commentaire d'arrêt, Cour de justice de l'Union européenne, 2 mai 2006, CJCE, Eurofood
En vertu de l'article 3 du Règlement 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000, la juridiction compétente pour ouvrir une procédure d'insolvabilité est celle sur laquelle se trouve le siège statutaire de la société ou, à défaut, le « centre principal de ses intérêts ». L'éclatement de la notion de « centre des intérêts principaux » du débiteur et la tentation du forum shopping qui en découle semblent aller à l'encontre des objectifs que le Règlement s'est fixés, c'est dans ce sens que la CJCE a tenté d'y remédier dans les arrêts Eurofood et Staubitz-Schreiber en explicitant certaines notions.
En l'espèce, Eurofood, société de droit irlandais dont le siège statutaire est situé à Dublin, est une filiale de la société Parmalat qui, elle, est une société de droit italienne dont le siège statutaire est situé en Italie. En décembre 2003, la société mère (la société Parmalat) est mise en procédure d'administration extraordinaire. Par la suite, une banque américaine a demandé la liquidation de la filiale (la société Eurofood) devant la cour irlandaise. Cette cour désigna un syndic pour l'ouverture de la procédure collective.
De l'autre côté, cette même filiale est placée en Italie sous administration judiciaire en février 2004. Puis, le tribunal italien prononça la mise en insolvabilité de celle-ci et se considéra compétent internationalement pour juger de la procédure collective ouverte en considération du centre des intérêts principaux de la filiale qui se trouve selon elle en Italie
Un mois plus tard, c'est au tour de la cour d'Irlande de s'estimer internationalement compétente pour s'occuper de la procédure collective de la filiale, car comme le tribunal d'Italie, elle estime que le centre des intérêts principaux se situe en Irlande et que la procédure collective s'ouvre au jour de la demande de mise en insolvabilité.
La cour d'Irlande décida donc face à ce conflit de juridiction de surseoir à statuer et de poser des questions préjudicielles à la cour de justice de l'Union européenne sur l'interprétation du règlement du 29 mai 2000.
[...] Cependant il n'y a aucune définition de la notion de centre des intérêts principaux par le règlement. La seule indication donnée par une disposition du règlement est celle qui dit qu'il s'agit lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers Le flou qui existe autour de cette notion a mené les juges nationaux à l'interpréter de manière différenciée. C'est le cas notamment du juge anglais et du juge français, comme le démontre l'affaire Daisytek de 2003.Le problème c'est que souvent le siège statutaire des entreprises correspond aussi au siège réel mais pas toujours. [...]
[...] Puis si une procédure d'insolvabilité principale ouverte dans un des États membres se déclarant compétent peut être contrôlée par une juridiction d'un autre État membre dans lequel la reconnaissance est demandée. A ce titre, il est important de présenter dans une première partie le raisonnement du juge communautaire pour régler les différends en matière d'ouverture de procédure d'insolvabilité et de compétence des tribunaux puis de s'intéresser dans une seconde partie au principe de confiance mutuelle que semble prôner le règlement (II). [...]
[...] Mais c'est l'arrêt Interedil du 20 octobre 2011 a souligné l'autonomie du principe déterminé dans l'arrêt Eurofood.Les juges précisent en effet que l'élément déterminant permettant de caractériser le centre des intérêts principaux est la localisation de l'administration centrale. Le renversement de la présomption de l'article 3 du règlement est donc possible lorsque du point de vue des tiers, le lieu de l'administration centrale d'une société ne se trouve pas au siège statutaire. Les courants jurisprudentiels nationaux ont cependant poursuivit leur interprétations antérieure, tout en se conformant à celle établie par Eurofood. [...]
[...] Puis, si une demande de mise en liquidation pouvait constituer au sens du règlement une ouverture d'une procédure d'insolvabilité comme le considère le droit irlandais. Pour les questions de forme, la cour demanda si en vertu des dispositions du règlement, une juridiction d'un autre état membre autre que celui dans lequel est situé le siège statutaire de l'entreprise et autre que celui ou l'entreprise gère habituellement ses intérêts d'une manière véritable par les tiers mais ou la procédure a été ouverte en premier lieu, est compétente pour ouvrir la procédure d'insolvabilité principale. [...]
[...] II l'émergence de conciliations des principes communautaires et nationaux Un des buts recherchés par le droit communautaire est celui de la confiance mutuelle Mais le juge communautaire n'en oublie pas pourtant le respect de l'ordre public international auquel chaque État membre est attaché A l'affirmation d'une volonté de confiance mutuelle Le juge communautaire retient que lorsque deux juridictions d'États membres différents ouvrent chacune une procédure, c'est la décision de la juridiction qui ouvre la première procédure qui devra être reconnue par tous les États membres. Il rajoute également qu'en vertu du principe de confiance mutuelle, les motifs de non reconnaissance devraient être réduits au minimum nécessaire. Ainsi le juge rajoute qu'en vertu de l'article 16 du règlement la décision doit non seulement être reconnue par les autres Etats mais en plus elle ne doit pas faire l'objet d'un contrôle de compétence par les autres États membres intéressés par la procédure. [...]
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