Commentaire, arrêt, Civile, 1ère, 3, avril, 2002
En date du 3 avril 2002, la première chambre civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt portant sur l'exploitation abusive d'une dépendance économique, soulevant ainsi une nouvelle forme de violence : la violence économique.
En l'espèce, Mme Kanas salariée de la société d'édition Larousse-Bordas depuis 1972 cède à son employeur ses droits d'exploitation sur un ouvrage dont elle est l'auteur via un contrat signé en 1984. Mme Kanas est licenciée en 1996. Elle assigne la société Larousse-Bordas pour la nullité de la convention portant sur la cession de ses droits d'auteur. Madame Kanas a été déboutée en première instance. Elle a alors interjeté appel auprès d'une Cour d'appel qui considère que la crainte de la salariée de perdre son emploi à cause des menaces de licenciements qui planaient sur le personnel et de sa situation de dépendance économique par rapport à son employeur ne la rendait pas en mesure de négocier ses droits d'auteur et justifiait ainsi sa demande de nullité du contrat. De ce fait, la Cour d'Appel a infirmé le jugement rendu en première instance en accueillant favorablement la demande de Madame Kanas en deuxième instance. La société Larousse-Bordas s'est alors pourvue en cassation. A l'issue du pourvoi, la Cour de Cassation casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'Appel en se fondant sur une nouvelle définition de la violence dans son caractère économique : « Seule l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement.»
[...] Cette notion d'abus de droit et de pouvoir se retrouve donc au fondement même de la notion de vice du consentement résultant de l'existence d'une violence économique. On apprécie donc l'existence d'une violence économique au travers des dispositions plus ou moins déséquilibrées à l'égard de l'une des parties mais également l'abus d'un droit d'une personne morale ou physique dans la recherche d'intérêts personnels grâce à la conclusion d'un contrat avec une partie plus faible qu'elle en raison de circonstances extérieures. [...]
[...] Le salaire permet donc la survie de l'employée ce qui entraine un lien permanent de dépendance économique entre l'employée et l'employeur. En l'espèce, il existe un lien de subordination entre l'employée Madame Kanas et son employeur la société Larousse-Bordas. Or, il est retenu qu'un lien de subordination en droit du travail n'a pas d'effet de violence. Cette déduction a été faite dans un arrêt de la Cour de Cassation du 26 mars 1928 : le seul caractère de subordination juridique du salarié envers son employeur ne peut pas constituer une violence. [...]
[...] Mais il n'est pas possible de faire une présomption de violence dans les rapports conventionnels entre les employés et employeurs. On en déduit donc que l'admission de la violence économique comme vice du consentement reposant sur le seul critère de la dépendance économique d'une personne dominée à l'égard d'une personne plus forte constitue une atteinte à la protection des affaires et des relations contractuelles par nature entre les individus. Un autre critère essentiel est à apprécié : celui de l'exploitation abusive. [...]
[...] Or, le licenciement de Madame Kanas a été brusque. Ce n'est donc pas un état de nécessité mais une contrainte due à un aléa professionnel. La notion de dépendance économique suppose l'appréciation de deux conditions : d'une part une condition objective concernant l'existence d'une réelle menace pesant sur l'autre partie, ici en l'espèce une menace de licenciement pesant sur Madame Kanas. D'autre part, on doit apprécier une condition subjective à savoir la crainte du cocontractant sur lequel la violence s'exerce, c'est donc une restriction de sa volonté. [...]
[...] Mme Kanas est licenciée en 1996. Elle assigne la société Larousse-Bordas pour la nullité de la convention portant sur la cession de ses droits d'auteur. Madame Kanas a été déboutée en première instance. Elle a alors interjeté appel auprès d'une Cour d'appel qui considère que la crainte de la salariée de perdre son emploi à cause des menaces de licenciements qui planaient sur le personnel et de sa situation de dépendance économique par rapport à son employeur ne la rendait pas en mesure de négocier ses droits d'auteur et justifiait ainsi sa demande de nullité du contrat. [...]
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