Commentaire d'arrêt de Droit Privé: Première chambre civile de la Cour de cassation le 28 mars 2008 (4 pages)
En 1984, une femme vend un portrait de Monet à une société, elle est persuadée que le tableau est d'un peintre américain. Suite à la vente, trois experts émettent un doute sur l'origine du tableau, la femme accepte alors de revenir sur le prix en le divisant par deux.
Dix ans plus tard, la femme s'aperçoit que l'acquéreur expose le tableau dans un catalogue sous la signature de Monet lui-même.
La femme poursuit l'acquéreur en justice pour erreur sur la substance et pour dol. La cour d'appel la déboute de sa demande aux motifs que le doute apparu lors de la vérification des experts justifie l'acceptation de vente à moitié prix de l'?uvre. L'origine étant restée incertaine, les parties « étaient convenues de ne pas faire de cette attribution une qualité substantielle du bien ». La femme a accepté l'aléa sur l'auteur, l'attribution postérieure à Monet n'était pas exclue (d'ailleurs, la preuve n'est toujours pas apportée).
L'accord sur la réduction du prix prouve-t-il que la femme excluait l'attribution postérieure du tableau à un peintre d'une notoriété plus grande ?
La Cour de cassation répond par l'affirmative, la réduction du prix explique peut-être que la femme excluait par la suite l'attribution du tableau à un peintre plus célèbre. Dans tous les cas, la cour d'appel aurait du creuser cette hypothèse. Ne l'ayant pas fait, elle prive de base légale sa décision. La Cour casse et annule l'arrêt rendu.
Au sujet du dol, la cour l?a très vite écarté, c'est uniquement l'erreur sur la substance qui est analysée, donc, dans ce commentaire, nous allons principalement nous intéresser aux conditions de l'aléa lors d'une demande de nullité pour erreur.
Comment l'erreur sur une qualité substantielle peut-elle être invoquée alors que le doute quand à la paternité de l'?uvre d'art avait été accepté par les parties ?
Nous commencerons par voir l'application rejetée du principe selon lequel « l'aléa chasse la nullité pour erreur » (I) puis nous verrons la nuance apportée par la Cour de cassation dans cet arrêt : l'aléa ne chasse pas nécessairement l'erreur sur la substance (II).
I) Un principe rejeté : « l'aléa chasse la nullité pour erreur »
II) L'aléa ne chasse pas nécessairement l'erreur sur la substance
[...] Si des contractants font naitre un aléa dans le champ contractuel, cet aléa doit être le même pour les deux parties. C'est l'aléa compris personnellement par les contractants qui prime sur l'aléa réel. [...]
[...] La Cour casse et annule l'arrêt rendu. Au sujet du dol, la cour très vite écarté, c'est uniquement l'erreur sur la substance qui est analysée, donc, dans ce commentaire, nous allons principalement nous intéresser aux conditions de l'aléa lors d'une demande de nullité pour erreur. Comment l'erreur sur une qualité substantielle peut-elle être invoquée alors que le doute quand à la paternité de l'œuvre d'art avait été accepté par les parties ? Nous commencerons par voir l'application rejetée du principe selon lequel l'aléa chasse la nullité pour erreur puis nous verrons la nuance apportée par la Cour de cassation dans cet arrêt : l'aléa ne chasse pas nécessairement l'erreur sur la substance (II). [...]
[...] Au moment du contrat, la demanderesse savait qu'il y avait un doute sur l'auteur du tableau, d'après elle, il s'agissait d'un peintre américain. Avec le contre avis des experts, elle s'est dit que si ça n'était pas un tableau de cet américain, ça ne pouvait être que celui un artiste moins connu. Elle ne s'est pas dit, au contraire, que cela pouvait être un peintre de plus haute renommé. Le doute de la demanderesse que l'on vient de mettre en lumière est différent du doute réel. [...]
[...] Tout comme la cour d'appel, elle fonde sa décision sur deux notions. La première vient des textes législatifs et de l'interprétation qu'en a faite la jurisprudence : l'erreur sur la substance La seconde est issue des circonstances même du contrat : l'aléa entré dans le champ contractuel A. L'erreur sur la substance : Dans cet arrêt, la demanderesse, c'est-à-dire la femme qui a vendu le tableau à moitié prix, fait une demande d'annulation de la vente pour erreur sur la substance. [...]
[...] Il faut chercher pour chaque contractant ce qui est déterminant. En l'espèce, la cour d'appel se serait aperçu que la vente n'était pas totalement indifférente au peintre si elle avait tenu compte de la représentation intellectuelle de l'aléa par la venderesse. Ainsi la Cour de cassation peut dire que sans expliquer en quoi la réduction du prix n'était pas exclusive de l'attribution possible du tableau à un peintre de notoriété plus grande que celle de Z la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision La création d'une exception au principe de l'aléa : Cet arrêt a une portée symbolique puisqu'il fait naitre une exception au principe de l'aléa. [...]
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