Droit fiscal, imposition, cotisation sociale, norme constitutionnelle, normes communautaires, sécurité sociale
Depuis plusieurs années, le déficit de la sécurité sociale appelé communément « le trou de la sécu » est à l'origine de nouveaux prélèvements pour financer la protection sociale. La qualification juridique de ces prélèvements entraîne de nombreuses conséquences quant à leur régime.
Ces prélèvements prennent essentiellement deux formes : la forme d'un impôt qui selon le manuel de Ludovic AYRAULT est un prélèvement pécuniaire, de caractère obligatoire, effectué en vertu de prérogatives de puissance publique, à titre définitif, sans contrepartie déterminée, en vue d'assurer le financement des charges publiques de l'Etat, des collectivités territoriales, et des établissements publics administratifs ; ou bien la forme de cotisations sociales qui selon une définition historique sont des cotisations de sécurité sociale, de caractère obligatoire, affectées au financement des régimes de sécurité sociale mis en place à partir de l'ordonnance n°45-2250 du 4 octobre 1945. La différence entre ces deux catégories de prélèvements repose sur le droit à une contrepartie : dans le cas d'une cotisation sociale, celle-ci ouvre un droit à des prestations de sécurité sociale ; dans le cas de l'impôt, aucune contrepartie n'est identifiable.
[...] Est-ce à dire pour autant que la catégorie des cotisations sociales n'a pas à respecter une certaine égalité ? Vraisemblablement non car l'autorité réglementaire fixe le taux des cotisations après négociation avec les partenaires sociaux et l'on peut légitimement penser que cette négociation prend en compte tous les types de revenus. Néanmoins, on peut affirmer que l'égalité que doit respecter la catégorie des impositions de toutes natures a une valeur juridique bien plus grande ; dans le cas d'une omission de ce principe pour une cotisation sociale, le Conseil constitutionnel ne saurait brandir la menace de la censure sur ce fondement. [...]
[...] On peut d'ores et déjà se demander si la création de cotisations sociales relève de la compétence du législateur. La réponse est positive puisque l'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux de la sécurité sociale ». Reste que concernant les impositions de toutes natures, l'article 34 parle de loi qui « fixe les règles » et non simplement de « principes fondamentaux ». Il en résulte donc que dans le cadre de la création d'impositions de toutes natures, le législateur est tenu de fixer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement sans avoir la possibilité de renvoyer cette tâche au pouvoir réglementaire auquel cas la loi sera entachée d'un vice d'incompétence négative c'est-à-dire que le législateur n'aura pas exercé les pouvoirs qui lui ont été conférés par la Constitution. [...]
[...] L'interprétation contestable de la décision du Conseil constitutionnel en 1990, le « culot » de la CJCE, la violation par la Cour de cassation de l'article 62 de la Constitution créent de la confusion si bien qu'aujourd'hui on n'arrive plus à savoir dans quelle catégorie de prélèvement se rangent la CSG et la CRDS. [...]
[...] En réalité, c'est la décision du Conseil constitutionnel de 1990 et la création de la CRDS en 1996 qui créent de la confusion. Car ces prélèvements ont été institués dans le but de financer la protection sociale, ces deux prélèvements comportent même le mot « social » dans leur acronyme ; cependant, « l'hypocrisie » reste de mise. On veut penser que ces prélèvements n'ouvrent droit à aucune contrepartie, ce qui est vrai juridiquement. Face au poids du droit communautaire aujourd'hui et à l'autorité de plus en plus forte de la CJUE (anciennement CJCE), la Haute Juridiction judiciaire s'est alignée sur la position de la CJCE avec un premier arrêt le 5 avril 2001 Société Ideal Fibers URSSAF de Lille et un second le 31 mai 2012 Esso Kalfon après que la CJCE ait maintenu la solution de son arrêt de 2000 dans un nouvel arrêt en date du 3 Avril 2008 Philippe DEROUIN. [...]
[...] On peut y voir également une soumission de la Constitution par rapport aux normes internationales. Concernant le droit communautaire, on sait que depuis 2004, le Conseil constitutionnel refuse de contrôler une loi transposant une directive à la Constitution pour éviter de confronter la directive à la Constitution. Tout ceci suffit à réduire l'autorité de la Constitution et du Conseil constitutionnel dans l'interprétation de certaines normes. C'est ce qui a été le cas pour la CSG et de la CRDS où la CJCE s'est permise de contredire la solution du Conseil constitutionnel français. [...]
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