A Rome, les parties avaient pour habitude d'insérer dans certains contrats une clause de résolution en cas d'inexécution – la résolution ayant pour résultat l'anéantissement rétroactif d'un contrat valablement conclu. Cette clause est progressivement devenue une clause de style – l'adage Frangenti fidem non est fides servanda datant du droit canonique, et Dumoulin démontrant au XVIe siècle que la résolution pour inexécution devait s'appliquer à tous les contrats. Cette évolution a poussé les codificateurs de 1804 à la considérer comme une condition résolutoire tacitement convenue, « toujours sous-entendue » (alinéa 1er de l'article 1184 C. Civ), plaçant ainsi l'article 1184 dans une section du Code civil consacré aux obligations conditionnelles. Si l'on met de côté la justification historique, sur quels fondements repose réellement cette institution ? Techniquement, la doctrine la rattache à la notion de cause : la résolution serait le corollaire logique de l'interdépendance qui existe entre les obligations issues d'un contrat. La notion de résolution est également en lien avec la théorie générale de la responsabilité civile : procédé de réparation à l'égard de la victime, elle prévoit une sanction pouvant parfois être prononcée en l'absence de tout préjudice.
L'article 1184 du Code civil consacre donc, sur ces différents fondements, la résolution judiciaire. Ainsi, il dispose en son alinéa premier la sanction naturelle des contrats synallagmatiques, qui est la résolution judiciaire. Une précision est toutefois immédiatement apportée par l'alinéa 2 de l'article, qui dispose qu'une option est offerte au créancier, qui peut soit demander la résolution du contrat, soit en exiger l'exécution. Enfin, l'alinéa 3 précise les modalités de mise en œuvre de la résolution, qui doit être demandée en justice.
Réglementant ce mécanisme de la résolution judiciaire, l'article 1184 a donc une grande importance puisqu'il conduit à l'anéantissement rétroactif de contrats valablement conclus ; la jurisprudence a été, au fil du temps, amenée à l'interpréter. Au vu de l'article et de l'interprétation qui en a été faite, quel régime s'applique aujourd'hui à la résolution judiciaire ?
[...] La Cour de cassation a par ailleurs admis que les parties renoncent au bénéfice des dispositions de l'article 1184 du Code civil, dès lors que cette renonciation n'est pas équivoque[9]. L'inexécution du contrat étant établie, la résolution n'a toutefois pas lieu de plein droit : une décision judiciaire est aussi exigée par l'article Décision judiciaire En son alinéa l'article précise que la résolution doit être demandée en justice : elle n'a pas lieu de plein droit ce qui distingue la résolution de la clause résolutoire (valable uniquement si exprimée de manière non équivoque). [...]
[...] L'avant-projet de réforme du droit des obligations précise ainsi l'article 1184, disposant en son article 1160 que la résolution peut n'être que partielle lorsque l'exécution du contrat est divisible. Enfin, il est admis que la résolution n'atteint pas les clauses du contrat qui peuvent être détachées des obligations essentielles du contrat : il en va ainsi des clauses compromissoires ou encore des clauses attributives de compétence, qui ont leur propre autonomie Extension des effets à d'autres conventions Dans d'autres cas au contraire, la résolution anéantit non seulement le contrat inexécuté, mais aussi les contrats liés ou dépendants. [...]
[...] Quant au défendeur, il est admis qu'en cas de cession de contrat le créancier puisse demander la résolution en s'adressant au cessionnaire, ce dernier étant tenu en tant que délégué[14]. La loi ne fixe aucun délai pour agir. La résolution ayant des conséquences plus graves que l'exception d'inexécution (puisqu'elle met fin au contrat), il revient au juge de vérifier si les conditions de la résolution, énoncées plus haut, sont bien réunies. Le juge dispose pour ce faire d'un pouvoir souverain d'appréciation. [...]
[...] Commentaire de l'article 1184 du Code civil A Rome, les parties avaient pour habitude d'insérer dans certains contrats une clause de résolution en cas d'inexécution la résolution ayant pour résultat l'anéantissement rétroactif d'un contrat valablement conclu. Cette clause est progressivement devenue une clause de style l'adage Frangenti fidem non est fides servanda datant du droit canonique, et Dumoulin démontrant au XVIe siècle que la résolution pour inexécution devait s'appliquer à tous les contrats. Cette évolution a poussé les codificateurs de 1804 à la considérer comme une condition résolutoire tacitement convenue, toujours sous-entendue (alinéa 1er de l'article 1184 C. [...]
[...] Par ailleurs, il serait dangereux que la rétroactivité de la résolution rejaillisse sur les tiers de bonne foi ayant traité avec l'un des contractants. Aussi, la jurisprudence considère que doivent être maintenus au moins les actes d'administration passés par l'acquéreur sous condition résolutoire[22] et la purge des hypothèques effectuées pendente conditione est considérée comme définitive[23]. Certains auteurs remettent en cause le principe même de la rétroactivité[24]. La résolution reposant aujourd'hui sur des considérations de bonne foi et d'équité, il serait ainsi préférable de l'envisager quant à ses effets, dans le cadre de la liquidation pour l'avenir d'une situation contractuelle qui n'a plus vocation à perdurer ; sans remettre en cause la période contractuelle antérieure, durant laquelle la convention a été régulièrement exécutée. [...]
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