La notion communautaire de consultation - notion de consultation - information et consultation - directive cadre général du 11 mars 2002 - CE européen
En août 2005, c'est par la presse que les salariés de la société belge d'électricité Electrabel apprennent le rachat de la société par GDF Suez. La même chose se produit en 2007 lors du rachat de parties de la société agroalimentaire LU par Kraft Foods. Ces exemples ne cessent d'étonner dans la mesure où existe depuis longtemps une notion communautaire de consultation, qui vise à ce que les salariés soient systématiquement consultés lors des évènements affectant la vie de leur entreprise.
La notion communautaire de consultation correspond à une idée que l'on peut dégager d'un ensemble de textes communautaires intervenant dans le domaine.
Il y a d'abord la Charte sociale européenne (article 121) et la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux (point 17) qui affirment le droit à l'information et à la consultation des travailleurs. Ensuite, le droit originaire assigne le dialogue social comme l'un des objectifs de l'Union Européenne (article 151 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne, TFUE) et surtout, donne une compétence partagée à l'Union afin de légiférer en la matière (article 153 TFUE).
Sur cette base, des textes de droit dérivé ont été édictés. Dans un premier temps, la notion de consultation apparait comme un simple élément dans des directives dont l'objet principal est autre :
- 1975 : directive 75/129 sur les licenciements collectifs (devenu 98/59)
- 1977 : directive77/187 sur les transferts d'entreprise (devenu 2001/23)
- 1994 : directive 94/45 sur le Comité d'entreprise européen (devenu 2009/38)
- 2001 et 2003, directives 2001/86 et 2003/72 sur la Société européenne et la Société coopérative européenne.
Dans un second temps, la notion de consultation se trouve consacrée dans une directive propre : la directive 2002/14 en 2002.
Le Traité de Lisbonne affirme la notion en tant que droit fondamental ; la Charte communautaire des droits fondamentaux acquiert la valeur de droit originaire, ce qui donne une force juridique à l'article 27 sur le droit à l'information et à la consultation des travailleurs au sein de l'entreprise.
La définition de la notion communautaire de consultation à partir de cette multitude de textes oblige à reconnaitre l'existence de plusieurs notions. En effet, la conception retenue de la consultation diffère en fonction des textes. Il conviendrait donc de parler « des » notions de consultation... Par exemple, la directive Cadre général définit la consultation comme : "L'échange de vues et l'établissement d'un dialogue entre les représentants des travailleurs et l'employeur". De son côté, la directive CE européen donne une définition beaucoup plus détaillée, faisant référence au moment auquel cette consultation doit intervenir, l'information devant être soumise à consultation et surtout, le fait que la consultation débouche sur un avis devant être pris en compte par l'employeur.
L'exercice de définition est encore rendue complexe par le fait que le législateur communautaire a entendu, quelle que soit la notion, doter les partenaires sociaux d'un large pouvoir d'appréciation dans la définition et la mise en oeuvre de la consultation au niveau des entreprises. Ainsi, la définition de la notion est susceptible de variations importantes entre les entreprises.
La délimitation de la notion n'est donc pas aisée. Certains éléments peuvent être exclus facilement : on peut notamment affirmer avec certitude que la consultation n'implique pas un droit pour les salariés d'être représentés dans les organes de l'entreprise. Inversement, on peut inclure à la notion de consultation un élément récurrent que l'on trouve dans tous les textes : il n'y a pas de consultation sans information. L'organe consulté doit obligatoirement être mis en mesure d'exprimer un avis éclairé sur l'objet de la consultation, ce qui n'est réalisable qu'avec une information suffisante sur la question.
Bien que l'on ait du mal à cerner cette notion de consultation, et même si la notion demeure vague, on peut toutefois s'accorder sur la nécessité de la notion. La mise en place d'une obligation communautaire s'imposait d'une part pour offrir une garantie minimale aux salariés, et d'autre part pour uniformiser les conditions de concurrence à l'intérieur de la Communauté. En effet, certains Etats (not. la France et l'Allemagne avec une conception très avancée du rôle des salariés dans l'entreprise) imposaient à leurs entreprises des procédés contraignants en la matière alors que d'autres Etats mettaient de côté l'intérêt des salariés à être consultés. Par exemple, au Royaume-Uni, toute procédure de consultation reposait sur la volonté de l'employeur d'accepter ou non la présence de représentants du personnel au sein de l'entreprise. C'est sur la base de la notion communautaire de consultation que les juges européens ont pu mettre fin à ce « principe de volontariat » et juger que l'existence d'une représentation du personnel était nécessaire au sein des entreprises (arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes CJCE, 8 juin 1994, Commission c. Royaume-Uni).
En retour, la création d'obligations européennes en la matière allait soumettre les entreprises européennes à des contraintes susceptibles de les affaiblir face aux entreprises en dehors de la Communauté, bénéficiant souvent d'un encadrement étatique plus laxiste. Une telle situation conduit à mettre sur la balance deux impératifs qui constituent l'un et l'autre des droits fondamentaux au niveau européen : d'un côté assurer aux salariés une protection minimale contre le pouvoir de décision unilatéral de l'employeur, de l'autre ne pas porter une atteinte excessive à la gestion des entreprises.
Sans contester l'avancée sociale qu'a constituée la consécration de l'obligation communautaire d'information et de consultation, on peut donc se demander dans quelle mesure cette notion est marquée par la volonté du législateur européen de sauvegarder la compétitivité des entreprises européennes ?
A étudier le contenu et la mise en oeuvre de la notion communautaire de consultation, on s'aperçoit que la notion a été forgée pour prendre en compte les besoins de souplesse des entreprises européennes. Ce traitement de faveur s'exprime de deux manières. Premièrement, l'harmonisation communautaire opérée se limite finalement à des règles minimales exprimées par les différents textes. Deuxièmement, la diversité des notions ainsi que la marge de manoeuvre qui est laissée aux entreprises dans la mise en oeuvre concrète de la consultation font douter de l'existence d'une notion unique et harmonisée de consultation, qui s'imposerait à toutes les entreprises.
Il convient donc d'envisager dans un premier temps le caractère minimaliste des exigences contenues dans les notions de consultation (I.). Dans un second temps, il conviendra d'examiner l'absence de notion unique de consultation (II.).
[...] Cette volonté de laisser une part de souplesse dans la gestion des procédures de consultation apparait en outre dans l'attribution d'une autonomie aux parties dans la définition de la notion. B. La pluralité des notions due au principe d'autonomie des parties Le législateur communautaire a laissé une marge de manœuvre importante aux entreprises européennes afin qu'elles puissent aménager la notion de consultation à leur niveau. En effet, les directives prévoient, à côté de dispositions « clés » obligatoires, un champ des règles dont les parties peuvent décider par accord. On peut illustrer le propos par des exemples tirés de deux directives. [...]
[...] RODIERE Pierre, « Le “cadre général” à l'information et à la consultation des travailleurs dans l'entreprise », Sem. soc. Lamy, n°1098, p.6. « Le Comité d'entreprise européen, quel impact sur le devenir des Comités d'entreprise? » Droit social, septembre-octobre 2007, p TEYSSIÉ Bernard, « Le comité d'entreprise européen », JCP, Ed. E Études et Chron. n°416, p.1. « Le contrat dans les droits des instances européennes de représentation du personnel », Mélanges J. [...]
[...] La notion communautaire de consultation correspond à une idée que l'on peut dégager d'un ensemble de textes communautaires intervenant dans le domaine. Il y a d'abord la Charte sociale européenne (article 121) et la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux (point 17) qui affirment le droit à l'information et à la consultation des travailleurs. Ensuite, le droit originaire assigne le dialogue social comme l'un des objectifs de l'Union Européenne (article 151 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne, TFUE) et surtout, donne une compétence partagée à l'Union afin de légiférer en la matière (article 153 TFUE). [...]
[...] En effet, la conception retenue de la consultation diffère en fonction des textes. Il conviendrait donc de parler « des » notions de consultation Par exemple, la directive Cadre général définit la consultation comme : "L'échange de vues et l'établissement d'un dialogue entre les représentants des travailleurs et l'employeur". De son côté, la directive CE européen donne une définition beaucoup plus détaillée, faisant référence au moment auquel cette consultation doit intervenir, l'information devant être soumise à consultation et surtout, le fait que la consultation débouche sur un avis devant être pris en compte par l'employeur. [...]
[...] Dans la même optique, il ne prescrit pas de notion unique et absolue de consultation. II. L'absence de notion standard applicable a toutes les entreprises Le contenu de la notion de consultation varie en fonction des directives, et la directive cadre général ne parvient pas à unifier ces contenus La teneur / la substance de la consultation est également susceptible de variations à cause de l'autonomie qui est laissé aux négociateurs dans les entreprises pour la définir A. Une notion hétérogène malgré l'introduction de la directive Cadre général La directive Cadre général du 11 mars 2002, comme son nom l'indique, a pour ambition de constituer un droit commun pour la consultation. [...]
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