Droit pénal spécial
Cour de cassation, chambre criminelle, 10 janvier 2006:
Cet arrêt s'attaque à la transmission du virus du sida par relation sexuelle consenti. Le problème réside dans la qualification des faits car il est à rappeler que la jurisprudence a refusé la qualification d'empoisonnement. En effet, antérieurement, la cour de cassation avait refusé la qualification d'empoisonnement à cette infraction en affirmant que l'empoissonnement doit avoir pour but de donner la mort à la victime. Cette décision est certes contestables mais elle ne fera pas l'objet d'une étude dans ce commentaire. La cour d'appel de Colmar vient donc qualifier cette infraction comme « l'administration de substances nuisibles aggravés par l'infirmité permanente de la victime » et cela en vertu de l'article 222-15 du Code pénal.
En l'espèce, le prévenu est un homme atteint du virus de l'immunodéficience humaine dont il a la connaissance. Malgré ce virus, le prévenu a tout de même eu des rapports sexuels avec différentes femmes et cela sans aucune protection tout en prenant soin de dissimuler sa contamination. Par conséquent, deux femmes portes alors plaintes suite aux résultats médicaux leur annonçant leur contamination par le virus d'immunodéficience en date du 6 février 2001.
Suite à la plainte déposée par ces deux femmes, le prévenu est renvoyé devant le tribunal correctionnel de Strasbourg qui le condamne sous le chef de délit d'administration de substances nuisibles aggravés par l'infirmité permanente des victimes en date du 28 juin 2004. Le prévenu interjette donc appel et sa voit débouter de sa demande par la cour d'appel de Colmar qui rend un arrêt confirmatif en date du 4 janvier 2005. Il forme alors un pourvoi en cassation.
La cour d'appel avance au même titre que le tribunal correctionnel la qualification de l'infraction par l'article 222-15 du Code pénal et a justifié sa peine par l'article 222-9 du Code pénal.
La défense soulève plusieurs problème. En effet, elle relève dans un premier temps un défaut concernant l'élément matériel de l'infraction car l'on a aucun moyen de prouver que s'est le prévenu qui a contaminé les plaignantes. De plus, il y a également un souci concernant l'élément moral de l'infraction car l'acte sexuel avec une personne séropositive n'entraîne pas automatiquement la contamination de la partenaire.
L'on peut donc se poser des questions concernant la qualification de cette infraction par l'article 222-15 du Code pénal en se demandant si cette qualification est réellement judicieuse.
La cour de cassation rejette le pourvoi formé par le prévenu. Dans son arrêt elle évoque que le risque qui est encourue par les partenaires de cet homme sont très important et que par conséquent aussi bien l'élément matériel que l'élément moral sont constitués dans cette affaire. De plus elle soulève fortement le fait qu'il dissimule son sida déclaré à ses partenaires ce qui par conséquent justifie les éléments matériels et moraux.
Nous allons donc étudier dans une première partie la qualification faite de l'infraction par la cour de cassation à travers l'utilisation de l'article 222-15 en nous attardant sur la véritable présence de l'élément matériel et de l'élément moral puis dans une deuxième partie nous nous attarderons sur la question qui est de savoir si cette qualification faite par la cour de cassation est réellement judicieuse.
[...] DESSEINT Le 03/05/2011 Jordan Commentaire d'arrêt Cour de cassation, chambre criminelle janvier 2006: Cet arrêt s'attaque à la transmission du virus du sida par relation sexuelle consenti. Le problème réside dans la qualification des faits car il est à rappeler que la jurisprudence a refusé la qualification d'empoisonnement. En effet, antérieurement, la cour de cassation avait refusé la qualification d'empoisonnement à cette infraction en affirmant que l'empoissonnement doit avoir pour but de donner la mort à la victime. Cette décision est certes contestables mais elle ne fera pas l'objet d'une étude dans ce commentaire. [...]
[...] Il se pose alors le problème de la qualification. En effet, l'article 222-15 requiert une substance de nature à entraîner une infirmité physique ou psychique. Comme tous les auteurs se l'accordent, le virus du VIH tue. L'on peut donc se demander si la qualification d'empoissonnement n'aurait pas été plus judicieuse. L'article réprimant l'empoissonnement est l'article 221-5 du Code pénal. Il stipule que « le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort constitue un empoissonnent ». [...]
[...] Il semble d'ailleurs que cela soit entré dans les mœurs car pas plus tard qu'hier, le tribunal correctionnel de Nantes à condamné un individu à 2 ans de prison ferme pour avoir transmis le virus VIH à une femme lors d'un rapport non protégé. Les doctrinaux évoque également le souci de la correctionnalisation de l'infraction. En effet, par le fait qu'elle soit qualifiée par l'article 222-15 du Code pénal et non pas l'article 221-5, l'administration du sida par rapport sexuel non protégé va donc être apparenté à un délit et non pas à un crime. Cela peut donc porter préjudice aux victimes de ce type d'individu. La véritable intention du prévenu? [...]
[...] Voila un point que va soulever la défense. En effet, il n'est pas déduit que le prévenu avait le souhait de transmettre son virus. Il n'a pas eu des rapports amoureux en vu de transmettre le virus à ses différentes partenaires. Cependant, la cour de cassation vient elle affirmer que le simple fait de cacher à ses partenaires sa séropositivité caractérisait l'élément moral. De plus, la chambre criminelle relève que le prévenu avait auparavant prétexté une allergie au latex pour ne pas avoir à mettre de préservatif, principal accessoire permettant la non transmission du sida. [...]
[...] Il forme alors un pourvoi en cassation. La cour d'appel avance au même titre que le tribunal correctionnel la qualification de l'infraction par l'article 222-15 du Code pénal et a justifié sa peine par l'article 222-9 du Code pénal. La défense soulève plusieurs problème. En effet, elle relève dans un premier temps un défaut concernant l'élément matériel de l'infraction car l'on a aucun moyen de prouver que s'est le prévenu qui a contaminé les plaignantes. De plus, il y a également un souci concernant l'élément moral de l'infraction car l'acte sexuel avec une personne séropositive n'entraîne pas automatiquement la contamination de la partenaire. [...]
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