Cour de cassation chambre sociale arrêt barman 6 octobre 2010 droit travail obligation de sécurité de résultat sécurité santé prise d'acte licenciement tabagisme code de la santé publique
Dans le but de promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, le droit de l'Union Européenne a créé une directive-cadre du 12 juin 1989, transposée en droit français par la loi du 31 décembre 1991. Ce faisant, des principes généraux de prévention ont été introduits dans le Code du Travail Français aux articles L.4121-1 et suivants, au nombre desquels figure l'obligation pour l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Cette obligation est considérée comme étant une obligation de sécurité de résultat, dont le manquement a le caractère d'une faute inexcusable (Soc., 28 fév. 2002). La responsabilité civile de l'employeur pourra alors être engagée.
En règle générale, pour caractériser le manquement de l'employeur à cette obligation, il est malheureusement fréquent que le salarié ait déjà subi un préjudice physique ou mental. Néanmoins, dans un arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de cassation du 6 octobre 2010, il est apparu que la réalisation du préjudice n'était pas une condition nécessaire pour engager la responsabilité civile de l'employeur.
[...] Surtout que l'interdiction n'étant pas absolue dans les locaux d'un bar-restaurant, il n'était pas étonnant que le salarié soit exposé aux fumées de cigarettes. En outre, le taux de nicotine dans son sang était faible, ce qui montre l'absence de préjudice. De plus, ce taux ne pouvait pas être imputable à ses seules conditions de travail puisque le salarié vivait dans une métropole polluée. Enfin, les services de la médecine du travail n'avaient émis aucune observation sur les conditions de travail du salarié. Ce dernier se pourvoit alors en cassation. [...]
[...] Dès lors, même en l'absence de préjudice, l'employeur pourra être considéré comme ayant manqué à son obligation de sécurité de résultat et reconnu coupable d'une faute inexcusable. L'existence d'un préjudice du salarié n'est donc pas une condition pour engager la responsabilité civile de l'employeur sur le fondement de l'article L.4121-1. La visée préventive de l'obligation de sécurité de résultat mise en lumière Cet arrêt du 6 octobre 2010 posant que même en l'absence de préjudice, le manquement à l'obligation de sécurité de résultat pourra être caractérisé ouvre désormais la possibilité pour les salariés d'agir de manière préventive pour préserver leur santé et leur sécurité au travail. [...]
[...] La Cour de cassation semble vouloir éviter d'attendre que les salariés présentent des séquelles pour pouvoir engager la responsabilité de leur employeur. Ici, l'on se situe en amont de la réalisation d'un éventuel préjudice. Le parallèle peut être fait avec le droit de retrait du salarié (art. L4131-1), permettant à celui-ci de se retirer d'une situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Là aussi, ce droit s'exerce en amont de la réalisation d'un préjudice. [...]
[...] Néanmoins, dans un arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de cassation du 6 octobre 2010, il est apparu que la réalisation du préjudice n'était pas une condition nécessaire pour engager la responsabilité civile de l'employeur. En l'espèce, il s'agissait d'un salarié employé en tant que barman qui prit acte de la rupture de son contrat de travail, reprochant à son employeur de l'avoir laissé, en violation de la législation relative à la lutte contre le tabagisme, constamment exposé aux fumées de cigarettes. [...]
[...] Ainsi pour la Chambre Sociale, les choses sont claires: de par le non- respect de la législation relative à la lutte contre le tabagisme, l'employeur a nécessairement commis une faute puisqu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de ses salariés Le manquement à son obligation de sécurité de résultat est donc caractérisé. Mais le véritable apport de l'arrêt tient dans le fait qu'aucune autre condition n'est requise pour engager la responsabilité civile de l'employeur sur le fondement de l'article L.4121-1 du Code du Travail, notamment l'existence d'un préjudice. [...]
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