Commentaire de l'arrêt du 17 février 2004, de la Cour de Cassation, de sa première chambre civile, en droit international privé
Traditionnellement, il est de principe que les répudiations prononcées en France, fût-ce par des autorités étrangères, sont dépourvues d'effet devant le juge français. Mais qu'en est-il des répudiations prononcées à l'étranger ? Tel est le thème de cet arrêt du 17 février 2004, qui s'inscrit dans un courant jurisprudentiel de plus en plus hostile à l'accueil des répudiations étrangères :
I/ Le rejet des répudiations unilatérales de la femme par le mari?
II/?motivé par la contrariété au principe d'égalité des époux.
[...] C'est dans un tel contexte, que la cour de cassation est ici confrontée au problème de la définition de la conception française de l'Ordre Public International telle qu'elle doit être mise en œuvre par les juridictions françaises lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la reconnaissance en France d'un divorce étranger prononcé sur répudiation unilatérale par le mari. Les faits de l'espèces sont les suivants : un homme et une femme de nationalité étrangère se marient en Algérie en 1985. En novembre 1997, le mari introduit une demande en divorce devant le tribunal algérien. En janvier 1998, la femme présente une requête en divorce devant le juge français. Le mari soulève alors l'exception de litispendance internationale, en raison de l'instance en divorce pendante devant le tribunal de Sidi M'hamed ( Algérie ) depuis novembre 1997. [...]
[...] Dès lors, la décision du tribunal algérien doit recevoir exequatur et produire ses effets en France. Mais la cour de Cassation rompt avec l'arrêt Douibi et approuve la cour d'appel en estimant que bien que la décision constatant la répudiation unilatérale du mari soit loyale et contradictoire, celle ci ne peut recevoir exequatur en France. refus d'exequatur d'un divorce prononcé sur répudiation unilatérale La cour de cassation refuse de reconnaître la décision du tribunal algérien car cette décision a été prononcée, malgré l'opposition de la femme, au seul motif que le pouvoir conjugal reste entre les mains de l'époux et le divorce doit être prononcé sur la seule volonté de celui-ci» La femme n'a donc ni aucun droit d'agir, et ses prétendus droits de défense sont illusoires : elle ne peut jamais s'opposer, empêcher ni gagner une répudiation. [...]
[...] Ce n'est pas tant le caractère unilatéral de la répudiation ( qui peut être assimilé au divorce pour rupture de la vie commune ) qui pose problème mais son caractère machiste : c'est une possibilité offerte qu'au mari, donc c'est inégalitaire. La femme n'a pas cette possibilité. C'est ce qui choque la cour de cassation, qui estime que cette inégalité est contraire au principe d'égalité entre les époux. La répudiation est un rejet de la femme par le mari. En outre, les juridictions étrangères saisies pour proclamer un divorce par répudiation n'ont aucun contrôle et aucun pouvoir de décision, elles ne font que constater la répudiation et n'interviennent que pour fixer le montant de l'indemnité à verser à l'épouse. [...]
[...] Il y a un déséquilibre dans le droit à agir puisqu'elles ne peuvent pas répudier leur mari. Avec cet arrêt, la CEDH permet de définir les exigences de l'ordre public international. La cour de Cassation s'est fondée de façon exclusive sur le principe d'égalité des époux. C'est par nature que l'institution est contraire à l'ordre public International, qui intègre les principes défendus dans la CEDH. Cet arrêt redessine les contours de l'ordre public international qui intègre désormais les principes et droits reconnus par la CEDH. [...]
[...] D'un côté, elle montre que les arrêts du 17 février 2004 sont dans le droit-fil de la ligne jurisprudentielle initiée en 1994. D'un autre côté, cet appui donne un fondement textuel et rationnel à la mise à l'écart de la Convention franco-algérienne de 1964. C'est, enfin, le moyen de répondre à la critique assez facile arguant du caractère nationaliste de la solution retenue. La protection des droits de l'homme procède de l'intégration des valeurs fondamentales dans l'ordre public international. C'est bien ce qui résulte de la formulation de l'arrêt. [...]
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