Articulation article 209 B CGI abus de droit CE 27 juillet 2009 Société Conforama Holding
Les critères de la fraude à la loi dégagés dans le célèbre arrêt « Janfin » ont été étendus à la notion d'abus de droit elle-même par la décision « Pharmacie des Chalonges » du 5 mars 2007, avant d'être consacrés par la loi de finances rectificative pour 2008. Restait pour le Conseil d'Etat à mettre en oeuvre ces principes encore relativement nouveaux dans des hypothèses déjà éprouvées, comme l'illustre cet arrêt du Conseil d'Etat « Société Conforama Holding » du 27 juillet 2009.
En l'espèce, une société avait fait l'acquisition de 6,66 % du capital d'une holding de droit luxembourgeois et avait, ensuite, perçu des dividendes de cette dernière qu'elle avait retranchés de son bénéfice net imposable, déduction faite d'une quote-part de frais et charges, en se prévalant du régime de faveur des sociétés mères et filiales. A l'issue de deux vérifications de comptabilité, l'administration fiscale avait mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit et avait réintégré dans la base imposable à l'impôt sur les sociétés les dividendes en cause, au motif que la société avait participé à un montage délibéré ayant pour seul but leur défiscalisation. La cour administrative d'appel de Paris, dans une décision du 22 mai 2006, confirmant en cela le tribunal administratif de Melun, avait rejeté la requête de la société tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés résultant de ce redressement. Celle-ci se pourvoyait donc devant le Conseil d'Etat.
[...] Le Conseil d'Etat se base en effet sur la disposition légale antérieure à la réforme, puis interprète la notion d'abus de droit conformément à sa jurisprudence cette fois la plus récente. Ainsi, il est mentionné que l'abus de droit ne trouve à s'appliquer que si les actes passés par le contribuable recherchent le bénéfice d'une application littérale des textes. Or en l'espèce il est clair que le Conseil d'Etat ne vérifie pas cette contrariété. Il aurait pu par exemple rechercher dans les travaux parlementaires de la loi ayant instauré le régime des sociétés mères, si celui-ci était effectivement subordonné à l'imposition préalable des bénéfices de la filiale. [...]
[...] La prudence incite toutefois là encore à considérer que le Conseil d'État n'a pas été invité par la société requérante à vérifier le critère de l'implantation réelle et qu'il s'est donc abstenu de procéder à pareille analyse. [...]
[...] On peut observer par ailleurs que l'arrêt vient valider la conformité de la jurisprudence française à celle de la Cour de de justice A – L'absence de recherche de contrariété à la volonté des auteurs du texte : le caractère fictif, critère autonome de l'abus de droit ? Comme nous l'avons vu, le Conseil d'Etat voit un abus de droit lorsque l'acquisition de la participation ne présente aucun intérêt autre que l'avantage fiscal retiré. Il reprend à cet égard les critères dégagés dans la décision « Sagal » précitée, qui s'appuyait elle sur l'ancienne définition de l'abus de droit, c'est-à-dire celle qui avait cours avant la réforme de 2008. [...]
[...] Le droit communautaire paraît lui clairement pencher en faveur de la première. De manière classique, il dispose que lorsque l'abus d'une liberté communautaire est en cause, il appartient à celui qui l'allègue d'en démontrer l'existence. Là encore, le Conseil d'Etat tranche en faveur de la conformité au droit européen, puisqu'en l'espèce il semble bien que c'était à l'administration qu'il revenait d'apporter la preuve du caractère artificiel du montage. On peut cependant noter que le Conseil d'État, dans ses décisions postérieures à l'arrêt « Cadbury Schweppes », n'a pas expressément retenu comme indices de la « non-substance » les éléments afférents à l'implantation réelle de la société (locaux, personnel, équipements), alors qu'il paraîtrait cohérent qu'il se prête à l'analyse de ce critère dans le prolongement de la jurisprudence de la CJUE. [...]
[...] B – La caractérisation du recours à un montage juridique et économique artificiel. L'application du régime mère fille des articles 145 et 216 du CGI permet de retrancher du bénéfice total de la société mère les produits nets d'une participation dans une autre société. L'article 209 qui prévoit quant à lui qu'une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés possédant des participations dans une société établie dans un Etat étranger à fiscalité privilégiée est soumise à l'IS sur les résultats bénéficiaires de cette société, ne s'applique qu'à compter d'un seuil de détention qui était de avant la loi de finances pour 2005. [...]
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