Conseil d'État, 26 mars 2008, 22 janvier 2010, impact fiscal, coup d'accordéon
Le législateur prévoit un régime d'imposition particulier concernant les PV ou MV dégagées à l'occasion de cessions de titres de participation, reposant notamment sur la distinction PV/MV CT ou LT. Il revint à la jurisprudence d'en préciser les modalités d'application dans l'hypothèse où une opération dite « coup d'accordéon » précédait la cession. Employée par les entreprises qui connaissent des pertes conduisant à un niveau de capitaux propres insuffisant, cette technique consiste à réduire le capital social, dans un premier temps, afin d'apurer le passif de la société, et, à l'augmenter consécutivement en émettant de nouvelles actions. Cette opération posa notamment problème pour calculer le montant des PV/MV imposables et déterminer le délai de détention des titres en cas de cession ultérieure. Si aujourd'hui des questions restent encore en suspens, deux jurisprudences du Conseil d'Etat apportèrent des précisions majeures en la matière.
[...] En matière d'abandon de créance pour des motifs financiers (remarque : l'abandon n'est entièrement déductible que dans la mesure où il est justifié par des motifs commerciaux : CE novembre 1981 ; sauf s'il peut être considéré comme un élément du prix d'acquisition des titres de la société qui bénéficie de cet abandon : CE octobre 1982), la décision du Conseil d'Etat du 30 avril 1980 pose un principe : le prix de revient des titres est augmenté à concurrence du montant de cet abandon, lequel n'est pas déductible, retenu dans la proportion du taux de participation détenu par la société mère. C'est en vertu d'une interprétation réaliste sur le plan économique que l'arrêt SA Financière Fauvernier fait application de cette jurisprudence. La prise en compte du montant de la souscription à l'augmentation de capital dans le cadre du calcul de la moins-value. Selon l'article 38 quinquies du CGI, le prix de revient est constitué par la « valeur d'origine » des titres, c'est-à-dire leur coût d'acquisition. [...]
[...] Impact fiscal : la dualité des régimes d'imposition appliqués à l'occasion d'une même cession de titres. L'application de taux différents à l'occasion d'une même cession générant des plus-values. Le régime des plus-values diffère lui aussi en fonction que l'on soit en présence d'une plus-value à long terme ou à court terme. Ainsi, selon le droit en vigueur au moment des faits, le taux d'imposition des plus-values à court termes étaient de 34% alors que les plus-values à long-termes étaient imposées au taux de 19%. [...]
[...] Comme le rappel le rapporteur public, Mme Escaut, dans ses conclusions, les différences factuelles n'étaient toutefois pas de nature à contrarier le raisonnement suivi par le Conseil d'Etat dans la première affaire. La première différence réside dans le fait qu'il y ait eu deux coups d'accordéon au lieu d'un seul, ce qui n'a pas d'impact sur la prise en compte ou non des titres acquis lors de l'augmentation de capital dans le cadre du « coup d'accordéon ». Il en va de même concernant les modalités de paiement en numéraire et non en abandon de créance. [...]
[...] L'idée : si on admet qu'une partie de la moins-value puisse être qualifiée de « court-terme » du seul fait qu'un coup d'accordéon soit intervenu moins de deux ans avant la cession des titres, comment empêcher que, par la suite, le contribuable ne soit pas tenter de procéder à une telle opération dans l'unique dessein de réaliser des économies fiscales, court-circuitant artificiellement la frontière du délai de deux ans instauré par le législateur. A cet argument nous répondrons tout d'abord par des considérations de faits puisque, dans les espèces étudiées, l'opération du « coup d'accordéon » était, au moins principalement, si ce n'est exclusivement, motivée par l'apurement des pertes. Cette motivation est essentiellement d'ordre économique. Elle permet rassurer banques et investisseurs de la société et de revaloriser l'image de cette dernière, servant donc l'intérêt social. [...]
[...] Les cessions de titres ayant fait l'objet d'un « coup d'accordéon » doivent-elles être regardées comme portant exclusivement sur les titres initialement acquis ou comme englobant les titres acquis lors de l'augmentation de capital ? L'opération du « coup d'accordéon » impact-il la détermination de la durée de possession des titres et par là-même la détermination du régime applicable (court-terme ou long-terme) ? Dans ses arrêts des 26 mars 2008 et 22 janvier 2010, le Conseil d'Etat façonne une ligne jurisprudentielle favorable au principe de réalité économique et en tire des conséquences concrètes sur le plan fiscal (II). [...]
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