Arrêt, Reminiac, cassation, 19 février 1919
Hegel, philosophe allemand du 19e siècle nous rappelle que si « l'attaque est la négation du droit, la défense est la négation de cette négation, et entraine l'application du droit. » C'est la naissance de la notion de légitime défense. Cette notion est l'une des plus anciennes du code pénal, elle trouve ses origines dans la vengeance, forme de justice ayant précédé la justice sociale. La légitime défense se définit comme un fait justificatif qui assure de l'impunité celui qui, pour repousser une agression actuelle et injuste, est amené à commettre une infraction lésant l'auteur du péril. Cette notion a fait l'objet de débats doctrinaux. Une partie de la doctrine avait une conception subjective de la légitime défense : la légitime défense est, selon cette conception, une réaction animée par un instinct de survie ou de conservation suite à l'agression subie qui aurait provoqué une contrainte morale sur l'agent en lui faisant perdre toute liberté d'esprit. Cette conception ayant fait l'objet de critiques, c'est la conception objective qui domine le droit positif. Cette conception objective repose sur l'idée selon laquelle la légitime défense serait non seulement le droit que tout individu aurait, de manière exceptionnelle, de protéger sa personne, celle d'autrui ou ses biens mais aussi le devoir de chacun de lutter contre l'agression afin de rétablir le droit et de préserver l'ordre social. Si la doctrine a beaucoup débattu sur cette notion, la jurisprudence également. Ainsi, alors que l'ancien code pénal ne reconnaissait pas la légitime défense des biens, la jurisprudence l'a reconnue avant même sa consécration dans le nouveau code pénal de 1994. De même, la jurisprudence va débattre sur la preuve de la légitime défense notamment dans le cadre de l'art 329 de l'ancien code pénal qui énonce deux cas compris dans les cas de nécessité actuelle de défense. C'est dans ce cadre qu'intervient l'arrêt Reminiac de la chambre criminelle de la Cour de Cassation le 19 février 1919.
En l'espèce, le 11 septembre 1954, un homme ivre, se rend au domicile de Reminiac, en pleine nuit, afin d'essayer de voir une domestique de ce dernier et à son domicile. Reminiac l'en empêche du fait de son état d'ivresse. Après avoir commis des dégâts sur la maison du propriétaire et escaladé son garage, cet individu pénètre alors dans le jardin de Reminiac. Quelques instants plus tard, alors que cet individu n'avait plus manifesté sa présence, Reminiac, après avoir été cherché un revolver et l'avoir armé « posément » tira deux fois dans la direction où il supposait que cet individu se trouvait. Cet homme fut grièvement blessé alors qu'il fumait tranquillement derrière un buisson. Après une première instance, un appel est formé à la Cour d'appel de Bourges qui rendra un arrêt en date du 6 mars 1958 défavorable au propriétaire. Celui-ci se pourvoit en cassation. L'auteur du pourvoi invoque le premier cas de légitime défense de l'art 329 de l'ancien code pénal c'est-à-dire le cas de nécessité actuelle de défense lorsque l'acte a été accompli pour « repousser pendant la nuit l'escalade ou l'effraction des clôtures, murs ou entrée d'une maison ou d'un appartement habité ou de leurs dépendances. » Au contraire, la Cour d'appel, dans son arrêt, refuse de faire application de cette présomption de légitime défense en l'espèce et condamne en conséquence le propriétaire.
Quel est, dès lors, le régime juridique de la présomption de légitime défense instaurée par l'article 329 de l'ancien code pénal (et reprise dans l'article 122-6 du nouveau code pénal) ? La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans son arrêt en date du 19 février 1959, rejette le pourvoi en estimant que la Cour d'appel a pu, sans violer les articles 328 et 329 du code pénal, refuser, en l'espèce, l'application de cette présomption aux motifs qu'« il s'agit là d'une présomption légale qui, loin de présenter un caractère absolu et irréfutable, est susceptible de céder devant la preuve contraire ; que le texte dont s'agit ne saurait justifier des actes de violence lorsqu'il est démontré qu'ils ont été commis en dehors d'un cas de nécessité actuelle et en l'absence d'un danger grave et imminent dont le propriétaire ou les habitants de la maison aient pu se croire menacés dans leurs personnes ou dans leurs biens. »
[...] Au contraire, la Cour d'appel, dans son arrêt, refuse de faire application de cette présomption de légitime défense en l'espèce et condamne en conséquence le propriétaire. Quel est, dès lors, le régime juridique de la présomption de légitime défense instaurée par l'article 329 de l'ancien code pénal (et reprise dans l'article 122-6 du nouveau code pénal) ? La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans son arrêt en date du 19 février 1959, rejette le pourvoi en estimant que la Cour d'appel a pu, sans violer les articles 328 et 329 du code pénal, refuser, en l'espèce, l'application de cette présomption aux motifs qu'« il s'agit là d'une présomption légale qui, loin de présenter un caractère absolu et irréfutable, est susceptible de céder devant la preuve contraire ; que le texte dont s'agit ne saurait justifier des actes de violence lorsqu'il est démontré qu'ils ont été commis en dehors d'un cas de nécessité actuelle et en l'absence d'un danger grave et imminent dont le propriétaire ou les habitants de la maison aient pu se croire menacés dans leurs personnes ou dans leurs biens. [...]
[...] Par exemple, une personne pourrait faire une mise en scène consistant à faire croire à un cambriolage la nuit dans une maison habitée pour pouvoir invoquer la présomption de légitime défense (actuel art 122-6 du code pénal) alors qu'en réalité il s'agirait d'un meurtre. C'est dans ce contexte que la Cour de cassation va venir mettre fin aux controverses puisque selon les cas, on admettait une présomption simple ou irréfragable. La cour de cassation va en effet devoir se positionner et effectuer un choix. Elle va en l'espèce, par cet arrêt de principe, prendre partie pour la nature simple de la présomption. [...]
[...] En l'espèce, le 11 septembre 1954, un homme ivre, se rend au domicile de Reminiac, en pleine nuit, afin d'essayer de voir une domestique de ce dernier et à son domicile. Reminiac l'en empêche du fait de son état d'ivresse. Après avoir commis des dégâts sur la maison du propriétaire et escaladé son garage, cet individu pénètre alors dans le jardin de Reminiac. Quelques instants plus tard, alors que cet individu n'avait plus manifesté sa présence, Reminiac, après avoir été cherché un revolver et l'avoir armé posément tira deux fois dans la direction où il supposait que cet individu se trouvait. [...]
[...] L'admissibilité de la preuve contraire : La Cour de cassation admet dans son attendu l'admissibilité de la preuve contraire afin de faire tomber la présomption. Elle déclare ainsi que la présomption est susceptible de céder devant la preuve contraire La victime peut ainsi prouver qu'il n'y avait pas de légitime défense en ce que les conditions générales permettant de caractériser l'existence de la légitime défense n'étaient pas réunies. Ainsi, il est énoncé que la présomption ne saurait justifier des actes de violence lorsqu'il est démontré qu'ils ont été commis en dehors d'un cas de nécessité actuelle et en l'absence d'un danger grave et imminent La victime peut donc faire tomber la présomption en prouvant que la riposte n'a pas été commise dans le cadre d'une nécessité actuelle c'est-à- dire lorsque le délai entre l'agression et la riposte a été trop long. [...]
[...] Droit pénal groupe n°14 Commentaire d'arrêt : Cour de cassation, chambre criminelle, 19/02/1959 Reminiac Hegel, philosophe allemand du 19e siècle nous rappelle que si l'attaque est la négation du droit, la défense est la négation de cette négation, et entraine l'application du droit. C'est la naissance de la notion de légitime défense. Cette notion est l'une des plus anciennes du code pénal, elle trouve ses origines dans la vengeance, forme de justice ayant précédé la justice sociale. La légitime défense se définit comme un fait justificatif qui assure de l'impunité celui qui, pour repousser une agression actuelle et injuste, est amené à commettre une infraction lésant l'auteur du péril. [...]
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