cour de cassation, chambre sociale, 13 octobre 2010, principe, représentativité, syndicat
La loi du 20 août 2008 a modifié les critères de représentativité du syndicat, en énonçant notamment celui du « respect des valeurs républicaines » qui se substitue à l'« attitude patriotique pendant l'occupation ». Il est revenu à la Cour de cassation de préciser l'étendue et la mise en œuvre de ce nouveau critère dans un arrêt du 13 octobre 2010.
En l'espèce, un syndicat dont les statuts datant de 1946 prônent l'abolition de l'Etat et le recours à l'action directe obtient la désignation d'un représentant de section syndicale au sein d'une société.
La société saisit alors le tribunal d'instance de Boissy-Saint-Léger d'une demande en annulation de cette désignation pour non-satisfaction du critère du respect des valeurs républicaines, en se fondant sur les statuts du syndicat.
L'employeur est débouté en première instance au motif que prôner l'abolition de l'Etat n'est pas contraire aux valeurs républicaines, de même que l'action directe qui n'est qu'une « forme de lutte décidée, mise en œuvre et gérée directement par les personnes concernées ».
La société se pourvoit alors en cassation, arguant la violation par refus d'application des articles L.2141-1 et L.2142-1-1 du code du travail par le tribunal d'instance.
[...] L'appréciation in concreto du non-respect des valeurs de la République par le syndicat sera donc étudiée en premier lien avant de s'intéresser en second lieu à la difficulté de retenir le non-respect des valeurs républicaines par le syndicat, notamment pour des raisons de charge de la preuve (II). L'appréciation in concreto du non-respect des valeurs républicaines par le syndicat : Dans son arrêt du 13 octobre 2010, la Cour de cassation rejette le pourvoi en précisant la manière dont doit être apprécié le respect des valeurs républicaines par un syndicat. [...]
[...] La jurisprudence ne permet pas non plus de préciser cette notion : en effet, la Cour de cassation ne s'est jamais aventurée à définir les valeurs républicaines et l'arrêt du 13 octobre 2010 confirme cette tendance. Toutefois, les juges du fonds n'hésitent pas à se prononcer sur ce qui est contraire ou non aux valeurs de la République. Dans la présente affaire, les juges du tribunal d'instance avaient considéré que la formation des travailleurs à l'abolition de l'Etat et l'action directe n'étaient pas contraire aux valeurs républicaines. [...]
[...] Après avoir précisé la manière dont doit être apprécié le respect des valeurs républicaines, la Cour de cassation dans son arrêt du 13 octobre 2010 met en lumière la difficulté de retenir le non-respect des valeurs de la République par le syndicat. La difficulté de retenir le non-respect des valeurs républicaines par le syndicat : La solution retenue par l'arrêt du 13 octobre 2010 entraine d'importantes difficultés pour retenir le non-respect des valeurs républicaines par le syndicat. En effet, la Cour de cassation précise clairement que la charge de la preuve doit incomber au demandeur contestant le respect des valeurs républicaines par le syndicat ; par ailleurs, l'absence prudente de définition des valeurs de la République par la Haute juridiction n'incite guère au contentieux Une charge de la preuve incombant au demandeur contestant le respect des valeurs républicaines par le syndicat : La Cour de cassation, dans l'arrêt du 13 octobre 2010, affirme que « c'est à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, des valeurs républicaines, d'apporter la preuve de sa contestation ». [...]
[...] A contrario, la jurisprudence continue d'exiger que le syndicat dont les autres critères de représentativité sont contestés apporte la preuve qu'il est représentatif ; la Cour de cassation le rappelle notamment dans un second arrêt du 8 juillet 2009, affirmant à propos du critère relatif au nombre d'adhérents que « le syndicat devait, pour établir la preuve de l'existence ou de la constitution d'une section syndicale, démontrer la présence de plusieurs adhérents dans l'entreprise ». Ce régime de la preuve contraignant pour le demandeur n'incite pas à introduire une action en justice ayant pour objet la contestation de la représentativité d'un syndicat pour son non-respect des valeurs républicaines. [...]
[...] Mais la Cour de cassation ne se prononce pas dans son arrêt sur cette conception des valeurs républicaines retenue par les juges du fonds. Ainsi, rien n'indique si un syndicat qui formerait effectivement les travailleurs à l'abolition de l'Etat et à l'action directe sans se contenter d'en faire simplement mention dans ses statuts serait considéré comme respectant ou non les valeurs de la République. Par ailleurs, les négociations menées par les partenaires sociaux sur la représentativité, le développement du dialogue social et le financement du syndicalisme ont abouti, le 9 avril 2008, à la définition d'une position commune qui proposait que la reconnaissance de la représentativité syndicale soit subordonnée à la satisfaction de sept critères, dont le respect des valeurs républicaines. [...]
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