Ni la Révolution ni le Code civil n'ont eu pour objectif de modifier en profondeur le droit des régimes matrimoniaux. La grande préoccupation des révolutionnaires puis des auteurs du Code était d'unifier le droit, et donc de parvenir à un accord pour trouver un régime légal applicable à l'ensemble de la France (I). Les solutions retenues n'ont en la matière rien de révolutionnaires puisque, notamment, l'incapacité juridique de la femme mariée est légalement consacrée (II).
[...] Les révolutionnaires qui bouleversent le droit du mariage ne parviennent pas à réformer les régimes matrimoniaux. A travers les projets de Code civil, deux tendances se dégagent néanmoins qui préfigurent la législation de 1804. D'abord les projets de Cambacérès sont tous favorables à l'idée d'une unification du droit par l'adoption d'un régime légal, et dans les trois projets le choix se porte sur le régime de la communauté des meubles et acquêts. Les projets de Code civil se montrent dans l'ensemble hostiles au régime dotal. Ensuite les projets de Cambacérès sont favorables au maintien des conventions matrimoniales qui permettent aux époux d'écarter le régime légal par contrat, conformément à la tradition de l'ancien droit. Ces deux idées vont directement être appliquées par le Code civil.
A défaut de convention matrimoniale, les époux sont réputés choisir le régime de la communauté des meubles et acquêts (qui est le « droit commun de la France » dit l'article 1393).
L'organisation de cette communauté par le Code s'inspire du droit coutumier d'Ancien Régime, et plus précisément de la coutume de Paris que les juristes tentaient d'imposer comme le droit commun coutumier. Les définitions des propres, meubles et acquêts sont ainsi restées inchangées. La femme étant toujours réputée incapable, le mari demeure le chef et le gestionnaire de la communauté. C'est lui seul qui administre les biens communs et les propres (art. 1421 al. 1) ; c'est lui seul qui aliène librement les meubles et les acquêts (art. 1421 al. 2) (...)
[...] Le second projet, présenté en 1794, reprend les mêmes idées : il faut toujours supprimer la ridicule puissance maritale Au moment où le troisième projet est présenté (1796), les mentalités ont radicalement évolué : le Directoire veut réagir contre les désordres d'une trop grande liberté. C'est ce qu'a bien compris Cambacérès qui, faisant volte face, propose dans son troisième projet que soit restaurée la puissance maritale aux détriments de la femme. C'est la solution que retient sans difficulté le Code civil de 1804 : les rapports personnels inégalitaires impliquent l'incapacité juridique de la femme mariée. [...]
[...] HISTOIRE DU DROIT PRIVÉ Histoire du droit de la famille Les rapports patrimoniaux de la Révolution au Code civil Introduction. Ni la Révolution ni le Code civil n'ont eu pour objectif de modifier en profondeur le droit des régimes matrimoniaux. La grande préoccupation des révolutionnaires puis des auteurs du Code était d'unifier le droit, et donc de parvenir à un accord pour trouver un régime légal applicable à l'ensemble de la France Les solutions retenues n'ont en la matière rien de révolutionnaires puisque, notamment, l'incapacité juridique de la femme mariée est légalement consacrée (II). [...]
[...] La consécration des conventions matrimoniales Le Code civil consacre, sous la pression des coutumes et pratiques, la liberté des conventions matrimoniales. Les époux peuvent donc modifier par contrat le régime légal ou décider de choisir un régime différent. Outre les modifications du régime légal (par ex. la communauté réduite aux acquêts), le Code permet d'opter par convention en faveur des régimes séparatistes, ce qui est évidemment une concession faite aux usages des anciens pays de droit écrit. C'est ainsi que le Code civil consacre l'existence du régime dotal sans grande modification par rapport aux règles d'ancien droit. [...]
[...] La dot constituée par la famille de la femme ou la femme est administrée par le mari qui n'en est pas propriétaire (art. 1551-1552). La dot est toujours inaliénable lorsqu'il s'agit d'immeubles (art. 1554) et l'hypothèque légale de la femme consacrée en cas de dot mobilière (art. 1572). Le Code a ainsi permis une transition en douceur : le régime dotal a été largement pratiqué dans le sud de la France tout au long du XIXe siècle avant de tomber peu à peu en désuétude au XXe siècle (il est supprimé par la loi du 13 juillet 1965). [...]
[...] Le Code assouplit néanmoins l'ancien formalisme lié à l'autorisation maritale en exigeant seulement que cette autorisation soit spéciale mais non expresse ; en outre, à défaut d'autorisation, l'acte n'est pas nul en lui-même : il est seulement inopposable au mari. Là où le Code civil se montre extrêmement défavorable à la femme mariée, c'est qu'il fait disparaître les gains de survie auxquels elle avait droit sous l'Ancien Régime. Le douaire n'existe plus dans le Code civil, non plus que la pratique de l'augment de dot. [...]
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