Commentaire d'arrêt, Chambre criminelle, Cour de cassation, 16 mars 2010, responsabilité pénale de la personne morale
Léon Duguit disait : « je n'ai jamais dîné avec une personne morale », cette idée illustre la théorie de la fiction de la personnalité morale, selon laquelle la personnalité morale n'est qu'une fiction et n'a pas de réalité tangible. Selon cette analyse classique de la personnalité morale, celle-ci ne peut exister, car il est impossible d'imputer matériellement et moralement l'infraction à une personne morale, et impossibilité d'appliquer une peine à la personne morale. Les partisans de la théorie de la réalité, théorie beaucoup plus actuelle, sont convaincus de la réalité de la personne morale. L'un d'entre eux : Jean Claude Soyer a répondu à l'impossibilité de dîner avec une personne morale : « moi non plus, mais je l'ai souvent vu payer l'addition ». La réforme du Code pénal de 1994 a tranché ce débat doctrinal en admettant la responsabilité des personnes morales dans son article 121-2. Désormais seuls les groupements auxquels la loi reconnaît la personnalité morale peuvent voir leur responsabilité pénale engagée. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Perben II (31 décembre 2005), les personnes morales sont désormais responsables de toutes les infractions : abandon du principe de spécialité de la responsabilité des personnes morales.
[...] En pratique la jurisprudence apprécie de manière assez souple la nécessité d'une infraction commise pour le compte de la personne morale afin d'engager la responsabilité de cette dernière De la même manière la jurisprudence apprécie de manière souple la nécessité d'une l'infraction commise par un organe ou un représentant A. Appréciation large d'une infraction commise pour le compte de la personne morale L'infraction peut être commise au nom et dans l'intérêt de la personne morale ; dans une telle hypothèse il faut prendre en compte la finalité de l'infraction ou le résultat escompté pour la personne morale. [...]
[...] Cette solution a été confirmée dans un arrêt de la chambre criminelle de la cour de cassation du 11 avril 2012 qui revient effectivement à plus de rigueur : retour à la solution traditionnelle : nécessité de caractériser une infraction commise par un organe ou représentant, et non plus une simple présomption pour engager la responsabilité pénale de la personne morale. Ainsi l'arrêt de la chambre criminelle du 16 mars 2010, s'inscrit dans la jurisprudence antérieure au revirement de jurisprudence du 11 octobre 2011 : les juges admettent en effet une simple présomption de commission de l'infraction par un organe ou représentant pour engager la responsabilité pénale de la personne morale, la cour de cassation dans cet arrêt juge en effet que lorsque les circonstances de fait établissent que l'infraction n'a pu être commise que par un organe ou un représentant de la personne morale, cette interprétation faite par les juges est conforme à la jurisprudence antérieure : Cass, crim juin 2006. [...]
[...] Or sur le fondement de l'article 221-6, les juges auraient pu engager la responsabilité de l'employeur pour manquement à une obligation de sécurité. Ainsi la personne physique et la personne morale auraient pu être condamné pour la même infraction. Dans ce cas d'espèce, il ne s'agit pas d'une hypothèse où la responsabilité du dirigeant est trop diffuse pour le déresponsabiliser, ainsi la cour de cassation semble avoir une appréciation trop diffuse de l'infraction du dirigeant afin de n'engager que la responsabilité pénale de la personne morale. [...]
[...] C'est la loi du 12 mai 2009 dite de simplification du droit, qui a allongé la liste des infractions pour lesquelles les peines complémentaires de l'article 131-39 peuvent être prononcées. Ainsi la personne morale peut être frappée d'une interdiction d'exercer, d'une fermeture d'établissement, d'une confiscation ou même de la dissolution. Le législateur prévoit également un grand nombre de sanctions économiques au titre de conséquences de la responsabilité pénale des personnes morales. En l'espèce, seule une peine d'amende est prononcée à l'encontre de la société pour homicide involontaire. [...]
[...] Les conséquences non conformes à l'engagement de la responsabilité pénale de la personne morale La peine encourue par la société, personne morale est non conforme au texte pénal et celle-ci exempte de condamnation la personne physique ayant commis une infraction . A. Une peine encourue non conforme au texte En cas de condamnation de la personne morale, et donc d'engagement de sa responsabilité pénale le juge doit classiquement lui prononcer une peine. Le code pénal de 1994 prévoit une multiplicité de sanctions à l'encontre des personnes morales. Notamment parmi ces peines, les personens morales encourrent une peine d'amende du quintuple de celle encourue par les personnes physiques. [...]
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