Commentaire d'arrêt, Chambre criminelle, Cour de cassation, 20 janvier 2009, conditions d'hébergement, dignité humaine
L'article 225-14 du Code pénal dispose que « le fait de soumettre une personne « dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur », à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine est puni de « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ». Cet article pose donc le principe de la nécessité que les conditions d'hébergement soient compatibles avec la dignité humaine.
C'est cet article qui est au coeur de l'arrêt de rejet rendu le 20 janvier 2009 par la Chambre criminelle de la Cour de Cassation. En l'espèce, M. Christian Donat a été incarcéré et détenu dans la maison d'arrêt de Rouen et la surpopulation régnant dans la maison d'arrêt de Rouen, comme de nombreuses maisons d'arrêt en France, a incité le détenu a porté plainte contre X du chef d'hébergement contraire à la dignité humaine sur le fondement de l'article 225-14 du Code pénal et il s'est constitué partie civile. Cependant, le juge d'instruction de Rouen a rendu une ordonnance de refus d'informer sur la plainte déposée par le détenu. Le détenu a alors interjeté en appel. Par un arrêt de confirmation rendu le 3 avril 2008, la Chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Rouen a confirmé l'ordonnance de refus d'informer sur le fondement de l'article 86 du Code de procédure pénale. Le détenu a, par la suite, formé un pourvoi en cassation. En effet, selon le détenu, la Chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Rouen a violé l'article 225-14 du Code pénal car les juges de l'instruction ont refusé de vérifier et de constater que les éléments constitutifs de l'infraction visée pouvaient être réunis en l'espèce.
[...] C'est ce qu'énonce la chambre criminelle de la Cour de Cassation, en l'espèce, « ainsi la détention de Christian Donat, directement liée à l'exercice de prérogatives de la puissance publique, exclut la responsabilité pénale de l'Etat, en application des articles 121-2 et 111-4 du Code pénal ». En effet, l'article 121-2 du Code pénal dispose que « les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 [ . ] » et l'article 111-4 du Code pénal énonce que « la loi pénale est d'interprétation stricte » ce qui exclut, en l'espèce, la mise en jeu de la responsabilté de l'Etat. [...]
[...] Céré ajoute que « d'autre part, un hébergement contraire à la dignité humaine doit être relevé ». Or, la surpopulation qui affecte la plupart des maisons d'arrêt françaises , et notamment la maison d'arrêt de Rouen, en l'espèce, est bien une réalité et effectivement contraire à la dignité de la personne humaine. De plus, les détenus sont bien abrités par l'administration pénitentiaire pendant leur détention. Cette seconde condition semble remplie pour les personnes en détention , et notamment, en l'espèce, pour M. [...]
[...] Exclusion de la mise en jeu de la responsabilité de personnes physiques En l'espèce, comme le précise l'arrêt de la Cour de Cassation, le détenu a déposé une plainte « contre personne non dénommée », c'est-à-dire contre « du chef de soumission d'une personne vulnérable à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine ». Le requérant n'a donc pas cherché à mettre en jeu la responsabilité pénale de l'Etat, qui est une personne morale, mais celle de personnes physiques. [...]
[...] Ainsi, par cet arrêt, la Cour de Cassation met un terme à toute tentative d'ouverture du champ d'application de l'article 225-14 du Code pénal aux conditions de détention en prison, comme l'avait fait la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Nancy, et, par conséquent, à la réprimande indirecte de la surpopulation existant dans les lieux de détention en France. En effet, comme l'indique M. Céré, cet arrêt « ferme la porte à l'examen par une juridiction d'instruction de la compatibilité des conditions d'hébergement dans un établissement pénitentiaire avec la dignité humaine ». [...]
[...] Céré (Recueil Dalloz 2009 p1376), « la dénonciation des conditions de détention au sein d'un établissement pénitentiaire, quel qu'il soit, ne peut augurer d'une mise en jeu de la responsabilité pénale de l'Etat ». La Cour de Cassation, en l'espèce, constate que « la partie civile n'établit pas que cette situation [de surpopulation des cellules] serait la conséquence d'une faute personnelle détachable de l'exercice de fonctions de l'une des autorités de l'administration pénitentiaire[ . ] ;qu'il en résulte que les reproches faits [ . [...]
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