Le document présenté est un extrait des Mémoires d'Alexis de Tocqueville intitulés « Souvenirs », qu'il écrit entre 1850 et 1851 et qui fut publié de manière posthume en 1893. Il y témoigne de la révolution de février 1848 et de l'évolution de la IIe République, période dont il est le témoin privilégié puisqu'il mène une carrière politique. Il est très actif politiquement, surtout dans la Manche, département dont il est député. Il a siégé à ce titre à la chambre des députés de la Monarchie de juillet. Aristocrate français issu d'une famille aux idées légitimistes, il est souvent qualifié de « libéral conservateur ». Ce terme a priori contradictoire signifie qu'il défend les libertés (économiques comme le libre échange ou politique comme le bicaméralisme), mais qu'il est conservateur en matière de mœurs, il a toujours rejeté la révolution et ce qu'il appelle dans ses Mémoires le « désordre ». Il est également connu à cette époque pour ces travaux d'historien et de penseur politique notamment avec la publication en 1835 de « La démocratie en Amérique » (ces talents lui ont valu de devenir membre de l'Académie française). L'extrait que nous allons étudier s'arrête sur la journée du 23 avril 1848, soit exactement deux mois après les soulèvements populaires qui mirent fin au règne de Louis Philippe et de sa Monarchie de juillet. La IIe République et son gouvernement provisoire, constitué de républicains modérés et de républicains socialistes-démocrates, veulent se doter d'une Constitution.
[...] Arrivés au haut de la colline qui domine Tocqueville, on s'arrêta un moment. Je sus qu'on désirait que je parlasse. Je grimpai donc sur le revers d'un fossé, on fit cercle autour de moi et je dis quelques mots que la circonstance m'inspira. Je rappelai à ces braves gens la gravité et l'importance de l'acte qu'ils allaient faire ; je leur recommandai de ne point se laisser accoster ni détourner par les gens, qui, à notre arrivée au bourg, pourraient chercher à les tromper ; mais de marcher sans se désunir et de rester ensemble, chacun à son rang, jusqu'à ce qu'on eût voté. [...]
[...] De quelle manière le vote du 23 avril 1848 se fait-il le révélateur du rapport entre les Français et la nouvelle République ? Il conviendra tout d'abord de s'arrêter sur les débuts de la II République marquée par l'enthousiasme général puis dans un second temps, de relativiser en décrivant les profondes divisions qui marquent la société française de cette époque. Enfin, nous reviendrons sur le vote de la Constituante et du rejet de l'esprit révolutionnaire dont il témoigne. Après la chute de Louis Philipe et la constitution d'un gouvernement provisoire, une atmosphère d'unité fraternelle et d'euphorie règne sur la capitale. [...]
[...] Nous ne laissions derrière nous que les enfants et les femmes : la participation totale est de ce qui va rendre le résultat légitime. Ce sont finalement les républicains modérés (500 sièges) et les royalistes (notables orléanistes et légitimistes qui obtiennent près de 300 places) qui sortent gagnants. Les socialistes démocrates, qui ont été très divisés durant l'élection, sont les grands perdants avec moins de 100 sièges récoltés. Malgré les efforts des clubs révolutionnaires afin de joindre les masses populaires à leur cause, le résultat du scrutin marque clairement la défaite des promoteurs de la république sociale. [...]
[...] L'« autre France rurale et conservatrice III) Le vote du 23 avril 1848, reflet du rejet de l'esprit révolutionnaire 1. Mise en place et déroulement du vote 2. [...]
[...] La peur sociale et le sentiment conservateur de la plupart des Français se sont exprimés par le vote du 23 avril 1848 décrit par Tocqueville. Ce vote marque une victoire de la frange modérée du gouvernement provisoire et un retour des royalistes ainsi que des représentants de la province au pouvoir. Tocqueville, plus proche idéologiquement des républicains modérés que des mouvements ouvriers, sera lui aussi élu à la Constituante. À cette défaite des révolutionnaires parisiens par les urnes, va s'ajouter une défaite par les armes qui va définitivement écraser ce mouvement. [...]
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