preuve, exécution, obligation, conseil, cassation, 28, octobre, 2010
« Qui vend le pot dit le mot » disait Loisel témoignant ainsi d'une obligation spécifique à la charge du vendeur. Le contrat de vente, comme tout contrat, met, en effet, des obligations à la charge du vendeur et de l'acheteur. Ainsi, par exemple, l'article 1603 du Code civil affirme que le vendeur a deux obligations principales, délivrer et garantir la chose qu'il vend. À coté de ces obligations principales, se sont développées d'autres obligations plus secondaires. Parmi elles, se trouve l'obligation d'information et de conseil indirectement exprimée par Loisel. Cette interprétation extensive de la notion de contrat a conduit Josserand à parler de « forçage du contrat. » Cette obligation a été révélée par la doctrine et elle est parfois imposée directement par la loi dans certains domaines comme pour le professionnel vendeur de biens ou prestataire de services : ainsi, l'article L111-1 du code de la consommation met à la charge de ce professionnel une obligation précontractuelle d'information. À vrai dire, c'est surtout la Jurisprudence qui a étendu le contenu obligationnel du contrat et les obligations imposées au vendeur en développant une obligation d'information et de conseil. Cette obligation est considérée comme générale et a pris le pas sur le devoir de chacun de s'informer, devoir qui a longtemps prévalu en jurisprudence par référence à un adage latin – emptor debet esse curiosus – selon lequel l'acheteur doit être curieux. Le principe est qu'un contractant, même non professionnel, doit informer son cocontractant, y compris lorsque celui-ci est un professionnel, si sa compétence ne lui permet pas de connaitre la chose vendue. Le développement récent de cette nouvelle obligation a donné lieu à un contentieux de masse.
Ainsi, en l'espèce, un couple (Mr et Mme X) achète du carrelage en vue de le disposer sur le pourtour de leur piscine. Une fois posés, suite à la désagrégation de ces carreaux, le couple obtient le remplacement d'une partie des carrelages par la société ATC, société à laquelle ils avaient acheté ces lots de carrelage. Toutefois, le problème restant irrésolu, un expert fut désigné et il apparut que les carrelages n'étaient pas compatibles avec le traitement spécifique de l'eau de la piscine. Les acheteurs ont alors assigné le vendeur c'est-à-dire la société ATC en vue d'obtenir une indemnisation. Déboutés de leur demande par la Cour d'appel au motif que « s'il appartient au vendeur professionnel de fournir à son client toutes les informations utiles et de le conseiller sur le choix approprié en fonction de l'usage auquel le produit est destiné, en s'informant si nécessaire des besoins de son client, il appartient également à ce dernier d'informer son vendeur de l'emploi qui sera fait de la marchandise commandée», les acheteurs forment alors un pourvoi en cassation.
[...] Commentaire : Cour de cassation, 1ère chambre civile octobre 2010 « Qui vend le pot dit le mot » disait Loisel témoignant ainsi d'une obligation spécifique à la charge du vendeur. Le contrat de vente, comme tout contrat, met, en effet, des obligations à la charge du vendeur et de l'acheteur. Ainsi, par exemple, l'article 1603 du Code civil affirme que le vendeur a deux obligations principales, délivrer et garantir la chose qu'il vend. À coté de ces obligations principales, se sont développées d'autres obligations plus secondaires. [...]
[...] Ensuite, la Cour de cassation évoque indirectement la question des créanciers de ce devoir de conseil. En effet, comme elle ne retient pas la position de la Cour d'appel qui avait estimé que l'acheteur devait contribuer à ce devoir en fournissant de lui-même les renseignements nécessaires à l'acheteur pour le conseiller, la Cour de cassation semble affirmer que les acheteurs sont les créanciers d'une telle obligation et en aucun cas ils n'en seraient débiteurs ne serait-ce que pour partie. Toutefois, traditionnellement, le devoir de conseil varie selon la qualité de l'acheteur. [...]
[...] Cette solution de la Cour de cassation semble logique au regard de sa Jurisprudence Baldus développée par la première chambre civile de la Cour de cassation le 3 mai 2000 selon laquelle l'acheteur n'a pas d'obligation d'information envers le vendeur : s'il sait qu'il fait une bonne affaire, il peut en profiter pleinement sans faire remarquer au vendeur que son prix est beaucoup trop bas par exemple et sans commettre de réticence dolosive (cette Jurisprudence a été reprise par la troisième chambre civile le 17 janvier 2007 notamment). Ainsi, le débiteur de l'obligation de conseil semble être unique : il s'agit du vendeur. Plus précisément, l'attendu de la Cour de cassation vise le vendeur « professionnel. » En l'espèce, la société ATC remplit bien cette qualité puisqu'il s'agit d'un achat de carrelage et qu'elle est spécialisée dans ce domaine (société Ateliers de la Terre cuite), elle est donc tenue d'une obligation de conseil. [...]
[...] Or, en l'espèce, la Cour de cassation énonce que « le vendeur professionnel [doit] se renseigner sur les besoins de l'acheteur afin d'être en mesure de l'informer » autrement dit, elle vise un « acheteur » sans aucune autre précision. Elle ne précise pas s'il s'agit d'un acheteur profane, professionnel, ou même professionnel dans le même domaine de compétence. On peut donc estimer que la Cour de cassation élargit l'obligation de conseil à l'égard du vendeur et accroit sa sévérité en en ne distinguant pas selon les compétences de l'acheteur. Il y a donc un doute quant à la portée de l'arrêt. [...]
[...] Il s'agit maintenant d'aborder les modalités de preuve de l'obligation de conseil. Les modalités de preuve de l'obligation de conseil Quant aux modalités de preuve, la Cour de cassation n'aborde pas cette question puisqu'elle ne se posait pas dans cette affaire, pourtant, elle peut s'avérer très utile. On peut ainsi traiter des modalités de preuves théoriques et de ce qu'il se passe effectivement en pratique puis des conséquences que cela engendre. La première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 14 octobre 1997 pose le principe selon lequel la preuve est libre c'est-à-dire qu'elle peut se faire par tous moyens : écrits, aveux, témoignages Ainsi, en pratique, les vendeurs professionnels sur qui pèse la charge de la preuve vont se faciliter les choses en se préconstituant des preuves avant tout litige éventuel. [...]
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