Commentaire d'arrêt, Grande chambre, CEDH, 12 juillet 2001, Ferrazzini contre Italie, impôt, Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme
Historiquement, l'impôt se trouve être au cœur des compétences détenues souverainement par les Etats. En effet, la question de l'impôt se trouve très fortement liée à la notion de souveraineté dans la mesure où seul l'Etat peut légitimement percevoir l'impôt. Néanmoins, le développement contemporain du droit international vient interférer dans le régime fiscal, notamment la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme (CESDH) signée en 1950 dans le cadre du Conseil de l'Europe. Dans cette Convention, nombreux sont les articles qui ne concernent qu'indirectement la matière fiscale. Cependant, il est deux stipulations qui intéressent directement la fiscalité. En effet, l'article 6 § 1 énonce le principe selon lequel toute personne a droit d'accès à un tribunal indépendant et impartial, que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable et que ce tribunal « décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale ». Le champ d'application de cet article en matière fiscale a été longtemps source d'interrogations. Si son applicabilité au versant pénal est reconnue, par assimilation des sanctions fiscales et administratives aux sanctions pénales, l'applicabilité au versant civil pose des problèmes.
[...] En effet, la Convention est soumise à l'interprétation de la Cour La solution apportée par la Cour peut être regardée comme une décision d'opportunité dans la mesure où elle peut être considérée comme étant contraire aux missions traditionnelles de la Cour A. Une souplesse dans l'interprétation de la Convention La Convention ne donne pas de définition de la notion de « droits et obligations de caractère civil ». Elle laisse alors le champ libre à la Cour dans l'interprétation de cette notion. [...]
[...] Dans cette Convention, nombreux sont les articles qui ne concernent qu'indirectement la matière fiscale. Cependant, il est deux stipulations qui intéressent directement la fiscalité. En effet, l'article 6 § 1 énonce le principe selon lequel toute personne a droit d'accès à un tribunal indépendant et impartial, que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable et que ce tribunal « décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale ». [...]
[...] Cette interprétation de la notion permet alors d'éviter la restriction de la portée de la protection du simple fait du vocabulaire, ou elle peut permettre à l'inverse d'écarter certaines domaines. Cette possibilité d'interprétation ouverte par référence à des notions conceptuelles permet des ajustements et des nuances. B. Une certaine contrariété avec les missions traditionnelles de la CEDH En application de cette décision, la CEDH ne s'intéresse au litige en matière fiscale que lorsque celui-ci a trait à une sanction. La contestation d'un acte d'imposition, au contraire, n'intéresse pas la Cour. [...]
[...] En effet, le gouvernement mettait en avant le rôle que remplit l'obligation fiscale dans le soutien de la politique économique nationale. La souveraineté de l'Etat et la sauvegarde des intérêts nationaux semble justifier la solution de la Cour. Le caractère public prédominant se trouve être exclusif de toute application de l'article 6 § 1 à la matière fiscale. Comme le souligne J. Maïa, ces motifs rappellent d'un point de vue historique une conception classique selon laquelle il existe un lien unissant le contribuable à la puissance publique, un lien de citoyenneté. [...]
[...] La Cour affirme l'autonomie de la notion de « droits et obligations de caractère civil ». Elle donne une interprétation plutôt restrictive dans le sens où elle écarte toute référence au droit interne de l'Etat défendeur. Elle invoque au soutien de cette solution le souci de « préserver la compatibilité avec l'objet et le but de la Convention ». Par ailleurs, la Cour a pu permettre l'extension du champ d'application dans les matières non fiscales mais relevant tout de même du droit public. [...]
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