtion arbitraire dans la vie privée d'autrui ».
Si l'on admet qu'une photographie est la captation d'un moment de la vie, la photographie d'un détenu en train de se dénuder constitue de toute évidence une atteinte au droit au respect de l'intimité de sa vie privée.
[...] Walterproof n'a aucunement été atteinte du fait que la photographie est l'illustration objective du phénomène de société qu'est la vie des personnes âgées. La photographie n'est absolument pas empreinte de volonté humiliante ou dégradante à l'égard de l'intéressé puisque celle-ci ne représente rien de plus qu'un homme de 90 ans vêtu d'une tenue descente. C'est pourquoi il ne peut être retenu l'argument de l'atteinte à la dignité de M. Walterproof ni aucun autre argument à l'encontre de la société de presse. Bibliographie indicative Le droit de la personne sur son image J. Stoufflet - 1957 Droit des libertés fondamentales L. [...]
[...] Walterproof est directement atteint dans son droit à l'image sans que ne puisse interférer la publicité du lieu de la photographie. Sur ce point, il faut se référer à l'arrêt de la 1ere chambre civile du 12 décembre 2000 qui affirme clairement qu'importe peu que la personne se trouve dans un lieu public, dès lors qu'elle apparaît isolément grâce au cadrage réalisé par la photographie. C'est pourquoi, je demande à ce que soit sanctionnée cette atteinte à son image. Si quelques fois, dans la recherche d'un équilibre entre des droits opposés de même valeur, le droit à l'image s'incline face au droit à l'information (ou à l'expression) protégé notamment par l'article 10 de la CEDH (1ere chambre civile 9 juillet 2003), il n'est pas envisageable dans le cas présent, où l'atteinte à la dignité de la personne humaine de M. [...]
[...] Ainsi, la société de presse, qui a utilisé l'image litigieuse, n'a pas porté atteinte au droit au respect de l'intimité de la vie privée ni au droit à l'image de M. Walterproof, car celui-ci a donné son accord tacite à la reproduction de son image. En effet, si l'on se réfère à la jurisprudence constante en la matière, celle-ci affirme que le consentement est présumé lorsque la fixation de l'image a été accomplie au vu et au su de l'intéressé sans qu'il s'y oppose. [...]
[...] En effet, le droit d'expression prime sur le droit à l'intimité de la vie privée et le droit à l'image s'il existe un intérêt légitime du public à être informé. Dans le cas présent, il est tout à fait possible de caractériser l'intérêt légitime du public par la nécessité d'illustrer un phénomène de société par une image révélatrice (2e chambre civile du 4 novembre 2004). C'est pourquoi l'éventuelle atteinte au droit au respect à l'intimité de la vie privée et à l'image ne peut valablement être retenue sur ce fondement. [...]
[...] Walterproof a été virulemment attaquée, de faire primer le droit à l'information. En effet, les affaires bien connues de l'attentat de 1995 du RER Saint-Michel et du préfet Erignac (1ere chambre civile en 2000) l'ont bien montré, l'événement d'actualité peut justifier une atteinte au droit à l'image, toutefois sans jamais pouvoir outrepasser le principe de dignité de la personne humaine. Il est inutile alors de s'interroger sur la portée de l'information qu'a voulu transmettre l'hebdomadaire afin de justifier ou non l'atteinte au droit à l'image et ainsi de privilégier l'intérêt le plus légitime, car de toute évidence, l'image de M. [...]
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