Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 18 mars 2014, cause du contrat
Une société a concédé à une société de design une licence d'exploitation de sa marque en contrepartie d'une redevance annuelle calculée par un pourcentage de chiffres d'affaires avec minima. Mais la société de design a arrêté de payer, estimant que les conditions économiques ont fait que le contrat n'était plus viable et donc dépourvu de cause. La société initiale a obtenu une ordonnance d'injonction de payer à laquelle la société de design s'oppose.
La Cour d'appel de Paris dans un arrêt du 28 septembre 2012 a condamné la société de design à payer les sommes de 37 685,13 € et 42 319,75 € à la société initiale. Elle a estimé que la rentabilité du contrat ne participait pas à la définition de la cause au contrat. La société de design décide alors de se pourvoir en Cassation.
[...] La Cour de cassation a donc confirmé que la cause de l'obligation résidait dans la mise à disposition de la marque. II. Une approche jurisprudentielle différente et discutable Cette jurisprudence de la Cour de cassation n'a pas été uniforme et peut prêter à discussion. A. Une jurisprudence vacillante La cause est une notion tellement vague et complexe, que la jurisprudence a une place importante dans son interprétation, dans sa vision de la notion cause. Et si cette notion est complexe et que la place à l'interprétation est importante, alors la jurisprudence a du osciller, et c'est le cas. [...]
[...] On a par ailleurs d'autres précisions avec la Cour d'appel qui estime que la rentabilité du contrat ne participe pas davantage à la définition de la cause dont l'existence s'apprécie au moment de sa conclusion. La Cour d'appel nous explique ici que la cause doit être regardée au moment de la conclusion du contrat, ce qui équivaut à dire implicitement que si le contrat paraît justement formé lors de la formation de celui-ci, alors peu importe les conséquences économiques, sociales, politiques ou autres qui joueront dans le futur, si le contrat est bien formé et qu'une cause existe, qu'elle est réelle et licite, alors le contrat ne peut être annulé. [...]
[...] C'est ce dernier argument que va développer les demandeurs au pourvoi à savoir la société de design, le tout résumé en une phrase aussi simple que complexe : La disparition de la cause d'un engagement à exécution successive en cours d'exécution du contrat entraîne sa caducité. On a bien ici à faire à un engagement, à exécution successive puisque la société de design doit payer un pourcentage sur le chiffre d'affaires et un minima. Et il considère que la cause du contrat a disparu en cours d'exécution puisque finalement, les circonstances économiques étant moroses, le contrat n'était plus (ou pas) viable. [...]
[...] C'est l'argument de dire que si on commence à annuler tous les contrats qui finalement ne sont pas rentables sur le moyen terme pour absence de cause, cela risquerait de créer une instabilité économique important et pas acceptable. En revanche, la question peut se poser pour la rentabilité d'un contrat à sa formation. C'est-à-dire que dire qu'un contrat était dépourvu de cause à sa formation parce que l'exécution du contrat selon l'économie voulue par les parties était impossible est envisageable et n'est pas indigne. On est là face à un débat important entre sécurité contractuelle et économique et liberté contractuelle et économique. [...]
[...] Concrétement elle dit que le marché du textile et les ventes en supermarché ont chuté et n'ont pas permis de rendre le contrat prospère. De ce fait le contrat étant non viable, il est dépourvu de cause. La non-rentabilité d'un contrat peut-il rendre ce dernier dépourvu de cause ? La Cour de cassation dans un arrêt du 18 mars 2014 a rejeté le pourvoi estimant que la cause de l'obligation constitue une condition de la formation du contrat, et que dès lors la Cour d'appel a justifié sa décision en considérant que la cause de l'obligation résidait dans la mise à disposition de la marque et non dans la rentabilité du contrat. [...]
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