Obligation d'information médecin absence alternative thérapeutique revirement jurisprudence arrêt 3 juin 2010
Par un arrêt du 3 juin 2010, la Cour de cassation opère en matière médicale un lien entre défaut d'information, violation du consentement et atteinte à la dignité et crée un préjudice autonome de la perte de chance. Historiquement , la Cour de cassation, à la fin des années 1990, avait entendu renforcer l'obligation d'information du médecin, d'abord en mettant à sa charge la preuve de son exécution et ensuite en lui imposant d'informer le patient de tous les risques graves, même exceptionnels, de l'acte médical envisagé. La loi Kouchner du 4 mars 2002 a confirmé cette orientation en donnant au patient un droit à être informé sur les « risques fréquents ou graves normalement prévisibles » C'est dans les années 2000 que la Cour de Cassation a au contraire contribué à affaiblir l'obligation d'information au stade de la sanction. Et c'est « durant » l'arrêt que nous présenterons que la Cour de Cassation a opéré un revirement important. En l'espèce, un patient souffrant d'impuissance à la suite d'une adénomectomie prostatique a recherché la responsabilité de son urologue en lui reprochant d'avoir failli à son obligation de suivi postopératoire et manqué à son devoir d'information quant aux risques inhérents à cette intervention...
[...] La Cour de cassation a donc eut à répondre à la question de savoir si en l'absence d'alternative thérapeutique, le manquement à l'obligation d'information du médecin reste réparable. Cet arrêt, d'une importance certaine par son inscription au bulletin civil ,nous a donc donné deux angles de vues sur l'obligation d'information : celle d'une obligation d'information évolutive mais dont on applique désormais strictement la loi (II). Une notion d'obligation d'information évolutive On l'a vu , le médecin n'a pas toujours été tenu de l'obligation d'information que l'on connait aujourd'hui ; nous verrons tout d'abord cette évolution au regard de la jurisprudence pour mettre en évidence le revirement de jurisprudence opéré avant de voir la nature extracontractuelle qu'a maintenant cette obligation Le revirement de jurisprudence opéré Auparavant la Cour de cassation admettait qu'en présence d'un acte nécessaire au traitement du patient et en l'absence d'alternative thérapeutique , les juges du fond peuvent présumer que le patient n'aurait pas renoncé à l'intervention proposée pour en déduire que le préjudice et le lien de causalité font défaut. [...]
[...] Le manquement à l'obligation est donc resté sans sanction. C'est sur cette jurisprudence , qui affectait gravement la portée et l'effectivité de l'obligation d'information médicale , que revient l'arrêt du 3 juin 2003 en énonçant le principe selon lequel « le non respect du devoir d'information[ ] cause à celui auquel l'information était légalement due, un préjudice, qu'en vertu du dernier des textes susvisés, le juge ne peut laisser sans réparation. » Le texte susvisé qui est cité dans cet attendu de principe vise l'article 1382 qui nous mène vers une vision extracontractuelle de cette obligation d'information. [...]
[...] En procédant ainsi la Cour de cassation considérait implicitement que l'obligation d'information faisait partie intégrante du contrat médical. Désormais l'utilisation de l'article 1382 révèle une volonté de la Haute juridiction de considérer au moins que l'obligation d'information revêt une nature extracontractuelle. Ainsi l'on opère à un changement de fondement de la responsabilité du médecin pour défaut d'information qui pourrait , selon Patrice Jourdain , affecter la responsabilité médicale toute entière et traduit une rupture avec la jurisprudence Mercier. Aussi désormais l'information est un droit subjectif du patient, le préjudice résulte alors de la seule constatation de l'atteinte. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Civ. 1ère juin 2010 Par un arrêt du 3 juin 2010, la Cour de cassation opère en matière médicale un lien entre défaut d'information, violation du consentement et atteinte à la dignité et crée un préjudice autonome de la perte de chance. Historiquement , la Cour de cassation, à la fin des années 1990, avait entendu renforcer l'obligation d'information du médecin, d'abord en mettant à sa charge la preuve de son exécution et ensuite en lui imposant d'informer le patient de tous les risques graves, même exceptionnels, de l'acte médical envisagé. [...]
[...] Il est, en effet, de constatation commune que l'on supporte moralement mieux un dommage à l'éventualité duquel on a pu psychologiquement se préparer, que celui qui était totalement imprévu » (M. Penneau, note sous Angers sept D Jur. 46). Le préjudice se conçoit alors comme un dommage moral autonome résultant du fait de ne pas avoir été averti du risque réellement encouru il s'agit donc d'un préjudice spécifique indépendant de la perte de chance Cet arrêt consacre donc le « préjudice d'impréparation » avec l'idée d'une protection du consentement qui prévaut désormais sur l'utilitarisme . [...]
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