Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 20 février 2007, créances réciproques
La lecture de cet arrêt réaffirme à nouveau que la connexité est bien une « condition joker » en ce qu'elle permet de suppléer les conditions de liquidité et d'exigibilité normalement requise.
En l'espèce, une société (BMINI) a notifié le 30 octobre, par télécopie, à la société dont elle est actionnaire (coopérative Sacform) ainsi qu'à la filiale de cette dernière (la société anonyme Sacform), sa volonté de quitter le groupement à compter du 31 décembre 2000.
Le droit de retrait n'ayant pas été exercé dans les formes et délais convenus, la société et sa filiale (Sacform) assignent en justice l'ancienne société actionnaire (BMINI) et demande qu'elle soit condamnée au paiement d'une indemnité ainsi que de diverses sommes au titre de leurs relations antérieures.
La société et sa filiale (Sacform) font grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande d'indemnité. Elles invoquent quatre arguments, d'abord, en s'appuyant sur l'article 7 de la loi du 10 septembre 1947, l'article L 124-3 et suivant du code de commerce, et reprochent à la Cour d'appel d'avoir privé sa décision de base légale en ne recherchant pas si le règlement intérieur avait valeur statutaire puisque adopté dans les mêmes conditions que les statuts et en exécution de ceux-ci.
[...] L'inverse aurait conduit les juges de la Cour de cassation à augmenter la créance exigible du montant des intérêts légaux. En ne choisissant pas cette solution=, la Cour supprime de facto la question des intérêts qui n'a plus aucun sens puisque la créance au moment où elle apparaît pourra au même instant être compensée. Cependant cette solution ne peut s'appliquer que lorsque le juge, par sa décision permet l'exigibilité d'une seule créance, l'autre l'étant déjà par définition. En outre, dans une hypothèse de compensation judiciaire ou aucune des deux créances n'est exigible, la date des effets reviendraient par définition à celle du jugement. [...]
[...] Mais, ce défaut des conditions de compensation légale ne va pas empêcher en l'espèce la compensation entre ces deux créances. En effet, la Cour de cassation peut aménager les conditions de compensation légale grâce à une technique de dérogation jurisprudentielle, la compensation judiciaire qui en est le palliatif. Le juge peut alors constater la connexité des créances pour admettre la compensation entre deux créances. Ainsi, dès lors que deux dettes sont connexes, le juge ne peut écarter la demande en compensation au motif que l'une d'entre elles ne réunit pas les conditions de liquidité et d'exigibilité, si la créance opposée est certaine en son principe[5]. [...]
[...] [5]Com 28 avril 2009, Civ mars 1992, Civ décembre 1979 Civ. 1re janv. 1967: GAJC, 11e éd., no 238; D note J. Mazeaud; RTD civ obs. Chevallier ;Soc juin 1982: Bull. civ. no 404 ; Civ. 3e mars 1989: ibid. III, no 77; Defrénois obs. Aubert ? [...]
[...] En l'espèce, l'effet extinctif de la compensation judiciaire entre les créances réciproques connexes a lieu à partir de l'assignation et non à partir du jugement. La première chambre va réitérer cette solution deux ans plus tard en reprenant le même attendu de principe[24]. Cette arrêt qui consacre la spécificité dérogatoire de la compensation fondée sur la connexité, fait rétroagir l'exigibilité de l'une des créances, à la différence de ce qui se passe dans le mécanisme de compensation légale[25], sous doute grâce à l'autonomie de la compensation judiciaire et donc par le contrôle du juge. [...]
[...] dès lors que les créances réciproques étaient connexes Droit des sociétés Août 2007, comm La compensation de dettes connexes au service des associés, R. Mortier Ce que n'a pas fait la chambre commerciale Economica [11]Com mai 1995, Bull civ IV ; com décembre 1995 Admission la compensation de créances pour cause de connexité, l'une étant due par la coopérative à son associé au titre de livraisons de lait, l'autre étant due par ce même associé à la coopérative au titre du dépassement des quotas laitiers, en arguant du fait que cette dernière dérive de l'exécution du contrat de fourniture de lait : Cass. [...]
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