Ampleur, responsabilité pénale, décideurs publics
La notion de « décideur public» ne constitue pas une catégorie juridique mais on considère généralement qu'elle recouvre à la fois les élus et les agents publics de l'Etat ou des collectivités territoriales, qui sont les dépositaires de l'autorité publique. Ils constituent donc une catégorie vaste et assez hétérogène mais ils ont en commun leur capacité à exercer un pouvoir et à prendre des décisions qui ont des effets collectifs et sont susceptibles d'engager leur responsabilité à grande échelle. Cette responsabilité peut avoir une fonction de réparation, comme c'est le cas pour la responsabilité administrative, ou elle peut avoir une fonction punitive, comme dans le cas des responsabilités disciplinaire, politique et pénale.
Or ces dernières années, on constate que cette dernière forme de responsabilité, la responsabilité pénale, a pris une importance considérable dans la vie publique et qu'au cours des années 90, les poursuites pénales se sont systématisées. Face à cette tendance, de nombreux élus ont fait part de leur inquiétude, en soulignant que la prise d'importance du risque pénal décourageait l'implication politique, en particulier à l'échelon local.
[...] Il est clair qu'une telle évolution présente le risque de créer forme de responsabilité-écran des personnes morales de droit public, et qu'elle mènerait, à terme, à neutraliser complètement l'extension du champ de la responsabilité pénale des décideurs publics. Or, s'il est nécessaire de protéger ces derniers face à une pénalisation excessive de la vie publique, il ne s'agit pas toutefois de les replacer dans une situation d'immunité qui serait anti-démocratique. D'autres pistes de réflexion moins risquées pour l'état de droit ont été proposées par le rapport de 2000. [...]
[...] Toutefois de nombreux privilèges ont longtemps persisté et persistent encore pour certaines fonctions. D'abord, le Président de la République bénéficie d'une quasi-irresponsabilité pénale, prévue par les articles 67 et 68 de la Constitution, qui disposent que Le président de la République n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité (à l'Art. et, à l'Art qu' il ne peut être destitué qu'en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat. et que La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour. [...]
[...] Les principales mesures prises par le législateur ont visé à limiter les risques de mise en cause pour des délits non-intentionnels, qui sont considérés comme la principale source de dérives. D'abord, la loi du 5 mai 1996 est venue préciser que la négligence et l'imprudence devaient être appréciées in concreto. Désormais, c'est donc à la partie civile ou au ministère public de prouver que les agents n'ont pas accompli les diligences normales qui pouvaient être attendues, compte tenu des missions des fonctions, des compétences et des moyens dont ils disposaient. [...]
[...] Cette mesure vise donc clairement à limiter l'intervention du droit pénal aux cas les plus graves en matière de maladministration et d'éviter de paralyser l'action publique, en particulier à l'échelon local. B La limitation de la responsabilité pénale des décideurs publics demeure un sujet de réflexion sensible. En dehors de ces textes, la question des excès de la pénalisation a fait l'objet de nombreux rapports. Le Conseil d'Etat en a ainsi publié deux rapports sur le sujet en 1995-96 et en 1999, Elisabeth Guigou, alors Garde des Sceaux, a demandé que soit menée une réflexion sur le thème de la responsabilité pénale des décideurs publics. [...]
[...] Face à cette tendance, de nombreux élus ont fait part de leur inquiétude, en soulignant que la prise d'importance du risque pénal décourageait l'implication politique, en particulier à l'échelon local. Quelle est donc la véritable ampleur du phénomène de pénalisation de la vie publique ? Le souci de pallier les déficiences des responsabilités politique et administrative a mené à étendre de champ de la responsabilité pénale des décideurs publics Toutefois, face à la menace de paralysie de l'action publique, le droit pénal s'est adapté aux spécificités des décideurs publics et leur assure désormais une certaine protection face au risque pénal (II). [...]
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