Commentaire de l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de Cassation le 13 juillet 2004
La question posée à la Haute juridiction s'énonçait dans les termes suivants : le caractère certain ou incertain de la réalisation de l'évènement érigé en modalité de leurs obligations par les parties doit-il s'apprécier objectivement, ou par référence à leurs intentions ?
De manière générale, la Cour devait s'interroger sur la place à accorder à la volonté des parties quant à la qualification de la modalité affectant leurs obligations
I) La confirmation et l'approfondissement d'un revirement jurisprudentiel
II) Une redéfinition du domaine de l'obligation conditionnelle
[...] Une autre décision, rendue par la même formation, le 6 octobre 1976, a considéré que la convention prévoyant le remboursement d'un prêt lors de la constitution par le débiteur d'une société était subordonnée à un terme, en ce que dans l'esprit des parties, cette création devait intervenir dans un délai raisonnable Ici encore, la qualification dépendait de la volonté des parties. Une partie de la doctrine a justifié techniquement cette approche par les termes des articles 1040 et 1041 du Code civil, accordant à la volonté du testataire, le pouvoir de conférer la qualité de terme et les effets s'y rattachant, à un évènement pourtant incertain. Néanmoins, une autre justification, s'expliquant par des motifs d'opportunité, se lit en filigrane de cette jurisprudence. [...]
[...] Ainsi, M. Mazeaud affirmait que la Cour de cassation n'avait pas fait produire d'effets à la volonté des parties d'ériger la modalité en terme, parce que l'évènement visé n'était pas potestatif de la part du débiteur, ce dernier n'ayant eu en l'espèce aucune influence directe sur le volume d'entrées érigé en modalité. A l'inverse, si le débiteur pouvait contrôler la réalisation de l'évènement, celui-ci serait potestatif, et, même s'il était objectivement incertain, devrait alors être qualifié de terme, la volonté des parties primant à nouveau. [...]
[...] La Cour de cassation se prononçait sur cette demande en sa première Chambre civile, par un arrêt rendu le 13 juillet 2004. La question posée à la Haute juridiction s'énonçait dans les termes suivants : le caractère certain ou incertain de la réalisation de l'évènement érigé en modalité de leurs obligations par les parties doit-il s'apprécier objectivement, ou par référence à leurs intentions ? De manière générale, la Cour devait s'interroger sur la place à accorder à la volonté des parties quant à la qualification de la modalité affectant leurs obligations L'arrêt rendu adoptera une conception objective dans la qualification de la modalité confirmant par là un arrêt récent ayant abandonné la conception subjective de la distinction entre terme et obligation le domaine de l'obligation conditionnelle se trouvant ainsi renouvelé et étendu (II). [...]
[...] Par conséquent, bien qu'objectivement, la constitution de la société fût incertaine, car tributaire de l'obtention d'un financement, la qualification de terme fût retenue, par référence à la volonté des parties. Pour le juge, toujours réticent au prononcé massif de nullités, il s'agissait donc d'attraire ces modalités dans le domaine du terme, en énonçant que les évènements étaient de réalisation certaine, en considération de l'intention des parties. Dès lors que l'obligation était jugée comme étant conclue sous un terme suspensif, elle ne risquait plus d'être remise en cause au titre de l'article 1174 du Code civil, s'appliquant aux seules conditions. [...]
[...] La décision rendue le 13 juillet 2004 y répondra par l'affirmative, consacrant sans ambiguïté une conception objective du terme. En effet, il n'était pas contestable qu'en l'espèce, la débitrice de la promesse d'achat, la société Laho, ait eu de l'influence sur la réalisation de la fusion ou de l'augmentation de capital, ayant acquis 500 actions de la potentielle cible, la mettant, selon les juges du fond, en position de maîtriser seule la réalisation de la fusion L'évènement était bien potestatif de sa seule volonté, mais la Cour de cassation a tout de même retenu la qualification de condition, son attendu étant d'ailleurs sans ambiguïté quant au fondement de cette solution, qui ne se trouvait aucunement justifiée par la potestativité, mais par l'incertitude entourant la réalisation de l'évènement tant dans sa date, mais aussi quant à sa réalisation. [...]
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