Tentative, homicide, volontaire, violences, cadavre, cassation, 16 janvier 1986
« Par définition, la théorie de la tentative permet de réprimer dans les cas ou la consommation ne le permet pas » Ainsi, par cette formule, Mr Prothais met en évidence le fait que la production d'un résultat n'est pas nécessairement indispensable à la répression. L'incrimination de la tentative est une technique permettant de condamner l'auteur d'une infraction matérielle alors même que ce dernier n'a pas atteint le résultat prévu par le texte d'incrimination. Cette notion de tentative est définie de manière assez large notamment à l'article 121-5 du nouveau Code pénal qui exige un commencement d'exécution et l'absence de désistement volontaire : « La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d'exécution, elle n'a été suspendue ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. » On repère, dans cette définition, différents types de tentatives à savoir la tentative interrompue lorsque les actes du délinquant ont été suspendus en cours d'exécution ou encore la tentative infructueuse lorsque l'agent a mené son action jusqu'à son terme et que seul le résultat fait défaut. De manière plus précise, la tentative infructueuse comprend les infractions manquées pour lesquelles les actes constitutifs de l'infraction ont été accomplis et que seules des circonstances indépendantes de la volonté de l'agent ont empêché le résultat escompté et les infractions impossibles pour lesquelles on ne peut aboutir à un résultat. Si l'infraction manquée ne pose pas tellement de difficultés du fait de son assimilation à l'infraction interrompue «n'a été suspendue ou n'a manqué son effet », en revanche, la question de l'infraction impossible est bien plus problématique car aucune disposition générale ne la prévoit. C'est cette notion d'infraction impossible, inventée en 1808 par l'Allemand Feuerbach (concernant le pèlerinage d'un paysan dans le but d'obtenir la mort de son ennemi), qui retiendra notre attention dans le cas présent. Ainsi, Prothais affirme que « si on ne peut, à l'évidence, consommer l'impossible, on peut toujours le tenter. »
En l'espèce, à la suite d'une querelle violente accompagnée de menaces et de coups, Mr Charaux assomme un individu et s'acharne sur lui jusqu'à ce que la victime meure. Toutefois, le lendemain, Félix Perdereau, ayant appris que la victime n'était pas morte, a entrepris de l'achever. L'instruction révèle, suite aux résultats d'autopsie et d'expertise, que la victime était déjà morte le premier soir et qu'en conséquence, Mr Perdereau a commis des violences sur un cadavre. La chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris, le 11 juillet 1985, va alors renvoyer ce dernier devant la Cour d'assise pour « tentative d'homicide volontaire. » M Perdereau forme donc un pourvoi en cassation. En effet, selon la chambre d'accusation, « il existe de lourdes charges à l'égard de Félix Perdereau du chef de tentative d'homicide volontaire sur le nommé Willekens qu'il a frappé à coups de bouteille et étranglé avec un lien torsadé dans l'ignorance qu'il était déjà mort. » Au contraire, l'auteur de pourvoi souligne, d'une part, la contradiction entre les faits énoncés par l'arrêt attaqué dans ses motifs et ceux mentionnés dans le dispositif et, d'autre part, il met en évidence qu'il ne peut être retenue à son encontre la commission d'une tentative d'homicide volontaire suite aux coups portés volontairement sur l'individu, celui-ci étant déjà décédé au moment de son acte : « ne sauraient constituer une tentative d'homicide les violences portées, même avec l'intention de donner la mort, la victime étant déjà décédée, lors de la commission des violences. » L'intérêt de cet arrêt réside dans ce véritable problème de fond (c'est-à-dire sur la quatrième branche du moyen).
[...] En effet, dans la lignée de l'arrêt des époux Fleury, elle reconnait comme coupable de tentative d'homicide volontaire, un homme qui, croyant une personne encore en vie, exerce sur cette dernière des violences dans l'intention de la tuer, du fait que le décès de la victime est une circonstance indépendante de la volonté de son auteur. Ainsi, par cet arrêt, la Cour de cassation met un terme à la distinction entre l'impossibilité de droit qui est constituée en l'absence d'élément légal et l'impossibilité de fait dans les autres cas (exemple traditionnel d'une voiture vide que l'on ne peut en conséquence pas voler), seule l'impossibilité de droit pouvant donner lieu à des poursuites pénales. [...]
[...] La qualification de ces faits aurait en effet était différente si l'agent savait qu'il exerçait des violences sur un cadavre. C'est la croyance en la vie de la victime qui démontre l'intention criminelle de l'agent, élément déterminant pour la répression de l'infraction impossible : Perdereau croyant Willekens encore en vie, ait exercé sur celui-ci des violences dans l'intention de lui donner la mort. C'est cette intention criminelle qui constitue le raisonnement de la Cour de cassation. En effet, il apparait que cette intention criminelle est le seul point commun existant reliant les faits reprochés à savoir des coups de bouteille sur le crâne et une strangulation énoncés dans l'arrêt de cette façon des coups de bouteille sur le crâne, puis en lui serrant le cou avec un lien torsadé et l'homicide. [...]
[...] La première, en date du 15 mars 1994 (chambre criminelle de la Cour de cassation) reconnait coupable de tentative de vol, l'individu qui entre par effraction (commencement d'exécution) dans une maison habitée mais qui en ressort les mains vide en raison de l'absence d'objet de valeur dans cette maison en estimant que dès lors que l'inexistence dans les lieux de tout objet de valeur constitue une circonstance indépendante de la volonté de son auteur, par suite de laquelle la tentative a manqué son effet. La seconde, en date du 5 mai 1997, (chambre criminelle) retient la tentative d'entrave à une interruption volontaire de grossesse du fait de l'intrusion d'un commando anti-IVG dans les locaux d'une maternité, quand bien même aucune intervention n'était en cours ou n'était prévue au moment de cette intrusion. [...]
[...] Pour que la répression de l'infraction impossible puisse s'effectuer, il faut, comme pour toute autre infraction, que l'intention coupable de l'agent soit caractérisée. Ainsi, la Cour de cassation va s'attacher à la caractérisation de cette intention criminelle, caractérisation qui constitue en outre la base de son raisonnement. Plusieurs fois dans l'arrêt est caractérisée l'intention de l'auteur, ne serait-ce que dans le rappel des faits. En effet, c'est parce que Perdereau aurait appris que Willekens semblait encore vivant qu'il aurait entrepris de l'achever. [...]
[...] Pour justifier sa décision et la reconnaissance d'une tentative d'homicide volontaire, la Cour de cassation met en évidence la présence des éléments traditionnels constitutifs de la tentative d'homicide volontaire Pourtant, cela n'a pas suffit à concilier les opinions doctrinales, en effet, si certains estiment que cette décision est bien fondée, d'autres la critiquent amèrement. On est donc face à une décision controversée Les éléments constitutifs de la tentative d'homicide volontaire. La Cour de cassation, dans cet arrêt, marque sa volonté de respecter strictement les conditions cumulatives posées par l'ancien article 2 du Code pénal à savoir d'une part le commencement d'exécution et d'autre part, l'absence de désistement volontaire : cette circonstance étant indépendante de la volonté de l'auteur et lesdites violences caractérisant un commencement d'exécution au sens de l'article 2 du Code pénal. [...]
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