Libertés publiques, Droit fondamentaux, Liberté d'enseignement, Liberté de culte, rejet, obligation d'assiduité, Conseil d'État
Dans cette affaire, à mettre en parallèle avec l'arrêt Consistoire Central des Israélites de France rendu le même jour par l'Assemblée du Contentieux du Conseil d'État, il est question de la conciliation de l'obligation d'assiduité avec l'exercice de la liberté religieuse et plus particulièrement avec le jour du repos (Sabbat) dans la religion juive. Le Conseil d'État est ainsi amener à appliquer et à préciser le principe dégagé dans l'arrêt Consistoire Central des Israélites de France selon lequel les élèves ont droit à bénéficier individuellement d'autorisations d'absence pour des motifs religieux. Il en ressortira que l'appréciation des chefs d'établissements devra se faire au cas par cas selon les implications sur une « scolarité normale » de l'autorisation.
- Dans le litige en cause Mr Koen, étudiant de confession juive souhaite s'inscrire en classe préparatoire de mathématiques supérieure et le proviseur de l'établissement le lui refuse aux motifs que son dossier était incomplet faute pour l'étudiant d'avoir accepté le règlement le soumettant à l'obligation d'assiduité et qu'il lui était impossible de voir ses horaires aménagés pour les cours du samedi matin. M.Koen se pourvoit donc devant le Conseil d'État pour demander l'annulation de cette décision sur le double fondement qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose l'acceptation du règlement intérieur par l'élève et que cette décision viole les textes garantissant les libertés de conscience et de culte.
- Le Conseil d'État, après avoir considéré que l'appréciation du bulletin scolaire de Mr Koen n'était pas détachable de l'acte dont il demandait l'annulation, rejette la demande de Mr Koen en répondant successivement aux 2 motifs soulevés. Il va tout d'abord rappelé que le règlement intérieur pouvait subordonner l'intégration de l'élève dans la classe préparatoire à son acceptation indépendamment de l'existence de textes particuliers le prévoyant. Concernant plus particulièrement la conciliation de l'obligation d'assiduité et de l'exercice de la liberté religieuse et de la liberté de culte, le Conseil d'État va procéder en 2 temps. Il va tout d'abord rappeler l'existence d'un droit à bénéficier d'autorisations d'absence, à titre individuel, nécessaires à l'exercice d'un culte ou d'une religion indépendamment des exigences règlementaires tenant à l'obligation d'assiduité. Avant de rappeler que ces autorisations doivent être compatibles avec l'accomplissement des tâches inhérentes avec les études et le respect de l'ordre public, cette compatibilité s'appréciant au cas par cas en fonction des circonstances.
Il s'est donc demandé si des autorisations d'absence pouvaient être accordées à des élèves pour des raisons religieuses malgré l'existence de dispositions imposant l'obligation d'assiduité avant de s'interroger sur les conditions rendant compatibles ces autorisations avec les dispositions règlementaires en vigueur concernant les obligations des élèves.
[...] La réaffirmation de la légalité des autorisations d'absence nécessaires à l'exercice de la liberté religieuse. Confronté aux moyens selon lesquels rien, juridiquement, ne l'obligeait à accepter le règlement intérieur et donc à se soumettre aux exigences , le Conseil d'État a du, par une analyse fine de la législation et de la règlementation applicable, préciser que la soumission aux dispositions du règlement intérieur était obligatoire si celui la prévoyait, il a également rappeler le champ des dispositions applicables pour les différentes libertés en jeu que toutefois les obligations découlant de ces dispositions n'ont pas pour objet ni pour effet d'interdire des dérogations à ces dispositions en cas de nécessité liée à l'exercice d'un culte ou de la célébration d'une fête religieuse La nécessaire soumission au règlement intérieur et le rappel des dispositions encadrant les libertés publiques en cause. [...]
[...] * Le Conseil d'État se livre ici à une conciliation importante qui permet de clarifier un avis qu'il a émis le 27 novembre 1989 et selon lequel le droit de manifester et d'exprimer sa liberté religieuse ne doit pas porter atteinte à l'obligation d'assiduité. Cet avis entraînait un certain flou juridique, en effet de nombreuses circulaires et notes de services permettaient de déroger à cette obligation d'assiduité pour les fêtes religieuses juives et musulmanes notamment. Mais ici c'est la question du Sabbat qui se posait, pour lesquelles les données sont différentes, en effet il ne s'agit plus d'une dérogation extraordinaire et ponctuelle mais d'une dérogation systématique à l'obligation d'assiduité le samedi. [...]
[...] Commentaire de l'arrêt Koen du 14 avril 1995 * Dans cette affaire, à mettre en parallèle avec l'arrêt Consistoire Central des Israélites de France rendu le même jour par l'Assemblée du Contentieux du Conseil d'État, il est question de la conciliation de l'obligation d'assiduité avec l'exercice de la liberté religieuse et plus particulièrement avec le jour du repos (Sabbat) dans la religion juive. Le Conseil d'État est ainsi amener à appliquer et à préciser le principe dégagé dans l'arrêt Consistoire Central des Israélites de France selon lequel les élèves ont droit à bénéficier individuellement d'autorisations d'absence pour des motifs religieux. [...]
[...] Cette réaction a été conditionnée par les principes que le Conseil d'État avait dégagé dans l'arrêt Koen et Consistoire Central des Israélites de France pour que cette autorisation d'absence soit justifiée. Après avoir rappelé cette possibilité individuelle d'obtenir des autorisations d'absences pour exercer un culte, le Conseil d'État avait à préciser et à appliquer pour la première fois les conditions requises pour que ces autorisations soient délivrées. Ce faisant il fournit ainsi des clefs de lecture pour les chefs d'établissements confrontés à ces demandes et qui avaient tendance à opposer des refus systématiques ou des acceptations libérales sans réelles justifications. [...]
[...] On voit ici une tendance lourde au sein de la jurisprudence qui veut qu'une atteinte à une liberté fondamentale soit interdite de manière générale et absolue, il revient donc aux chefs d'établissements de se prononcer au cas par cas, mais sous réserve d'un examen attentif et motivé par des éléments objectifs visant à démontrer la compatibilité ou non de l'autorisation avec une scolarité normale. [...]
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