Dans tout conflit, aucune solution n'est possible si chacun des adversaires est incapable de prendre sérieusement en considération le point de vue de l'autre », explique le psychologue Bruno Bettelheim.
Cette affirmation sera mise en lumière dans ce document, plus particulièrement cette lettre argumentative de nature juridique, où l'auteur expose son point de vue dans le but d'expliquer, de nous convaincre d'une chose, d'un fait particulier.
Lorsque nous parlons de l'auteur, nous faisons référence à Fulbert de Chartres. En effet, bien que cette lettre soit énoncée comme celle d'Eudes de Blois, l'on estime que son véritable auteur soit Fulbert de Chartres étant donné qu'elle figurait dans ses propres archives.
Fulbert de Chartres (960-1028), saint de l'Église catholique romaine et évêque de Chartres était un homme particulièrement doué, maniant l'art des lettres. Il fut en effet conseiller de rois et de princes (notamment d'Hugues Capet et de Robert II), enseignant dans les écoles de la ville. Mais il fut surtout un spécialiste en matière de relations féodales ; c'est d'ailleurs à lui que le duc d'Aquitaine s'adressa lorsqu'il rencontra des difficultés avec ses vassaux (ce qui donna lieu à la célèbre lettre de Fulbert de Chartres datant de 1020). Homme d'église, par conséquent homme de paix prônant le respect d'autrui, il cherche particulièrement à régler les conflits.
[...] Eudes de Blois (toujours à travers Fulbert) se défend. Il va même jusqu'à s'interroger lui-même comment, en effet, pourrai-je renoncer à défendre mon honneur ? pour ensuite y répondre directement je préfèrerais mourir honoré que de vivre sans honneur Ainsi, il démontre encore plus sa volonté de vouloir se disculper, il est convainquant en tout point dans la mesure où il justifie parfaitement tous ses actes. Notons d'ailleurs que cette lettre est divisible en trois phases : la première expose les faits, la seconde l'argumentation (la plaidoirie) et la dernière est consacrée à une sorte de serment, voulant assurer la paix entre les parties (ceci nous rappelle par ailleurs la structure d'une fiche d'arrêt divisible en plusieurs parties). [...]
[...] Des touches religieuses. Fulbert étant un homme d'Église (il est évêque), il est d'autant plus légitime que ce discours soit particulièrement écrit d'une manière respectueuse et pacifique. Rappelons d'ailleurs que l'évêque de Chartres prône la paix et le respect dans la société, surtout dans les relations entre seigneurs et vassaux. Ainsi nous pouvons voir que Dieu est souvent cité : il est celui que nul ne peut contester, il est donc impossible de renier un comportement qui s'explique par Dieu. [...]
[...] Pour résumer notre propos, nous pouvons dire que cette lettre de Fulbert de Chartres expose un conflit entre Eudes de Blois et le roi Robert. Ce discours particulièrement argumentatif est une preuve de bonne volonté : on recherche la paix en respectant le destinataire. Cette lettre est si bien écrite que l'on en oublie la nature du conflit (l'accaparation par Eudes de Blois de tous les pouvoirs de comtés qu'il a reçus). C'est pourquoi par la suite nous pouvons nous demander si Eudes de Blois et le roi Robert se sont réconciliés. [...]
[...] Au travers de cette lettre, non seulement Eudes de Blois cherche à se justifier de son comportement, mais il cherche également à mettre fin au conflit entre lui et le roi Robert. En effet, Fulbert en atteste Dieu et [son] âme comme si son comportement allait au-delà de sa raison, Dieu étant ce qu'il y a de plus puissant et son âme, spirituelle, ce qu'il y a de plus profond en lui. Il explique qu'il n'est rien au monde qu'il désirerait plus que d'avoir et de mériter faveur Cette phrase démontre bien son envie d'apaiser ce conflit, en effet, nous avons une impression d'amplification : la seule et unique chose qu'il souhaite est de mériter faveur et rien d'autre au monde Il continue également en partant de ses sentiments qu'il éprouve sur cette querelle qui les divise en même temps qu'elle [lui est] pénible : il se sent mal de ce conflit et veut y mettre un terme au plus vite. [...]
[...] C'est pourquoi l'archevêque de Reims Elbes de Roucy fait part au roi Robert des agissements d'Eudes. La nature de ce conflit s'expose donc dans ce contexte et c'est Fulbert de Chartres, soucieux des rapports de paix et de respect entre les hommes, qui cherchera à réconcilier Eudes de Blois avec le roi Robert. Ainsi dans sa lettre, Fulbert nous montrera l'intérêt de développer les rapports entre le seigneur et son vassal tout en développant ses justifications sur la nature du conflit. [...]
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