Principe, droit, général, portant, salaire, minimum, garanti, cassation, Conseil, Etat, 23, avril, 1982
L'article 141-2 du code du travail dispose : « Le salaire minimum de croissance assure aux salariés dont les rémunérations sont les plus faibles la garantie de leur pouvoir d'achat et une participation au développement économique de la nation. »
Une particulière, agent non-titulaire, adresse une demande auprès du maire de Toulouse afin d'obtenir un relèvement de sa rémunération sur la base du taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance. Le maire de la commune ne fait pas droit à sa demande en gardant le silence pendant 4 mois. La demanderesse se rend donc devant le tribunal administratif de Toulouse pour forcer l'exécution de sa demande, ce à quoi ledit tribunal fait droit en plus de lui octroyer une indemnité représentant la différence entre le salaire qui lui a été versé et le salaire minimum interprofessionnel de croissance. La ville de Toulouse forme un recours devant le conseil d'Etat afin d'obtenir la nullité de la décision administrative en s'appuyant sur le code du travail qui prévoit en son article 142-1 un salaire minimum pour les salariés titulaires mais ne spécifiant en rien une rémunération minimum pour les agents non titulaires ce qui est le cas de la demanderesse en l'espèce.
La décision du tribunal administratif est-elle légale ? Existe-t-il en dehors du code du travail et des lois en vigueur un principe venant consacrer un salaire minimum ? Quelle est dès lors la recevabilité de la requête de la demanderesse ? Peut-elle en sa qualité d'agent non titulaire se prévaloir du salaire minimum ? La décision du tribunal administratif venant assurée à la demanderesse un salaire minimum ainsi qu'une indemnité doit-elle être annulée ?
Le conseil d'Etat rejette le recours formé par la ville de Toulouse. Elle vient ici admettre la demande formé par la requérante en consacrant un principe de droit général visant à garantir à tous, agents titulaires comme agents non titulaires, le droit à un salaire minimum venant garantir le pouvoir d'achat. En vertu de ce principe nouvellement consacré, la décision du tribunal administratif n'a aucune vocation à être annulé. Par ailleurs, elle vient admettre l'octroi d'une indemnité, celle –ci n'entraînant pas un cumul illégal de rémunération.
[...] Les principes généraux de droit peuvent se distinguer en deux catégories : ceux de première et de seconde génération. La première génération concerne surtout l'égalité devant la loi ou les principes venant encadrer l'administration. La seconde génération de principes, selon Benoît Jeanneau, est celle qui concerne les décisions prises dans les années 70-80 où les principes dégagés concernent des points trop précis. L'arrêt « Dame Peynet » de 1973 et l'arrêt « GISTI » de 1978 sont deux exemples d'arrêts dont la portée n'est pas assez générale, ceux-ci répondant à un point trop précis concernant soit la fonction publique soit le droit des étrangers. [...]
[...] La définition d'un principe afin de répondre à un problème social. Bien que le principe général de droit visant à garantir à tous « une rémunération minimum en l'absence de dispositions plus favorables » ne soit pas la transposition directe de l'article 141-2 du Code du travail, le juge vient tout de même en tirer l'essentiel de son raisonnement face à une situation où la requérante ne pouvait se prévaloir d'un tel droit. Sans la reconnaissance de ce principe général de droit, elle n'aurait pu avoir une augmentation salariale. [...]
[...] Existe-t-il en dehors du code du travail et des lois en vigueur un principe venant consacrer un salaire minimum ? Quelle est dès lors la recevabilité de la requête de la demanderesse ? Peut-elle en sa qualité d'agent non titulaire se prévaloir du salaire minimum ? La décision du tribunal administratif venant assurée à la demanderesse un salaire minimum ainsi qu'une indemnité doit-elle être annulée ? Le conseil d'Etat rejette le recours formé par la ville de Toulouse. Elle vient ici admettre la demande formé par la requérante en consacrant un principe de droit général visant à garantir à tous, agents titulaires comme agents non titulaires, le droit à un salaire minimum venant garantir le pouvoir d'achat. [...]
[...] En revanche aucune mention n'est faite d'une quelconque réglementation visant à garantir un salaire minimum pour les travailleurs non-titulaires. Afin de répondre à ce vide juridique, le juge procède à la reconnaissance du principe général de droit visant à garantir à tous un salaire minimum, travailleurs titulaires comme non-titulaires. Le juge ne crée pas le principe, il le dégage juste de plusieurs textes concernant les agents publics, l'article 141-2 du Code du travail en tête. Il ne vient pas transposer de manière pur et simple l'article du code du travail en principe général de droit, mais érige à partir de plusieurs fondements un principe répondant au besoin de remplir un vide juridique. [...]
[...] La reconnaissance logique d'un principe face au vide du droit positif. Le juge, qu'il soit administratif ou judiciaire, doit dispenser la justice, il ne peut refuser de le faire sous aucun prétexte. Ce principe est notamment posé par l'article 4 du code civil : « le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice ». En vertu de ce principe, le juge ne saurait rester silencieux en l'espèce, quand bien même un vide du droit positif serait mis en relief. [...]
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