Le texte dont il est question ici est extrait du livre Pantagruel (livre II, chapitre X), écrit en 1532 par l'humaniste François Rabelais (français né en 1494 et mort en 1533). Ce texte littéraire traite, entre autres, de l'humanisme juridique. Bien qu'elles soient en quelque sorte considérées comme l'embryon du droit national français, les coutumes territoriales, qui avaient permis de rompre avec le principe de personnalité des lois mis en place durant le Haut Moyen Age (le droit qui s'appliquait était alors différent selon l'origine de la personne), vont être concurrencées dès le XIIe siècle par le « droit commun » (le ius commune), qui est effectif alors dans toute l'Europe chrétienne.
Et ce qui a permis l'apparition de ce droit commun, c'est avant tout la redécouverte en Occident du droit romain. Tant sur le plan de la doctrine que de l'éducation, on va assister à une véritable révolution. On va à ce titre diffuser l'enseignement du droit romain, mais surtout poser de nouvelles méthodes afin d'accéder à la compréhension de ce droit.
C'est de ces moyens de compréhension du droit romain qu'il est question dans ce texte, et aussi de leur remise en cause. François Rabelais développe ici son avis sur les méthodes de compréhension et d'utilisation du droit romain, au XVIe siècle. Mais alors, quelle vision donne-t-il de l'utilisation du droit romain qui a été faite par ses prédécesseurs, mais aussi par ses propres contemporains ?
[...] Tous deux appartiennent au mouvement des postglossateurs (qui dure au XIVe et au XVe siècle), et voulaient réinscrire les lois romaines dans l'ordre actuel, en dégageant de l'étude des textes romains des principes généraux susceptibles de s'appliquer dans la vie juridique concrète. Cependant pour Rabelais, tous ces hommes jamais ne comprirent la moindre loi des Pandectes cette loi des Pandectes étant l'autre nom du Digeste (une compilation monumentale lancée par Justinien en 530, reprenant plus de cinq siècles de littératures juridiques et de jurisprudence). [...]
[...] Ainsi, après avoir présenté le droit commun de son époque, Rabelais insiste sur le fait que ce droit est corrompu, obscure et peu intelligible du fait des travaux qu'ont effectués les glossateurs. Sa critique ne s'arrête cependant pas là. I. à la remise en cause de droit commun par les principes de l'humanisme juridique Après avoir critiqué la surabondance des textes juridiques et leur manque de clarté, Rabelais va ensuite remettre en cause les connaissances des langues anciennes par les glossateurs et les postglossateurs mais aussi leur méconnaissance des principes humanistes Une méconnaissance du langage, entraînant une méconnaissance de l'intelligence des lois Rabelais dénonce ici tous ces hommes qui se sont exprimés sur le droit romain alors qu'ils ne connaissent ni le grec ni le latin, mais seulement le gothique et le barbare Cette phrase contient un double sens de lecture. [...]
[...] Ce texte littéraire traite, entre autres, de l'humanisme juridique. Alors que durant la période dite du bas Moyen-Age à partir environ de l'an mille, la période féodale (l'éclatement du territoire et du pouvoir en une multitude de seigneuries) avait conduit le droit à revêtir une conception dite territoriale où le droit était d'origine coutumière, et surtout, propre à chacune des seigneuries ; la redécouverte en Italie au XIIe siècle du Code Justinien va constituer une véritable révolution juridique : les coutumes territoriales, disparates selon les seigneuries, et d'origine spontanées vont peu à peu s'unifier (avec notamment au XIIIe siècle une tentative de mise par écrit des coutumes par des juristes et des praticiens, tant au Nord qu'au sud du territoire). [...]
[...] L'ignorance des connaissances humanistes par les glossateurs François Rabelais est fondamentalement un humaniste, qui défendait l'idée d'une morale conforme aux exigences de la vie, mais surtout de la nature. Il semble donc tout à fait naturel qu'il énonce, dans Pantagruel, que les lois tiennent leurs racines du fond de la philosophie morale et naturelle : le droit doit être conforme à ce que l'on appelle encore aujourd'hui le droit naturel qui est par essence un droit bon et supérieur. Ici, Rabelais consacre l'origine de toutes lois comme venant de ce droit naturel du fond de la philosophie morale et naturelle Et alors, il reproche aux glossateurs et plus généralement aux universités (de manière implicite pour ces dernières) de ne plus enseigner cette philosophie naturelle, qui pourtant apparaît comme indispensable à l'étude et à la compréhension du droit romain : comment feront-ils pour les comprendre [les lois], ces fous qui ( ) ont moins étudié la philosophie que ma mule ? [...]
[...] Si, d'une part, François Rabelais évoque la création, et ses conséquences, du droit romain ; il remet d'autre part en cause le droit commun tel qu'il est utilisé à son époque (II). 1 à 3 : Du droit effectif dès le XIVe siècle, le droit commun Le droit commun désigne à partir de la fin du XIIIe siècle le droit romain et sa glose. Il constitue alors une véritable science du droit ce qui ne va pas empêcher Rabelais de critiquer le travail des glossateurs Le droit commun, véritable source du droit Dans cet extrait de Pantagruel, ici donné à commenter, il est initialement question d'une affaire à juger, où l'on va faire intervenir Maître Pantagruel dont on reconnaît et consacre l'étendue de ses connaissances dont on a reconnu que la science surpassait ( ) ce dont l'époque actuelle est capable : cet homme doit être un savant dont la science est en avance sur son temps, sa science juridique tout du moins (cette science juridique doit ici désigner la connaissance du droit romain). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture