Commentaire, arrêt, Chambre, criminelle, 16 juillet 1997
La détention provisoire est l'un des sujets les plus sensibles de la procédure pénale contemporaine en ce qu'elle touche à la liberté individuelle. D'ailleurs, toutes les dernières grandes réformes de la procédure pénale s'y sont intéressées à des degrés divers bien sûr. Il n'en reste pas moins que la loi n'en donne pas de définition, mais il est possible de s'accorder à dire que c'est l'incarcération en maison d'arrêt d'une personne mise en examen, pendant tout ou partie de l'instruction préparatoire, et éventuellement jusqu'à ce qu'un jugement sur le fond soit rendu (définition de Jean Pradel). C'est donc une mesure temporaire, privative de liberté, susceptible de concerner les personnes suspectées d'avoir participer à une entreprise criminelle, plus précisément, un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans. Tout le débat autour de la détention provisoire tient au fait que son régime doit concilier des intérêts antagonistes : celui de la bonne justice, de la préservation de l'ordre public, et de la satisfaction de l'opinion publique qui imposent ou tout du moins rendent utiles l'incarcération du mis en examen d'une part, et celui des grands principes de liberté individuelle et présomption d'innocence rappelés sans cesse aussi bien par le droit international, que le droit européen, et le droit interne, et puis, il faut le mentionner, la surpopulation carcérale d'autre part, qui eux imposent une limitation des mesures de détention provisoire. C'est justement parce qu'elle est contraire à ces principes directeurs de la procédure pénale que l'article 137 du code de procédure pénale rappelle le principe "toute personne mise en examen, présumée innocente, demeure libre". Toutefois, aussitôt, il ajoute qu'il peut y être porté atteinte "en raison des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté". Ainsi, la détention provisoire n'est qu'une exception, et c'est bien ce que se borne à affirmer la chambre criminelle de la Cour de cassation dans sa jurisprudence. Cela transparaît notamment dans l'arrêt du 16 juillet 1997 ici présenté, arrêt de principe.
[...] Dans l'arrêt du 16 juillet 1997, l'attendu de principe précise bien que la détention provisoire est prescrit par une ordonnance motivée. En l'espèce, la chambre d'accusation notait bien que la détention provisoire de la personne mise en examen s'imposait en vertu de l'article 144 du Code de procédure pénale, puisque l'un des objectifs prévu par la loi était applicable à l'espèce, à savoir la gravité des faits et le trouble à l'ordre public engendré. D'ailleurs, la Haute cour ne casse pas sa décision en se fondant sur le défaut de motivation générale par rapport à l'article 144 du Code de procédure pénale, mais bien sur celui de l'absence de motivation spéciale par rapport au caractère insuffisant du contrôle judiciaire, qui est un élément de motivation supplémentaire imposé par la loi depuis 1996. [...]
[...] Ce mouvement visant à la subsidiarité de la détention provisoire est encore d'actualité aujourd'hui, car il est vrai que malgré toutes les mesures prises en ce sens, le nombre de détention provisoire est toujours conséquent. Ainsi, depuis la loi pénitentiaire du 24 nombre 2009 ayant instauré l'assignation à résidence dans le cadre de la phase préparatoire du procès pénal, le juge doit maintenant motiver le placement en détention provisoire aussi par rapport à l'insuffisance de l'assignation à résidence. La Cour de cassation s'attache d'ailleurs a rappelé que « la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs définis par l'article susvisé et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou par une assignation à résidence avec surveillance électronique » dans plusieurs arrêt récents, notamment rendu le 12 octobre 2010, ou encore le 13 octobre 2010 (notons que sa coule de source car le prononcé de l'assignation à résidence est subordonné lui même à la preuve de l'insuffisance du contrôle judiciaire). [...]
[...] Le juge devait-il préciser pour toutes les obligations, une par une, qu'elle n'était pas adaptée? Il faut préciser que la liste de l'article 138 du code de procédure pénale prévoyant les 16 obligations dont le contrôle judiciaire est susceptible d'être assorti est limitative en vertu du principe de légalité. Ainsi, une telle motivation peut paraître lourde, mais elle est concevable. Toutefois, la circulaire de la Direction des affaires criminelles et des grâces du 3 mars 1997 commentant la loi du 30 décembre 1996 précitée précise que telle n'est pas la solution retenue : une motivation générale suffit. [...]
[...] L'insuffisance des mesures du contrôle judiciaire est ainsi érigée par la loi et par la jurisprudence comme une condition de fond du placement en détention provisoire. L'obligation de motivation spéciale par rapport au contrôle judiciaire a pour conséquence d'obliger les magistrats à motiver davantage et de façon plus précise leur décision, et aussi, de limiter le nombre des détentions provisoires, ou en tout cas c'est l'objectif. Le juge décidant le placement en détention provisoire, c'est à dire, la plus part du temps et ce depuis la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence, le Juge des Libertés et de la Détention, doit doublement motiver sa décision par rapport aux objectifs de l'article 144 et au caractère insuffisant du contrôle judiciaire Si l'objectif de l'exigence d'une motivation spéciale semble apparaître clairement, à savoir réduire le nombre de détention provisoire; le contenu de cette motivation en beaucoup moins explicite, et la Haute cour ne donne ici aucune information (II). [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Chambre criminelle 16 juillet 1997 INTRODUCTION La détention provisoire est l'un des sujets les plus sensibles de la procédure pénale contemporaine en ce qu'elle touche à la liberté individuelle. D'ailleurs, toutes les dernières grandes réformes de la procédure pénale s'y sont intéressées à des degrés divers bien sûr. Il n'en reste pas moins que la loi n'en donne pas de définition, mais il est possible de s'accorder à dire que c'est l'incarcération en maison d'arrêt d'une personne mise en examen, pendant tout ou partie de l'instruction préparatoire, et éventuellement jusqu'à ce qu'un jugement sur le fond soit rendu (définition de Jean Pradel). [...]
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