Ce texte de Leibniz a une ouverture exceptionnelle : « On convient que tout ce que Dieu veut est bon et juste. Mais on demande s'il est bon et juste par ce que Dieu le veut ou si Dieu le veut par ce qu'il est bon et juste ». « Si la justice ou la bonté est arbitraire, ou si elle consiste dans les vérités nécessaires et éternelles de la nature des choses, comme les nombres et les proportions ». Là on a une ouverture large, de plusieurs dimensions, lorsqu'il parle de Dieu, on voit tout de suite qu'il réfléchit dans un univers théiste, quelqu'un qui se réclame de l'existence de Dieu, et on voit aussi que sa notion de justice est placée dans le cadre d'une théologie dont on ne sait pas ce que c'est (chrétien, juif ou autre ?) On voit qu'il pense plutôt à un univers théiste chrétien.
[...] Le droit est une construction mentale générale, elle se concrétise, elle se coule dans une forme normative que l'on appellerait une loi. Le droit est toujours juste, il se trouve dans cette chaine. La raison, la justice, le droit, alors que la loi est parfois une transposition imparfaite du droit. La loi peut être parfois injuste. Leibniz le théorise, lorsqu'une loi est injuste, faut-il la suivre ? Là il fait preuve d'un point de vue rigorisme. Le droit est toujours conforme à la raison, la loi ne l'est pas toujours, le législateur peut parfois se tromper lorsqu'il rédige sa loi. [...]
[...] On trouve cette même formule chez d'autres philosophes : ne fait rien à autrui si tu ne veux pas que l'on te le fasse Il illustre cela avec des exemples. Le concept qu'il développe lui, c'est le concept de se plaindre justement. La notion de plainte, l'autre peut se plaindre, mais pas n'importe comment ; il peut se plaindre sous l'angle de la justice. Pour matérialiser cette notion de justice, on procède à ce jeu de rôle pour lequel l'autre doit se mettre dans un rôle. [...]
[...] C'est un vieux problème que l'on voit ici chez Leibniz et que l'on verra chez Wolff. C'est ici que la notion de puissance intervient chez Leibniz, la puissance était en quelque sorte un auxiliaire de la bonté. C'est la puissance qui permet de faire exister ce qui existe réellement. On pourrait dire que chez Leibnitz, la justice n'est pas une idée abstraite, mais c'est une idée qui tend vers la réalisation, vers la mise en œuvre, à travers les notions de sagesse, de bonté et de puissance. [...]
[...] Le problème n'est pas seulement que personne ne puisse se plaindre de nous. Dans une justice où je devrais quelque chose à l'autre, il développe ce point de vue en disant que je dois en principe répondre à la demande de l'autre. Je dois satisfaire sa loi. Il invente alors une formule pour compléter la première formule : il introduit une sorte de jeu de rôle en disant que je dois me conformer à la demande de l'autre à conditions que l'autre se conforme à ma situation s'il était dans ma situation. [...]
[...] Chez Leibniz, Dieu n'est pas un dieu aimant, comme dans le nouveau testament, c'est un Dieu parfaitement rationnel, c'est un dieu parfait. Pour Dieu, choisir l'injustice est impossible en raison de sa perfection. En raison de sa perfection il ne pourrait pas choisir quelque chose d'injuste. Donc Dieu dans tous les cas est juste. Ensuite digression théologique intéressante. La question est de savoir quel est le rapport entre la théologie et la justice. La théologie a-t-elle un lien ou ne serait-ce pas un rapport de soumission ? [...]
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