L'état de nécessité, commentaire d'arrêt, Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 8 mars 2011

Thèmes abordés

état de nécessité, chien, agent de surveillance, arme, patrouille

Résumé du document

Au XVIIème siècle, Loisel développe l'idée que la nécessité n'a point de loi dans une de ses Maximes de droit français, c'est-à-dire que le droit positif peut être amené à céder devant « besoing » est une idée très répandue pendant tout le Moyen Age et aux siècles suivants.
En effet, un adage dit « nécessité fait loi », ce qui signifie que l'acte inévitable au vue des circonstances n'est pas condamnable. Par ailleurs, les Anciens avaient ce proverbe : Viro esurienti necesse est furari, ce qui veut dire : L'homme affamé est bien forcé de voler.
D'autre part, on peut citer ainsi cette phrase de Plaute : Quidvis egestas imperat, ce qui signifie : Le besoin provoque tout crime. L'idée retenue par nos aïeux est que la fin justifie les moyens, ainsi pour parvenir à un objectif noble, il faut parfois utiliser des moyens condamnables.
En l'espèce : un agent de surveillance de la SNCF patrouille dans un train avec son chien muselé et tenu en laisse. Dans un wagon très encombré, il croise un autre chien dont la muselière s'est détachée et qui se met à mordre le sien. Malgré tous les efforts de cet agent et de la propriétaire du chien agresseur ils ne parvinrent pas à lui faire lâcher prise. L'agent de surveillance sort alors son arme et abat l'animal.

Extraits

[...] Mais dans certains cas, les juges de la cour de cassation feront une appréciation in concreto qui s'effectue dans un cas d'espèce, de manière concrète, spéciale et individuelle. En effet, en l'espèce, les juges de la Cour de cassation ont pu retenir l'existence d'un danger actuel en constatant l'encombrement du wagon , l'étroitesse des lieux, la présence d'un troisième chien , l'échec de l'intervention de M.Y pour faire lâcher prise à l'animal qui mordait le sien. Ce sont autant de faits qui ont pousser les juges à retenir l'existence d'un danger actuel ou imminent. [...]

[...] Encore une fois la Cour de cassation apprécie les faits in concreto En l'espèce, la Cour de cassation estime que le fait de tirer sur un chien pour sauver la vie de son est donc un acte utile, nécessaire et proportionné. L'agent de sécurité peut se prévaloir de l'état de nécessité, cela résulte donc d'une irresponsabilité pénale et civile Mais on voit que la Cour de cassation s'est donc appuyé sur les faits pour constater l'état de nécessité, il relèverait plus de l'équité que de la règle de droit ? L'état de nécessité : un fait justificatif fondé sur la notion d'équité ? [...]

[...] Le danger doit donc être actuel ou imminent. L'arrêt du 11 avril 1997 nous apporte une précision, en relevant que les difficultés financières sont insuffisantes pour caractériser un danger actuel ou imminent. Ainsi, des squatteurs ne peuvent prétexter la crise du logement pour justifier un délit de bris de clôture. Le danger doit menacer l'agent voire un tiers ou un bien. Par ailleurs, le danger peut être physique, moral,matériel. Peut importe la nature du danger, pourvu que ce danger soit caractérisé. [...]

[...] Nonobstant, il semble que la Cour de cassation apprécie in concreto les faits afin de pouvoir appliquer l'article 122-7 du code pénal. En effet, elle relève les faits ( étroitesse des lieux, encombrement wagon , présence d'un troisième chien, échec de l'intervention du propriétaire et de l'agent de sécurité) et ce sont autant de faits qui statuent en faveur de l'état de nécessite. Aujourd'hui, bons nombre d'auteurs estiment que l'état de nécessité relève plus de l'équité que véritablement de la règle de droit. [...]

[...] Dans un premier temps, nous avons vu que le législateur avait soumis des conditions tenant a la menace. Cette menace doit être actuelle ou imminente, le danger doit menacer l'agent , un tiers ou un bien et le mal doit être injuste et donc contraire au droit. En l'espèce, le danger provient du chien. Le chien abattu était en train d'agresser et de blesser le chien de l'agent de sécurité. On est donc bien en présence d'un danger actuel ou imminent. [...]