Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 1991, règlement intérieur, employeur, normes
Mme X a été engagée en juin 1980 par la société Unigrains. Elle fut licenciée 3 ans et demi plus tard, en janvier 1984, par son employeur qui invoque des faits fautifs survenus entre juillet et décembre 1983.
Celle-ci agit en justice, car le règlement intérieur de l'établissement indique que l'employeur ne peut pas prononcer une sanction au-delà du délai de deux mois à partir du jour où il a eu connaissance des faits reprochés. Ainsi, les faits invoqués pour le licenciement avaient été connus de l'employeur bien plus de deux mois avant cette sanction de licenciement. Donc Mme X demande devant le Conseil de Prud'hommes, puis devant la Cour d'appel, à obtenir une indemnité de licenciement ainsi que le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage. La Cour d'appel fait droit à sa demande en estimant que le licenciement a été fait sans cause réelle et sérieuse puisque les faits de moins de deux mois ne sont pas un motif sérieux de licenciement.
[...] Un salarié demandait l'annulation de la mise à pied disciplinaire de cinq jours qui lui avait été ordonnée, car le règlement intérieur de l'entreprise, qui prévoyait la possibilité d'une mise à pied, ne mentionnait toutefois pas de durée que pouvait prendre celle-ci. La Cour de cassation fait droit à la demande du salarié, car elle estime qu'une sanction ne peut pas être prononcée si elle n'existe pas dans le règlement intérieur. Cela signifierait que l'employeur ne peut pas faire ce qu'il souhaite comme il le souhaite. Il serait lui-même soumis au règlement intérieur. [...]
[...] La Cour de cassation, dans son premier attendu explique que le règlement intérieur s'applique à tous, même à l'employeur. On pourrait penser qu'elle va rejeter la demande de celui-ci au motif qu'il n'aurait pas respecté le règlement intérieur qui prévoyait de ne pas pouvoir sanctionner les faits dont il avait eu connaissance depuis plus de deux mois. Mais contre toute attente, la Cour de cassation fait l'inverse. Et c'est alors là que sa position peut paraitre justifiée. En effet, elle explique que le règlement intérieur s'applique également à l'employeur, et qu'en l'espèce il l'a respecté. [...]
[...] La Chambre sociale de la Cour de cassation, le 25 septembre 1991 a répondu que oui, le règlement intérieur s'applique également à l'employeur, et précise qu'il s'agit d'un acte règlementaire de droit privé. En outre, la Cour de cassation estime que ledit règlement intérieur qui interdisait à l'employeur de sanctionner un employé en invoquant des faits dont il avait eu connaissance depuis plus de deux mois, n'interdit pas à l'employeur de les invoquer (les faits) à l'appui d'une mesure prononcée pour des faits commis dans le délai de 2 mois la précédant La chambre sociale résonne en deux temps : d'abord elle explique l'étendue des règlements intérieurs et ensuite elle applique les principes qui viennent d'être dégagés aux faits d'espèce (II). [...]
[...] Ainsi, elle décide que l'employeur est autorisé à invoquer des faits antérieurs à deux mois pour appuyer sa décision de licenciement Néanmoins, même si cette solution parait contestable à première vue, elle trouve une justification A L'autorisation pour l'employeur d'invoquer des faits antérieurs à deux mois pour appuyer sa décision La Cour de cassation, dans son dernier attendu, estime que l'article 2 du titre 2 du règlement intérieur dispose seulement qu'aucune sanction ne peut être appliquée au-delà d'un délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance des faits, à moins que des poursuites pénales n'aient été engagées dans le même délai ; qu'une telle disposition, qui a pour effet que ces agissements ne peuvent plus donner lieu au prononcé d'une sanction, n'interdit pas à l'employeur de les invoquer à l'appui d'une mesure prononcée pour des faits commis dans le délai de 2 mois la précédant En rappelant que le règlement intérieur s'applique également à l'employeur, la Cour de cassation sanctionne la décision de la Cour d'appel qui avait décidé le licenciement était sans cause réelle ni sérieuse. En l'espèce, la Cour de cassation explique que l'employeur avait bien respecté le règlement intérieur. Sa décision de licencier Mme X n'était pas fondée sur les faits dont il avait eu connaissance depuis plus de mois, mais sur les faits qui venaient de se produire. [...]
[...] Finalement, la Cour de cassation ne fait que reprendre le critère de l'intérêt général, pour l'appliquer au règlement intérieur. Donc lorsqu'elle explique que le règlement intérieur [ ] constitue un acte réglementaire de droit privé cela signifie que le règlement intérieur est de portée générale. Et la généralité du règlement intérieur est aujourd'hui soulignée par le nouvel article L1321-1 du Code du travail. Lorsque le terme règlement intérieur est évoqué, cela ne vise pas les instructions que donne ponctuellement et individuellement l'employeur à chaque salarié, mais bien les règles qui ont vocation à agir pour tous ceux qui participent à la vie de l'entreprise. [...]
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