Commentaire d'arrêt Civ. 1ère, 6 février 1985, Simitch, en matière d'exequatur. Note: 15/20
L?accueil des jugements étrangers par les juridictions françaises a fait l?objet d?une longue évolution: d?abord subordonné à la révision du fond, cet accueil va ensuite porter uniquement sur quelques conditions de régularité. La reconnaissance et l?exécution en France des décisions étrangères, en l?absence de conventions bilatérales ou de règlements communautaires, sont alors soumises aux conditions posées par l?arrêt Munzer (Civ. 7 janvier 1964). C?est dans ce cadre qu?intervient l?arrêt Simitch, rendu le 6 février 1985 par la Première Chambre civile de la Cour de cassation.
I. La consécration d?un système qui se veut souple
II. Une solution attendue et influente
[...] Cʼ'est par conséquent la fin de lʼ'extension des règles de compétence internes aux situations de compétence internationale, la fin de la bilatéralisation. Cette invention nʼ'est bien entendu pas apparue soudainement le 6 février 1985. La doctrine, en partie, avait appuyé cette idée et contribué à la maturation dʼ'une telle solution, et elle a joué un rôle déterminant jusquʼ'à sa consécration (notamment D.Holleaux, Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements). Parallèlement, les tribunaux avaient déjà ouvert une voie favorable à la reconnaissance simplifiée de la compétence internationale (Paris nov Mars Truck; 5 Mars 1976, Giroux). [...]
[...] Retenons néanmoins que selon la formulation de lʼ'arrêt Simitch, la fraude en matière de jugements apparaît désormais comme une déloyauté procédurale. Cependant, lʼ'apport essentiel de lʼ'arrêt, en dehors de lʼ'exigence dʼ'un lien caractérisé, porte sur lʼ'absence de compétence exclusive. Il sʼ'agit du premier des trois critères: si une compétence exclusive des juridictions françaises est constatée, lʼ'incompétence internationale du juge étranger sera relevée sans quʼ'une étude des deux autres critères ne soit nécessaire. Avant lʼ'arrêt Simitch, la Cour avait une conception particulièrement large de cette compétence exclusive, puisquʼ'elle considérait comme telle tout compétence française (par exemple, tribunal du domicile du défendeur, Civ 5 mai 1962). [...]
[...] La procédure est simplifiée, le contrôle formel, le résultat plus rapide. Le Règlement Bruxelles IIbis est orienté de manière semblable. Le professeur Gaudemet-Tallon nʼ'exclut pourtant pas une adaptation de la jurisprudence Simitch à lʼ'échelon communautaire en matière successorale, hypothèse quʼ'elle qualifie de raisonnable, ceci à une nuance près: “aucun chef de compétence connu par le droit national ne devrait être considéré comme un chef de compétence exclusive.” Selon elle, les compétences exclusives nʼ'ont, semble-t-il, plus leur place dans lʼ'Union européenne. [...]
[...] Par la suite, lʼ'arrêt Bachir (Civ 1ère octobre 1967) intégrera le contrôle de la régularité procédurale à celui de lʼ'ordre public. De cinq conditions historiques, on est passé à quatre, puis trois en 2007 avec lʼ'arrêt Cornelissen, qui évacue la condition de compétence législative. La libéralisation progressive franchit donc un nouveau palier avec lʼ'arrêt Simitch, qui opère un choix congruent avec cette évolution, et écarte les options protectionnistes. Le débat traditionnel auquel cette décision a mis un terme offrait plusieurs alternatives: le juge français devait-il exiger que le juge originel se déclare incompétent sur les bases dʼ'un critère français ou bien devait-il uniquement vérifier la bonne application par le juge dʼ'origine de ses propres critères? [...]
[...] Cʼ'est dans ce cadre quʼ'intervient lʼ'arrêt Simitch, rendu le 6 février 1985 par la Première Chambre civile de la Cour de cassation. En lʼ'espèce, le divorce entre un américain et une britannique avait été prononcé à Londres. Cette dernière, ayant obtenu lʼ'allocation dʼ'une pension alimentaire à titre de mesure provisoire, demanda lʼ'exequatur de la décision en France. Le tribunal de Paris y fait droit, mais ce jugement est réformé par la Cour dʼ'appel le 5 novembre 1982 au motif de lʼ'incompétence du juge étranger: est de principe que la compétence juridictionnelle internationale est déterminée par lʼ'extension des règles de compétence territoriale interne” . [...]
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