Définition, contrainte, autorité, viol, chambre criminelle, cassation, 21 février 2007
En l'espèce, entre 1987 et 1988, Philipe A, fils d'un père qui travaille la nuit et d'une mère alcoolique et alors âgés de 13 ans va passer du temps avec Michel X, Jean-Michel B, Claude C et Jean-Marc Z. Des années plus tard, le 4 septembre 2002, par courrier, Philipe A va relater à la brigade des mineurs de Meaux des faits de viols et agressions sexuels. D'après lui chacun des mis en cause, avec leurs propres moyens, auraient usé de leur autorité pour user de lui et obtenir différents actes sexuels. Ainsi Jean-Marc Z se faisait passer pour un agent du PSG et donnait de l'argent de poche, Claude C offrait des tours de moto et a permis à la victime d'accéder à un grand circuit de course, Michel C lui a permis de faire des promenades à bord d'un avion... En échanges de ces faveurs Philipe A à subit et pratiqué des actes de sodomie et de fellation. Il expliquera alors que tous ces « nouveaux pères » lui offraient une famille, un groupe de référence ainsi que des présents incroyablement précieux pour un mineur alors âgé de 13 ans. Il a donc ressentit l'obligation de consentir, bien que ce mot n'ait pas sa place ici, aux actes de natures sexuelle. D'une part parce qu'un refus aurait déçu les auteurs, mais aurait aussi signifié l'arrêt des cadeaux.
L'affaire a donc été portée, suite à un jugement de première instance, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de ... puis les mis en cause ont formés un pourvoi en cassation.
La cour d'appel retient dans sa décision que le comportement des mis en cause, consistant en l'accueil, le réconfort, et l'offre de nombreux cadeaux induisant une docilité de la victime, représente une contrainte. Ainsi, telle une épée de Damoclès, la « rupture » entre ce groupe et la victime était implicitement entendue en cas de refus de ce dernier. De plus la configuration de délabrement familial ainsi que l'âge sensiblement plus avancé des auteurs sous-entend pour elle une notion d'autorité. En effet pour la Chambre de l'instruction la présence d'hommes apparemment présents et bienfaisants face à un garçon de 13 ans dont l'état « abandonnique » est constaté par des experts constitue irrémédiablement une situation de contrainte.
Cependant pour les parties défenderesses, 3 branches d'un même moyen sont opposées : Pour leur défense ils invoquent l'argument premier que les dons et cadeaux constitués par l'offre de vol en avion, voyage en Porsche, séance de bowling ne saurait constituer en rien des contraintes mais bien au contraire des marques de bienveillance. Qu'ainsi un des éléments constitutifs du viol au titre de l'article 222-23 ferait défaut. De plus selon la défense la différence d'âge entre les auteurs et la victime, ainsi que l'état abandonnique remarqué et remarquable de la victime ne sauraient en rien constituer une position d'autorité pour les mis en cause. Ainsi la Cour de cassation ne pourrait retenir le viol avec contrainte par individus ayant autorités qu'en violant le principe de l'interprétation stricte de la loi pénale.
[...] La décision de la chambre de l'instruction du 18 octobre 2006, pris en violation de ce principe, est cassée et annulé par le présent arrêt de la Cour de cassation en sa chambre criminelle rendu le 21 février 2007. Cet arrêt, tout en rappelant de manière précise mais restrictive la définition du viol induit irrémédiablement une restriction du champ d'application de l'infraction de viol (II). Une définition restrictivement précise des éléments constitutifs du viol La notion de contrainte comme élément légalement intrinsèque du viol La cour de cassation entend ici faire une application stricte de la lettre de l'article 222-23 du CP : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. [...]
[...] Une portée restrictive de la décision induite par la vision restreinte de la Cass Crim Une décision confondant minorité et consentement Pour la cour de cassation il n'y a donc en l'espèce pas de contrainte. Cependant il serait plausible de considérer que les juges du fond, en relevant que la sensation de faiblesse de la victime résultant à la fois de son jeune âge et de sa situation familiale délabrée, associée aux actes de nature sexuelle commis par les auteurs en l'échange de cadeaux emportait automatiquement notion de contrainte, ont agis d'une manière réfléchie et juste juridiquement. [...]
[...] Et c'est précisément en ça qu'on peut caractériser une contrainte. Ainsi tous les actes des auteurs sont orientés vers un seul et même objectif, obtenir une sorte de dépendance (et donc contre la volonté) de la victime. Ainsi chacune de leurs demandes ne pourront qu'être acceptée. Mais les forces sont ici inégales et ces hommes vont, par leurs agissements et la situation qu'ils créent, contraindre le mineur à agir, sans qu'il ne se pose même la question de savoir s'il le veut ou non. [...]
[...] Il est relatif à la définition de la contrainte et de l'autorité au sein de l'infraction de viol. En l'espèce, entre 1987 et 1988, Philipe fils d'un père qui travaille la nuit et d'une mère alcoolique et alors âgés de 13 ans va passer du temps avec Michel Jean-Michel Claude C et Jean-Marc Z. Des années plus tard, le 4 septembre 2002, par courrier, Philipe A va relater à la brigade des mineurs de Meaux des faits de viols et agressions sexuels. [...]
[...] C'est sur le terrain de la contrainte que la chambre de l'instruction a fondé sa décision. Or d'après la cour de cassation on ne peut considérer ici que les cadeaux offerts par les auteurs bien plus âgés que la victime âgée de 13 ans à l'époque dans le but d'obtenir des faveurs sexuelles de sa part, sont représentatif d'une quelconque violence ou contrainte au moment des rapports. Ainsi pour elle un des éléments constitutifs de l'infraction fait défaut, et nul juge ne pourrait donc qualifier l'infraction de viol. [...]
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