Droit de l'Union européenne, personnes publiques, contrat in house, quasi-régie, législateur communautaire
Par contrat in house, il faut comprendre les contrats dans lesquels la dépendance du cocontractant par rapport à l'entité adjudicatrice est suffisamment forte pour que leur passation ne soit pas assujettie tant aux règles communautaires de la concurrence qu'aux règles internes prises en application de ces dernières. Le régime in house a été en très grande partie construit par la Cour de justice des communautés européennes, aujourd'hui Cour de justice de l'Union européenne.
[...] Pour que le cocontractant en cause ne soit pas reconnu comme « tiers », le juge précise que celui-ci doit gérer exclusivement la mission attribuée par le pouvoir adjudicateur, « sous réser d'une diversification purement accessoire » (reprenant ainsi l'arrêt de la CJCE du 11 mai 2006, aff. C-340/04, Carbotermo SpA), et doit être soumis à « un contrôle comparable à celui qu'elles [les collectivités publiques] exercent sur leurs propres services ». De même, l'appréciation restrictive par la Cour de la condition du contrôle analogue, amorcée par l'arrêt Stadt Halle de 2005, a trouvé écho dans la jurisprudence interne. [...]
[...] Toutefois, force est de constater que des points de clivage subsistent entre cours interne et communautaire. Comme vu précédemment, dans son arrêt Commission Italie de 2008, le juge communautaire s'efforce de canaliser son examen du capital de l'opérateur dédié conformément à l'exigence de sécurité juridique. Il limite son contrôle au seul moment de l'attribution du contrat, à moins que des « circonstances particulières » révèlent un détournement de pouvoir par la personne publique lors du montage contractuel, auquel cas il pousse son contrôle à des phases ultérieures à l'attribution de la prestation. [...]
[...] Toutefois, une telle reconnaissance par les textes communautaires, aurait, au mieux, pour mérite une meilleure lisibilité du régime in house, qui n'est prévu pour le moment que par la Cour de justice, et qui n'a été consacré par le législateur que dans le domaine des transports publics. De même, cela permettrait d'avoir une certaine cohérence entre institutions dans l'affirmation de la compatibilité de cet outil avec la logique de construction du marché intérieur, laquelle n'implique pas que toutes les prestations conclues par les personnes publiques soient soumises aux règles de mise en concurrence. Le juge communautaire disposerait ainsi d'un fondement textuel pour reconnaître une telle dérogation aux règles de mise en concurrence. [...]
[...] La consécration dans le domaine des transports publics terrestres laisse toutefois ouverte la question d'une reconnaissance par le législateur communautaire de ces prestations in house à d'autres domaines. De ce point de vue, le régime des transports publics terrestres n'est pas appréhendé en droit de l'Union de la même manière que les autres activités économiques. Le règlement OSP est une lex specialis en ce qu'il développe un article du droit primaire – l'article 93 TFUE inséré dans le Titre VI intitulé « Les transports » – qui constitue lui-même une dérogation aux règles du traité puisqu'il prévoit que les aides qui ont pour objet le remboursement de certaines servitudes inhérentes à la notion de service public sont compatibles avec le traité, alors que l'article 107 § 1 TFUE pose au contraire le principe d'une incompatibilité des aides. [...]
[...] Néanmoins, une modification des différents textes communautaires qui organisent la passation des contrats administratifs n'aurait en réalité qu'une portée simplement formelle, symbolique. En effet, l'ordre juridique communautaire a ceci de spécifique que le juge s'avère en réalité « quasi-législateur » dans la mesure où il est soit « législateur d'appoint », soit « législateur de substitution ». De même qu'elle n'a pas attendu que les rédacteurs du traité consacrent le principe de primauté du droit communautaire pour dégager un tel principe, ou qu'ils lui donnent compétence en matière de protection des droits fondamentaux pour mettre en place un tel catalogue jurisprudentiel, la Cour n'a pas attendu que le législateur communautaire consacre le contrat in house pour dégager son arrêt Teckal. [...]
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