Il y existe parfois un hiatus entre les exigences de politique criminelle, qui cherche à réprimer la dangerosité de l'individu indépendamment de ses actes, et le droit pénal spécial dominé par le principe de la légalité, principe à valeur constitutionnelle avec lequel les accommodements ne peuvent qu'être limités.
Le recel fait partie de ces activités que la politique criminelle cherche à réprimer : « Il n'y aurait pas de voleurs sans receleurs » serait un sommaire résumé de cette volonté de répression de l'économie parallèle. Or le recel n'existait pas dans le Code pénal napoléonien de 1810 : il était réprimé au titre de la complicité.
L'aspiration à une règle de droit spécifique a donc été liée aux exigences de politique criminelle, et se traduira par l'incrimination spécifique de recel par la loi du 22 mai 1915. Le recel est marqué par ce fondement. On constate ainsi d'emblée que pour permettre une répression large des comportements en cause, il n'existe pas un recel mais des recels : simples, aggravés, par assimilation qui mettent en scène des situations extrêmement variées, du recel de cadavre à la vie commune avec une prostituée ; ainsi que des infractions voisines du recel. Le recel voit de plus son élément matériel procéder dans la jurisprudence d'une constante volonté d'élargissement… jusqu'aux limites imposées par le principe de légalité.
Le recel est défini à l'article 321-1 du Code pénal comme « le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit. Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit ».
[...] L'élément moral L'élément moral consiste en une mauvaise foi de la part du receleur. Cette mauvaise foi consiste en une double connaissance : la connaissance de l'acte matériel de recel et la connaissance de l'infraction d'origine. La connaissance de l'acte matériel de recel Le receleur doit donc connaître tout d'abord l'acte matériel de recel : pas de recel si on détient une chose sans le savoir (chose placée à l'insu dans la voiture) La connaissance de l'infraction d'origine Le receleur de plus doit savoir ou aurait dû connaître l'origine frauduleuse de la chose. [...]
[...] L'idée est que le recel se perpétue à travers les transformations subies par les choses reçues. Seront ainsi considérées comme choses recelées : - le produit de l'infraction d'origine - mais également le butin de la vente de cette chose - la chose achetée avec ce butin - et enfin le butin recelé de la chose recelée vendue La doctrine est très critique à l'égard de cet effet boule de neige qui finit par encourir nuire au principe de la légalité. [...]
[...] Le moment d'appréciation de la bonne ou mauvaise foi du prévenu On apprécie la bonne ou mauvaise foi du prévenu au moment où il détient la chose ou quand il en tire profit. Un revirement est intervenu en la matière : il n'y a plus recel pour la Cour de cassation lorsque c'est postérieurement à la détention que l'origine frauduleuse de la chose est connue, notamment, s'agissant des biens meubles, lorsque les conditions de l'article 2279 C.civ. sont réunies (possession de bonne foi) (24 nov. 1977). Pendant longtemps, la Cour de cassation a jugé qu'il y avait recel à conserver une chose dont on apprenait au cours de la détention l'origine frauduleuse. [...]
[...] Les éléments matériels et moraux du recel 1. L'élément matériel L'élément matériel de l'infraction de recel traduit également l'évolution des textes et de la jurisprudence dans un sens extensif. L'article 321-1 du Code pénal distingue 2 catégories d'éléments matériels : le recel par dissimulation, détention ou transmission de la chose et le recel par profit retiré de l'infraction originaire. Le recel par dissimulation, détention ou transmission de la chose L'élément matériel du recel consiste pour la 1re catégorie en 3 agissements : dissimuler la chose : la dissimulation consiste à conserver la chose hors de vue, en la cachant ou encore en taisant à son sujet. [...]
[...] Les particularités de la poursuite et la répression du recel Les particularités procédurales et la répression du recel s'expliquent par la double nature du recel : à la fois distinct du délit originaire et connexe à ce délit. A. Les particularités de la poursuite 1. La prescription de l'action publique et le possible cumul des poursuites La prescription est indépendante de celle qui s'applique à l'infraction originaire (Crim janvier 1964). Le recel étant en général une infraction continue (puisqu'elle suppose la détention), le point de départ du délai de prescription est fixé au jour de la cessation de la détention, alors même qu'à cette date l'infraction originaire est prescrite. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture