Commentaire de l'arrêt Baldus sur la réticence dolosive rendu par la première chambre civile de la Cour de Cassation le 3 mai 2000.
La question de droit posée à la Haute juridiction résidait dans le fait de savoir si le silence de l'acheteur sur la valeur d'un bien vendu constituait ou non une réticence dolosive. A cette question, la Cour de Cassation a affirmé qu'il y avait une absence d'obligation d'information de l'acheteur (I) ce qui semble créer un affaiblissement de la sanction du comportement déloyal (II).
[...] Selon Christophe Jamin, la solution a le mérite de renforcer le lien entre l'obligation d'information et la réticence dolosive. En effet, si l'une est absente, l'autre le sera aussi. En l'espèce, comme la Cour dispose qu'il n'y pas d'obligation d'information, il n'y a pas réticence. Si la solution de la Cour de Cassation peut sembler critiquable notamment par le fait qu'elle ne motive pas sa solution et qu'elle se contente de casser l'arrêt de la Cour d'Appel sur l'inexistence pure et simple de l'obligation d'information de l'acheteur, une partie large de la doctrine a accueilli favorablement le dernier attendu. [...]
[...] Or, ici, la Cour de Cassation affirme que l'acheteur a le droit de se taire et pose ainsi une limite au champ d'application de la réticence dolosive. L'attendu de la Cour de Cassation ne donnant pas plus de précision, on peut se demander si sa solution de constitue un retour à la jurisprudence antérieure. En effet, avant 1958 et un arrêt du 19 mai de la 1ère chambre civile qui admettait pour la première fois le dol, le principe était que chaque partie devait se renseigner sur tous les aspects du contrat et qu'en conséquences, il n'y avait pas faute à ne pas dévoiler à l'autre les éléments du contrat qui lui seraient défavorables (Cass, Chambre civile mai 1927). [...]
[...] Il semble donc que la Cour de Cassation ne se refuse pas à sanctionner le comportement déloyal du contractant. Mais, il est intéressant de suivre l'évolution jurisprudentielle. Effectivement, il semble que, sur la question de savoir si le silence de l'acheteur sur la valeur d'un bien vendu constitue ou non une réticence dolosive, la jurisprudence ne dégage pas de solution constante. [...]
[...] Grégoire Loiseau écrit ainsi que la solution est raisonnable car elle refuse une conception trop extensive de la réticence dolosive. Or une telle conception ne sera jamais atteinte car la réelle transparence contractuelle est difficile. D'autre part, la solution, si elle semble donner, par son caractère affirmatif, la possibilité pour l'acheteur d'être libre alors même que ce comportement devrait être sanctionné, ne rejette pas pour autant l'obligation d'information du vendeur. Effectivement, on voit que les faits portent sur le prix de vente qui était largement inférieur à sa véritable valeur : il contractait un prix dérisoire pr rapport à la valeur des clichés sur le marché de l'art Ici, la valeur est l'objet principal du contrat. [...]
[...] La Cour d' Arrêt avait pris en considération la mauvaise foi du vendeur, caractérisée par son silence et donc son intention de tromper et faisait donc rentrer un élément moral dans son raisonnement. Elle tenait compte de l'attitude de l'acheteur. La Cour de Cassation quant à elle semble se pencher vers une conception moins moraliste : ce n'est pas l'intention de tromper qu'on va sanctionner mais l'existence d'une obligation d'information. Or comme aucune obligation d'information ne pesait sur l'acheteur aucun manquement ne peut lui être reproché. [...]
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