Droit de la répression - première année de master - sciences po
L'intérêt du droit de la répression est qu'il donne une vue sur les valeurs véhiculées par un pays et ce même dans un pays démocratique. Il revêt donc un intérêt sociologique. Par ailleurs, il n'existe pas de meilleures matières pour se former à l'exercice de qualification.
D'un point de vue historique, le premier socle du droit pénal est un socle utilitariste datant du XVIIIe siècle. Ce socle est aussi bien représenté par Jérémy Bentham, C. Beccaria et l'école néoclassique avec Ortolan et Rossi). L'idée est punir ni plus qu'il est utile ni plus qu'il n'est juste. Il faut donc se concentrer sur les valeurs essentielles soit celles qui intéressent l'Etat. Il convient donc de se concentrer sur la répression de comportement qui vont à l'encontre du droit et non de la morale.
Exemple : Jérémy Bentham dans son essai sur la pédérastie
Ce qui fait la force de l'utilitarisme et qui l'a fait émerger sous la Révolution française est que ce sont les principes qui fondent l'armature d'un pays démocratique.
Principe de légalité des délits et des peines
Principe constitutionnel (art 5 7 et 8 DDHC) et conventionnelle (art 7 de la CEDH). L'idée est que le législateur a le monopole pour l'édiction des incriminations et des sanctions car lui seul incarne le contrat social qui fonde le droit de punir. Il y a donc une articulation entre
Cf. : L'état de nature, Léviathan dans ce sens où l'ensemble des libertés qui ont été abandonnées
Dans la théorie classique le juge n'a aucune légitimité. « Le juge qui n'est qu'un citoyen comme les autres, ne saurait sous aucun prétexte de zèle ou de bien public augmenter la loi établie envers le citoyen délinquant » (Beccaria).
Le premier corollaire : Le législateur doit faire oeuvre de précision lorsqu'il édicte des incriminations et des sanctions.
Le deuxième corollaire : l'interprétation stricte autrefois un principe non écrit se trouve désormais à l'article 111-4 du Code pénal. Stricte c'est à dire conforme à l'intention du législateur dans une optique téléologique suivant l'objet du législateur. Il convient de se référer aux travaux préparatoires.
Exemple : Un médecin apporte à une vieille femme souffrante une souffrance létale pour qu'elle mette fin à ses jours. Y a t il provocation au suicide qui est visé par un article du Code pénal ? Or dans les travaux préparatoires, les législateurs ne visaient non pas l'euthanasie mais les pratiques sataniques et types sectes.
L'analogie est bannie exception faite à l'analogie in favorem soit en faveur du délinquant.
Exemple : la grivèlerie d'aliments est sanctionné par le droit pénal, en revanche s'il s'agit d'une facture téléphonique
Pendant longtemps les immunités familiales étaient limitées au vol très vite la justice a étendu ces immunités familiales aux abus de biens sociaux et autres. Cela adoucit le sort du délinquant mais ne l'aggrave pas.
L'interprétation peut être a fortiori ou a contrario. Le juge peut également adapter le texte à l'évolution des moeurs et des techniques.
Exemple : le vol se définit par la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui. Le vol d'électricité peut-il être considéré comme un vol ? La jurisprudence dans un arrêt de la chambre criminelle du 3 décembre 1912 a tranché
Application de la loi dans le temps (art 2 du Cc) :
Le droit pénal va au-delà des principes du Code civil puisqu'il existe en droit pénal le principe de non rétroactivité à valeur constitutionnelle. En aucune manière une loi plus sévère ne peut rétroagir. La seule rétroactivité admise est la rétroactivité in mitus soit celle de la loi plus douce.
Application de la loi dans l'espace :
Le fondement du droit de punir est le contrat social. La loi pénale française s'applique sur l'ensemble du territoire ainsi que sur les pavillons français et eaux territoriales. Hors du territoire il faut distinguer la compétence active (un français a commis l'agression) et compétence passive (un français en est la victime). Pour les crimes, dans les deux cas, la loi française est potentiellement compétente. Pour les délits, dans le cas de la compétence active, la loi pénale française n'est compétente que s'il y a réciprocité d'incrimination. Pour ce qui est de la compétence passive, le délit ne relève de la loi française que s'il est passible d'une peine d'emprisonnement. Pour ce qui est des contraventions cela ne relève jamais de la loi française. Le contrat social français intéresse le territoire français et les nationaux hors du territoire dès lors que cela concerne des valeurs fondamentales.
Le premier Code pénal français de 1791 est un Code très libéral. En 1810 apparaît le Code pénal napoléonien. Sous Valérie Giscard d'Estaing, il y a eu une commission de réflexion brillante sur une réforme du Code pénal en 1978-1981. Le nouveau Code pénal sera finalement édicté le 1er mars 1994 la seule chose nouvelle est la responsabilité pénale pour les personnes morales et... Son ambition a été manquée car il n'englobe pas toute la matière. Il est composé de cinq partie :
1ère partie : principes généraux issus de la pensée utilitariste
2e partie : atteintes aux personnes soit les valeurs qui sont considérées les plus hautes. A noter que dans le Code pénal napoléonien les atteintes à la Nation se situaient en premier. L'infraction la plus grave dans le nouveau Code se trouve donc à l'article 211-1.
3e partie : atteintes aux biens
4e partie : atteintes à l'Etat (terrorisme art 421-1 du Code pénal)
5e partie : atteintes aux animaux et droit pénal de la bioéthique (qui se trouve donc en deux partie)
Un grand mouvement de remontée en puissance du pouvoir du juge jusqu'à nos jours auxquels plusieurs facteurs ont contribué. S'agissant des peines, en 1791, les peines étaient fixes (utilitarisme pur et dur). En 1810, on institue la fourchette. En 1831, apparition des circonstances atténuantes. En 1884, dans le fameux article 132-24 du Code pénal on pose le grand principe de personnalisation de la peine. Le législateur a maintenu les maximas très bas, mais il a supprimé tous les minimas sauf en matière criminelle (2 ans pour la perpétuité et 1 an lorsqu'on encourt trente ans). La réforme de la récidive avec les peines plancher est donc un mouvement rétrograde vis à vis de ce mouvement long de deux siècles.
Il existe un autre socle du droit pénal : le socle positiviste. Le XIX siècle est le siècle de la découverte du déterminisme. Pour les utilitaristes, le postulat de base est celui que l'individu est libre ainsi le fait de mettre en avant le droit pénal doit dissuader par lui seul.
« nous sommes tellement machines »
Il existe trois déterminismes : déterminisme animal (Darwin), déterminisme social (Marx) et le déterminisme sexuel (Freud).
Exemple : 90% des infractions sexuelles sont commises par des personnes ayant été victimes d'agressions sexuelles.
L'école positiviste italienne :
Cesare Lombroso ; L'homme criminel, 1873 Ferri, Sociologie criminelle, Garofalo.
Ces positivistes sont convaincus qu'il y'a un habitus (Bourdieu) un déterminisme lors du passage à l'acte. Le travail est donc mieux connaître le délinquant, mieux le connaître pour mieux le classer et mieux le classer pour mieux le traiter (dans l'intérêt de la société pour la protéger et non dans son bien à lui). Selon eux, il existe des délinquants d'habitude et des délinquants d'occasion. Dans le premier cas, selon eux il n'existe que deux possibilité : peine de morts, concentration ou relégation. Pour les délinquants d'occasion ont peut prendre des mesures de traitement. C'est là que naissent les mesures de sûreté. Par conséquent, le cas par cas s'impose et le pouvoir du juge est mis en avant au regard de la prise en considération des profils. Pour un crime, le dossier de personnalité est systématique pour les délits, il est optionnel. Il est censé renseigner pour le profil, néanmoins c'est un travail de très faible qualité. Seules 4% des affaires sont traitées par un juge d'instruction sinon « traitement en temps réel » (comparution immédiate) ou « traitement à délai rapproché » (pour le mineur). Cela explique cette remontée en puissance du pouvoir du juge
NB : Foucault ; Naissance de la psychiatrie
Evolutions du pouvoir du juge quant aux infractions
Dans la logique de Beccaria, il fallait peu de droit pénal, qu'il soit stable bien écrit avec concision et précision. On s'est considérablement éloigné de cet idéal pour diverses raisons :
- Crise de la technique législative,« inflation législative » (Carbonnier) dès les années 30 ;
- Il y a de moins en moins de juristes aux Parlement « folie des institutions » (Foucault) la loi édictée ne l'est pas par des juristes dès les années 50 baisse de la qualité de la loi
- Fait diversification de la loi « législation du fait divers » (R. Badinter), vision thérapeutique du droit : le mal doit être éradiqué, il faudrait trouver un dispositif qui le rende impossible. Les faits ont été traduits en loi.
Exemples : délit d'entrave à l'avortement (1993), l'affaire du temple du soleil (loi du 12 juin 2001 pour la répression des mouvements sectaire archétypale de toutes les dérives, on avait dans le premier projet de loi un délit de manipulation mentale), dans le gouvernement actuel c'est la fascination pour la récidive (4e loi sur la récidive) et les LOPSI : loi d'orientation de programmation et d'orientation de sécurité intérieure.
Cf : « l'an 1 du droit pénal » MAM « il faut réécrire tout le Code pénal »
L'idée c'est que plus une loi sera médiatique moins elle sera appliqué.
Exemple : loi de 2003 sur la sécurité intérieure (occupation d'hall d'immeuble très typé non poursuivie, interdiction de brûler le drapeau et siffler la Marseillaise) : droit pénal parfaitement artificiel aux antipodes de l'utilitarisme. Interdiction de la dissimulation de visage (arrêté du 19 juin 2009 complété par une loi fin 2010).
Textes durs, pratique souple. 80% des textes de loi de pénal
Dans une loi de finance rectificative de finance, on a fait passé le délai de prescription pour les infractions de la peine est passé de deux à trois mois.
Délai de prescription de l'action publique. La prescription n'existe pas dans le monde entier. Aux Etats-Unis, cela dépend des preuves uniquement. Les français suivent l'idée d'une fixation d'un couperet. 1 an pour les contravention, 3 ans pour les délits, 10 ans pour les crimes. Le délai de prescription de la peine est de 3 ans pour les contraventions, 5 ans pour les délits et 20 ans pour les crimes avec régimes dérogatoires notamment pour les crimes contre l'Humanité.
Exemple : dans le cas de l'affaire Emile Louis, on a dit qu'il s'agissait d'un enlèvement pour contourner les règles. Soit transmis du procureur : bordereau acte de diligence interrompant la prescription.
Il en va de même pour les abus de biens sociaux. Ils sont techniquement instantanés mais la jurisprudence considère que le point de départ est fixé à la publication des comptes sociaux de l'entreprise sauf en cas de dissimulation.
- Infraction instantanée : le point de départ est le moment de la commission ;
- Infraction continue : le point de départ de la prescription est quand l'action s'achève ;
- Infraction complexe : plusieurs actes distincts : le point de départ est le moment où s'achève le dernier acte.
Comme la loi est de plus en plus imprécise et de plus en plus mal rédigée, il faut aujourd'hui s'appuyer sur le juge pour venir garantir l'individu contre l'arbitraire et préciser le contour des incriminations.
Exemple : lorsqu'une ordonnance de 1967 a crée le délit d'initié, c'est la jurisprudence qui a fait le travail de délimitation de précision (affaire péchinet triangle de 1995).
La CEDH développe une conception de la légalité qui est une conception de la légalité qui est une conception matérielle :
- Les principes fondamentaux sont si essentiels dans une société démocratiques, qu'ils s'appliquent à l'ensemble de la matière pénale et pas seulement lorsqu'on se trouve devant le juge pénal (CEDH, 22 Février 1984, Oztürk c/ Turquie). Dès lors qu'une sanction fait grief, elle doit être garantie par l'ensemble des principes du droit pénal quand bien même lorsqu'on ne se trouve pas devant un juge pénal. Cela concerne toutes les sanctions administratives, fiscales etc.
- Pour la Cour de Strasbourg, la qualité matérielle de la norme pénale (précision, clarté, intelligibilité, accessibilité) importe bien davantage que sa source formelle. L'idée est que mieux vaut une bonne jurisprudence qu'une mauvaise loi. Si d'aventure la loi pénale votée par le Parlement manque de précision, on attend du juge pénal, qu'il vienne apporter les précisions nécessaires. Ici encore c'est une remontée du pouvoir du juge. La garantie contre l'arbitraire dans un pays démocratiques gît non plus seulement dans la lecture de la loi mais également dans la lecture des décisions de justice.
CEDH 26 avril 1979 Sunday Times c/ Royaume-Uni
Exemples : les écoutes téléphoniques en France ; la France a été condamné par la CEDH dans les arrêts Kruslin et Hudig contre France le 24 Avril 1990. La CEDH a condamné la France pour son manque de précision quant aux statuts des écoutes téléphoniques. La chambre criminelle du 15 mai 1990 vient préciser les statuts des écoutes téléphoniques. Toutes ces précisions ont été ensuite reprises dans une loi du 10 juillet 1991
Arrêt CEDH du 10 novembre 1996 Cantoni c/ France :
Il s'agit d'un certain nombre de récurant ayant été condamné en France pour exercice illégal de la médecine et de la pharmacie. Violation de l'article 7 de la CEDH pour manque de précision car le mot médicament n'est pas précisé par la loi. Leur requête est rejeté au motif que le mot médicament est précisé dans la jurisprudence française bien qu'il ne le soit pas dans la loi.
N.B. : L'important dans la qualification d'un médicament est l'utilisation et non la présentation. En l'espèce, il s'agissait
La légalité formelle (Beccaria) et la légalité matérielle (CEDH) ne sont pas vraiment dans des rapports d'antagonisme mais dans des rapports de complémentarité. Si la loi au sens formel n'est pas assez précise, il faut compter sur la jurisprudence quitte à ce que la loi intervienne ensuite a posteriori pour reprendre de façon formel la jurisprudence.
Exemple : le droit du secret des journalistes quant au secret de leurs sources en Belgique. En France, on a souvent compté sur la jurisprudence. Affaire Equipe, Le point dans lequel la Cour de cassation a validé les pratiques du juge d'instruction quant à la perquisition au Point et à l'Equipe. Une loi du 4 Janvier 2011 entérine ce que la jurisprudence avait dit mais imparfaitement.
[...] Dans cette infraction élément matériel est facile à prouver mais élément intentionnel est très difficile à démontrer. Exposition d'enfants à des images pornographiques : on s'aperçoit que de plus en plus cette infraction fait l'objet de plaintes dans le cas de divorces qui tournent mal. Exploitation de l'image pornographique d'un mineur (Article 227-23 du CP). Infractions qui visent plus à rassurer qu'à sanctionner. Manque d'effectivité car élément intention est souvent difficile à prouver. On est plus dans la communication que dans la répression. B. Les infractions sexuelles avec violence. [...]
[...] La conscience malheureuse du délit de manipulation mentale ( ) I. L'INFLUENCE DE LA VULNERABILITE SUR LA CONSTITUTION DE L'INFRACTION Cela renvoie à la structure de l'infraction : élément matériel et élément moral. A. L'influence de la vulnérabilité de la victime sur l'élément matériel de l'infraction Les atteintes aux mineurs et à la famille ainsi que de nombreuses infractions de mise en danger font traditionnellement de la vulnérabilité un élément constitutif. De nouvelles incrimination ont récemment été ajoutée dans une section le sregroupant sous le nom d'atteinte à la dignité La vulnérabilité, élément constitutif traditionnel des atteintes aux mineurs t à la famille Art ; 227 du CP : délaissement de mineur mise en péril de mineur (227-15). [...]
[...] Il a été relaxé de risque de mort ou de blessure. Le problème est que l'on confond risque et danger ici. Ces confusions terminologiques, le législateur en est partiellement coupable car il est venu placer la notion de risque Crim février 1998 : un bateau sur un lac revient à quai. Il n'avait pas assez de canaux de sauvetage, condamnation pour risque. Aléa judiciaire L'empoisonnement L'empoisonnement est une infraction formelle (art. 221-5), complètement indifférente au résultat : quand bien même le résultat survient, cela ne change pas la qualification. [...]
[...] Qu'il s'agisse d'aggraver l'infraction ou de l'atténuer, le régime est relativement uniforme pour pallier les différentes erreurs de qualification. Cela en dit long sur les libertés que l'on prend vis-à-vis du principe de légalité. Un pourvoi en cassation serait voué à l'échec au regard de la théorie de la peine justifié. Exemple : le recèle auparavant qualifié comme une sorte de complicité. Puis le blanchiment est devenu une forme à part entière de recèle. I. L'incrimination élargie des appropriations frauduleuses A. [...]
[...] Ici ce que l'on retient c'est la témérité. Cette notion a été essentiellement faite pour ceux qui sont téméraires sur la route et en entreprise afin de rendre la sanction plus sévère. En 1996, deux ans après la révision du Code pénal, une première loi intervient le 13 mai afin que la notion d'imprudence soit apprécié in concreto afin de prendre en considération la libre disposition des moyens. La deuxième loi Fauchon du 18 Juillet 2000, on recycle la notion en l'utilisant comme un outil de politique de dépénalisation. [...]
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