Commentaire, arrêt, cassation, 30 mars 1999, ALEFPA, Berthelin, autres
George Bernard Shaw disait que « L'esclavage humain a atteint son point culminant à notre époque sous forme de travail librement salarié ». Il est vrai que les conditions de travail des salariés sont mauvaises, ressemblant parfois à de l'esclavagisme. Le salarié nécessite donc une protection de la part du législateur, concernant l'encadrement des conditions de travail. Mais la protection ne doit pas s'arrêter qu'au cadre de l'exercice du travail, elle doit aussi s'appliquer aux situations de rupture du contrat de travail par l'employeur. C'est justement ce à quoi s'attache la chambre sociale de la Cour de cassation dans cette décision du 30 mars 1999.
En l'espèce, l'Association laïque pour l'éducation et la formation professionnelle des adultes (ALEFPA), décide de la fermeture d'un de ses établissements, la Communauté Anne Franck, et engage une procédure de licenciement collectif pour motif économique. Le comité d'entreprise de l'ALEFPA saisit le président du Tribunal de grande instance d'une demande de reprise de la procédure de licenciement pour violation des articles L.321-4, L.321-4-1 et L.321-7 du Code de travail. La demande est rejetée par une ordonnance en référé .
Mme Berthelin et cinq autres salariés saisissent la formation en référé du Conseil des Prud'hommes d'une demande en nullité de la procédure de licenciement et par conséquent de leur réintégration. La demande est déclarée recevable par la juridiction prud'homale, ordonnant la réintégration des salariés et condamnant l'ALEFPA au versement de dommages et intérêts. Un appel est interjetée devant la Cour d'appel de Paris, qui par une décision du 15 janvier 1887, confirme la décision de première instance, en déclarant recevable la demande en réintégration des salariés, en ordonnant la réintégration, sous astreinte, de ces salariés aux conditions antérieures et dans des postes équivalents et en condamnant l'ALEFPA à verser des dommages et intérêts à chacun des salariés. L'ALEFPA forme un pourvoi en cassation, le motivant d'une part par le fait qu'il ya une violation de l'article 1351 du Code civil et de l'exception de la chose jugée, d'autre part que le Conseil des Prud'homme est incompétent pour prononcer l'annulation du plan social et qu'il ne peut prononcer qu'une sanction en versement de dommages et intérêts, suite à la nullité d'un licenciement économique pour insuffisance du plan social.
La question posée à la Cour de cassation dans cette affaire était donc de savoir si un salarié licencié dans le cadre d'un plan social pouvait avoir un droit propre à agir en nullité de son licenciement devant le Conseil des Prud'hommes, suite à la nullité de la procédure de licenciement découlant de l'insuffisance du plan social ?
La chambre sociale de la Cour de cassation répond par l'affirmative et rejette le pourvoi, en considérant d'une part que l'action en nullité individuelle du salarié est différente de l'action collective du comité d'entreprise, donc la jugement d'une action n'a pas l'autorité de la chose jugée sur l'autre action. D'autre part, la Cour de cassation affirme le droit propre des salariés licenciés à agir en nullité de leur licenciement économique, suite à une insuffisance du plan social, et la réintégration à un emploi équivalent découlant de la nullité du licenciement, suite à l'impossibilité de la réintégration à l'ancien emploi du fait de la disparition de l'établissement.
[...] Il est vrai que le juge des référés ne devrait pas prononcer la nullité d'un acte juridique ou même d'une convention, donc il ne serait a priori pas compétent pour prononcer la nullité d'un plan social et de la nullité du licenciement qui en découle. Mais il ya ces derniers temps ; une affirmation du rôle du juge des référés dans le cadre du contentieux des licenciements économique et de l'application du régime du plan social. En effet, les règles dans le domaine du licenciement économique et de l'insuffisance du plan social nécessite des décisions de juge intervenant rapidement et immédiatement en exécutoire. [...]
[...] La Haute juridiction confirme donc la réintégration d'un salarié suite un licenciement économique, dont le plan social était insuffisant, et affirme la place du juge des référés dans la procédure de nullité. Mais la réintégration des salariés est-elle toujours possible ? L'impossibilité matérielle de la réintégration des salariés au poste d'origine : La Cour de cassation confirme donc la décision de la Cour d'appel de Paris, concernant la réintégration des salariés, licenciés pour des motifs économique, à la suite d'une insuffisance du plan social entachant ce dernier et tout les actes subséquents de nullité. Mais la réintégration est-elle réellement la meilleure décision ? [...]
[...] Il en résulte que la procédure de licenciement collective suivie est elle-même nulle. L'arrêt « ALEFPA » n'est que le prolongement et la confirmation de cette jurisprudence. En effet, le fait que la Cour de cassation confirme l'annulation du plan social et de la procédure de licenciement pour motif économique mise en œuvre par l'ALEFPA nous démontre que les décisions de la chambre sociale concernant la nullité de la procédure de licenciement collectif suite à une carence du plan social mis en œuvre par l'employeur sont constantes et importantes. [...]
[...] lorsque la réintégration est impossible, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois ». La Cour de cassation, malgré le fait que l'ALEFPA faisait valoir dans son pourvoi l'impossibilité de réintégration du fait de la fermeture irréversible de l'établissement où travaillaient les intéressés, trouve une solution. En effet, elle reprend la solution de la même chambre, rendue le 24 janvier 1990, affirmant qu'en cas d'impossibilité matérielle s'opposant à ce que l'intéressé retrouve son emploi antérieur, il est de principe que la réintégration ne s'en impose pas moins dans un emploi équivalent. [...]
[...] Le salarié nécessite donc une protection de la part du législateur, concernant l'encadrement des conditions de travail. Mais la protection ne doit pas s'arrêter qu'au cadre de l'exercice du travail, elle doit aussi s'appliquer aux situations de rupture du contrat de travail par l'employeur. C'est justement ce à quoi s'attache la chambre sociale de la Cour de cassation dans cette décision du 30 mars 1999. En l'espèce, l'Association laïque pour l'éducation et la formation professionnelle des adultes (ALEFPA), décide de la fermeture d'un de ses établissements, la Communauté Anne Franck, et engage une procédure de licenciement collectif pour motif économique. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture