Première Chambre civile de la Cour de Cassation, 17 janvier 2007 obligation d'information devoir de loyauté consentement promesse de vente immobilière réticence dolosive
La question est ici de savoir si l'acquéreur doit impérativement, avant la formation du contrat, informer le vendeur sur la valeur du bien vendu, et ce au profit de ce dernier, puisque lui évitant une mauvaise affaire.
De même, le silence de l'acquéreur sur la véritable valeur du bien est-il dolosif ?
L'arrêt rendu par la troisième Chambre civile de la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel aux motifs que « l'acquéreur, même professionnel, n'est pas tenu d'une obligation d'information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis ». Ainsi, le silence de l'acquéreur sur la valeur du bien vendu ne constitue pas une réticence dolosive, même si il a provoqué une erreur déterminante du consentement du vendeur. On constate dans cette décision une limite claire au devoir de loyauté dans la vente (I), ainsi qu'une restriction du domaine du dol (II)
[...] Il peut sembler justifié que l'acheteur éclairé ne soit pas obligé de faire partager ce qu'il sait au vendeur parce que ce dernier en est moins pourvu. Le commerce, les affaires, sont guidées par l'image du bénéfice. L'acquisition d'une compétence résulte d'un investissement. Si elle doit être partagée gratuitement, il n'y a plus d'intérêt commercial à « savoir » avant, plus, mieux que l'autre. Cela serait anti commercial. De plus, le vendeur n'est pas dénué de moyens pour accéder à l'information : il peut recourir à des experts, des agents immobiliers capables de lui révéler la valeur réelle du bien. [...]
[...] Au-delà du statut des contractants et de leurs relations, la loyauté est proportionnelle à la confiance qui les unit. En l'espèce, certains voient preuve d'une confiance le fait que les intéressés aient été en rapport pour deux affaires trois ans plus tôt, d'autres non. La position des juges de cassation se justifie donc par une limitation raisonnable du devoir de loyauté à certains cas, et ce, en garantie de la sécurité contractuelle, protégeant les contractants d'une annulation tardive ici d'une promesse de vente, mais en général d'un contrat. [...]
[...] Il demande de ce fait la nullité du contrat. Par un arrêt rendu le 27 octobre 2005, la Cour d'appel de Paris accueille sa demande aux motifs qu'il « ne pouvait lui-même connaître la valeur de son pavillon » et que le silence gardé par l'acquéreur «constituait un manquement au devoir de loyauté qui s'impose à tout contractant et caractérisait une réticence dolosive déterminante du consentement au sens de l'article 1116 du code civil ». Pourvoi est formé contre cet arrêt. [...]
[...] Alors, peu importe l'objet de l'erreur. Mais lorsque l'élément matériel du dol est caractérisé par une réticence, il faudra, en outre du constat du dol, que cette erreur ait pour objet un élément susceptible d'emporter la nullité du contrat selon l'article 1110 du Code civil (la substance par exemple). En tout cas, elle n'affectera pas la validité du contrat quand elle aura pour seul objet la valeur de l'objet du contrat. Cette solution, qui conduit à créer une disparité de régime du dol, s'observe dans des arrêts antérieurs. [...]
[...] La fin de la reticence dolosive ? L'absence d'obligation d'information et de réticence découle de l'objet de l'erreur commise par le vendeur. Ainsi, c'est parce que l'erreur du vendeur portait sur la valeur du bien vendu qu'elle ne peut annuler le contrat. Cette solution instaure une diversité dans le régime de ce vice du consentement qu'est le régime du dol. Avant l'arrêt, l'effet de l'erreur provoquée par le dol constituait l'élément qui permet d'en déterminer les conséquences sur le contrat conclu. [...]
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